Le gouvernement Harper a déposé un projet de loi à la Chambre des communes, jeudi matin, pour faciliter le gel des actifs de membres de régimes corrompus et de leurs proches. Les partis de l'opposition se sont dits prêts à l'adopter le plus rapidement possible.

En point de presse, le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, a expliqué ce geste par l'impasse dans laquelle le Canada se trouve alors qu'il souhaite geler les biens de membres de la famille de l'ancien dictateur de la Tunisie, Zine el-Abidine Ben Ali. Certains sont arrivés à Montréal il y a quelques semaines. L'un d'entre eux serait propriétaire d'une maison à Westmount.

«On en est rendu à l'évidence que ce n'était pas possible: nous ne pouvions pas obtenir les informations et les renseignements», a déclaré le ministre Cannon, au sujet de ses relations avec Tunis depuis la chute du président Ben Ali.

Le Canada a eu moins de difficulté dans le cas de la Libye: en début de semaine, il a saisi plus de 2 milliards d'actifs appartenant au dictateur Mouammar Kadhafi et à son entourage. Le processus a été grandement facilité par l'adoption d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies, ce qui n'avait pas été le cas pour la Tunisie.

Pas assez rapide

Ottawa espère ainsi assouplir les critères qui lui permettront de procéder aux gels d'actifs de manière plus rapide dans les cas semblables à celui de la Tunisie. Par exemple, il ne serait plus nécessaire pour un pays étranger de fournir des preuves d'activités criminelles ou d'identifier des biens en particulier.

Dorénavant, trois conditions devraient plutôt être remplies pour permettre à Ottawa d'aller de l'avant: les personnes visées devraient avoir occupé une position d'importance au sein du régime concerné; une incertitude politique devrait régner dans le pays; et le gel devrait être fait dans l'intérêt des relations internationales.

En point de presse au Parlement, le ministre Cannon et son collègue de la Justice, Rob Nicholson, ont demandé aux partis de l'opposition de collaborer avec eux pour assurer une adoption rapide de ces nouvelles mesures législatives.

Les partis de l'opposition se sont dits prêts à accéder à la demande. Le Parti libéral souhaite tout de même étudier le document. Le NPD est pour sa part satisfait de voir dans le texte un processus d'examen après une période de cinq ans, une mesure qu'il avait réclamée.

Quant au Bloc, le chef Gilles Duceppe s'est déclaré en faveur des mesures présentées jeudi, mais il a maintenu la pression sur le gouvernement pour qu'il agisse encore plus rapidement dans le dossier des proches du dictateur Ben Ali. Selon lui, Ottawa avait les moyens à sa disposition pour geler leurs actifs depuis longtemps, mais il ne l'a pas fait.

Lors d'une conversation privée, jeudi, il a d'ailleurs de nouveau invité Lawrence Cannon à les considérer, en attendant que la loi soit adoptée. «Il a dit qu'il allait vérifier», a indiqué M. Duceppe.