(Ottawa) Les néo-démocrates excluent de joindre leur voix à celles des conservateurs et bloquistes pour demander, à leur tour, la démission du président de la Chambre des communes, Greg Fergus.

Ce dernier, qui n’occupe cette fonction que depuis octobre, est dans l’embarras en raison de son apparition virtuelle dans un évènement partisan.

« Je pense que c’est irresponsable en ce moment de demander sa démission », a dit mardi après-midi le chef adjoint du Nouveau Parti démocratique (NPD), Alexandre Boulerice, devant les journalistes.

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Le chef adjoint du Nouveau Parti démocratique (NPD), Alexandre Boulerice

La pression sur M. Fergus, député libéral de la circonscription de Hull—Aylmer, aurait été plus forte si les néo-démocrates avaient eu une position inverse. Dans ce cas, une majorité d’élus auraient réclamé qu’il renonce à ses fonctions.

C’est plutôt le scénario contraire qui se profile puisque, dès l’avant-midi, la leader parlementaire du gouvernement, Karina Gould, a signalé que les libéraux maintiennent leur confiance envers le président de la Chambre.

« C’était une erreur, ce qu’il a fait, mais il l’a reconnu », a-t-elle soutenu en mêlée de presse, précisant que M. Fergus s’est excusé et a assuré aux députés qu’un tel incident ne se reproduirait plus.

Les libéraux forment une minorité en Chambre, mais atteignent une majorité si on y additionne les élus du NPD.

M. Boulerice estime qu’une démission du président et, conséquemment, une nouvelle élection pour élire son successeur, seraient une « distraction ».

« Je pense qu’il reste huit jours et demi avant la fin de la session parlementaire. On a beaucoup de travail à faire, on ne veut pas avoir une distraction qui va paralyser le Parlement pendant deux, trois jours », a-t-il affirmé.

Son collègue Peter Julian, leader parlementaire, a réitéré que les néo-démocrates sont d’avis, tout comme les conservateurs, que l’incident concernant M. Fergus devrait faire l’objet d’une étude en comité. « C’est ça qu’on préconise », a-t-il résumé.

Selon une procédure parlementaire lancée par le leader en Chambre de l’opposition officielle, Andrew Scheer, il est déjà établi qu’un renvoi du dossier pour considération aux élus d’un comité pourrait survenir.

Le vice-président aux Communes, Chris d’Entremont, aurait pu décider d’autoriser cela de par l’autorité de la présidence, qui lui a été confiée pour trancher sur la question parce que M. Fergus s’est récusé des discussions qui le concernent.

« La présidence se trouve dans une position difficile, car elle doit décider si, à première vue, le comportement d’un collègue remet en question l’impartialité de la présidence. C’est une question sur laquelle il est préférable que la Chambre elle-même se prononce », a déclaré M. D’Entremont.

Ainsi, il a invité M. Scheer à déposer une motion en ce sens et a décidé de placer les débats parlementaires sur celle-ci au-dessus de la pile des priorités du jour. Des échanges sur le sujet s’en sont suivis et un vote doit survenir mercredi après-midi.

Le comité qui pourrait être chargé de trancher sur le fond est composé, en majorité, de libéraux et de néo-démocrates lorsqu’on compte la présidente de celui-ci.

Les enjeux d’impartialité soulevés par l’incident ont d’abord été amenés lundi avant-midi sur le plancher de la Chambre par M. Scheer, qui a déjà, par le passé, occupé les mêmes fonctions que M. Fergus.

En après-midi du jour même, il a fait savoir que l’opposition officielle réclamait la démission de M. Rota, joignant ainsi sa voix à celle du Bloc québécois, première formation politique aux Communes à avoir fait cette demande.

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Anthony Rota

Aux yeux du chef bloquiste Yves-François Blanchet, nul besoin d’attendre un possible renvoi en comité. « Qu’il démissionne, c’est beaucoup plus rapide », a-t-il dit.

Comme M. Boulerice, il croit que l’affaire crée de la « distraction », mais sous un angle complètement différent.

« Évitons une distraction majeure dans le fonctionnement du Parlement et le délire partisan auquel ça peut prêter », a ajouté le chef du Bloc québécois. Selon lui, le travail des parlementaires sur des enjeux importants ne pourrait pas continuer comme il se devrait.

Les critiques à l’endroit de M. Fergus fusent depuis la diffusion, au congrès du Parti libéral de l’Ontario, d’un message capté sur vidéo dans lequel il remercie le chef intérimaire sortant de cette formation politique, John Fraser.

Avant de se récuser du dossier, le président de la Chambre a déclaré qu’on lui avait demandé un tel enregistrement pour une réunion privée en l’honneur M. Fraser, qu’il considère comme un ami de longue date.

L’élu québécois a indiqué aux députés qu’il regrettait que la vidéo ait été utilisée à d’autres fins. Il a précisé qu’il n’était pas membre du Parti libéral de l’Ontario et qu’il n’avait pas voté dans la province depuis 30 ans.

M. Scheer a relevé, dès le départ, que le président de la Chambre portait l’habit officiel de ses fonctions au cours de son message de remerciements à M. Fraser et que le bureau de la présidence était reconnaissable en arrière-plan.

Le député de Hull—Aylmer a été élu au poste de président de la Chambre en octobre, à la suite de la démission de son prédécesseur, Anthony Rota. Ce dernier a quitté ses fonctions dans la foulée de la controverse concernant la reconnaissance d’un ancien combattant ayant servi sous les nazis lors d’une visite du président ukrainien Volodymyr Zelensky.