Un an après avoir congédié Helena Guergis et alors que de nouvelles révélations font surface, le chef du Parti conservateur du Canada, Stephen Harper, maintient la ligne dure: l'ex-ministre de la Condition féminine n'a plus sa place parmi ses troupes.

«Il y a trop de problèmes politiques en ce qui concerne cet individu. On a discuté ces choses avec les membres de notre caucus, et il n'y a aucune volonté de voir le retour de cet individu dans notre caucus», s'est contenté de dire M. Harper, de passage à Thornhill, en banlieue de Toronto.

En avril 2010, M. Harper expulsait Mme Guergis du Conseil des ministres et du caucus conservateur sans donner d'explications, en laissant seulement savoir que des allégations «sérieuses et crédibles» concernant la députée de Simcoe-Grey avaient été transmises à la GRC.

Le réseau CBC a révélé jeudi soir, grâce à un document obtenu par la Loi sur l'accès à l'information, que les faits reprochés par le gouvernement Harper à Mme Guergis comprenaient des allégations de fraude, d'extorsion et de liens présumés avec des prostituées.

Or, la GRC a blanchi l'ex-ministre qui se représente comme candidate indépendante dans Simcoe-Grey. L'avocat du gouvernement et l'enquêteur privé dans le dossier ont tous deux depuis indiqué qu'ils ne détenaient aucune preuve de ces allégations.

Vendredi matin, le chef conservateur a tout de même défendu les actions de son gouvernement dans le dossier.

«Nous avons donné des informations sérieuses aux autorités pour qu'elles fassent leur enquête. C'était la chose à faire», a souligné M. Harper, catégorique.

Helena Guergis réagit

En conférence de presse à Collingwood, en Ontario, Helena Guergis a eu du mal à retenir ses larmes à la suite des révélations de la CBC sur la teneur des allégations contre elle.

Elle a soutenu avoir été traitée injustement par Stephen Harper et s'est dite convaincue de pouvoir réintégrer la famille conservatrice lorsque le parti sera dirigé par un autre chef.

«Alors que M. Harper a choisi d'ignorer ma loyauté et mes années de service dans Simcoe-Grey, je crois que mes commettants me connaissent, me font confiance. On m'a expulsée de manière antidémocratique du caucus conservateur, a dit Mme Guergis. Je suis ici pour me défendre, pour défendre mes commettants et pour défendre les principes démocratiques que nous chérissons tant.»

«En me réélisant, les commettants enverront un message clair qu'ils ne vont pas tolérer un tel comportement inacceptable de nos leaders politiques», a-t-elle ajouté.

Jugement remis en question

Pour les adversaires de M. Harper, ces nouvelles révélations remettent en question le jugement du chef conservateur.

«C'est deux poids, deux mesures, homme, femme. Mme Guergis a été faussement accusée, alors que Bruce Carson est resté dans le cabinet du premier ministre, avec ses escortes et tout ça, a lancé le chef libéral, Michael Ignatieff. Les femmes du Canada vont dire: deux poids, deux mesures. C'est une démarche hypocrite. Et ce n'est pas un leadership fort. (M. Harper) n'a pas même la décence d'admettre qu'il a fait une erreur monumentale envers Mme Guergis.»

Même son de cloche au NPD. «Le premier ministre a des proches qui ont été condamnés et qui sont engagés dans son bureau. Il y a des sénateurs accusés de fraude qui restent dans la campagne des conservateurs. Et là, on (congédie) Mme Guergis. C'est deux poids, deux mesures et les Canadiens s'en rendent compte», a réagi le chef Jack Layton.

Pour Gilles Duceppe, l'affaire Guergis est symptomatique du comportement du premier ministre sortant. «On lui a dit (à Stephen Harper) de rendre publiques les allégations. Il a refusé. Il s'est fait prendre à son propre jeu», a lancé le chef bloquiste.

- Avec Paul Journet, Hugo de Grandpré, Joël-Denis Bellavance et Anabelle Nicoud