Des emplois et plus de pouvoir d'achat, voilà la solution de Jean Charest pour stimuler une économie à l'aube d'une tempête.

Au deuxième jour d'une campagne électorale qu'il a lui-même déclenchée avec l'intention d'aller chercher un mandat fort pour faire face à la crise, le chef libéral a dévoilé le cadre de son plan d'action pour l'économie, qu'il n'aurait pas pu, selon lui, mettre en place dans l'état minoritaire où son gouvernement se trouvait.

 

S'il est réélu, le Parti libéral promet d'accélérer les investissements dans les infrastructures, de 37 à 41 milliards durant la période 2008-2013, d'augmenter le salaire minimum, et d'investir 1 milliard à la Société générale de financement (SGF) afin de soutenir les PME québécoises, en plus d'encourager la formation de la main-d'oeuvre.

«Il faut commencer avec l'emploi dans un contexte de ralentissement économique, a dit M. Charest, hier. La meilleure façon de protéger le pouvoir d'achat, c'est de faire en sorte qu'un Québécois puisse avoir un chèque de paie.»

La plupart des mesures annoncées hier seront financées en refilant la facture au service de la dette, mais plusieurs n'ont pas encore été chiffrées, comme l'aide aux propriétaires qui veulent faire des rénovations résidentielles, une promesse qui sera détaillée dans les prochains jours.

Le chef libéral a par ailleurs refusé d'envisager que la population lui redonne un mandat de gouvernement minoritaire, comme ce fut le cas en 2007, jugeant que les Québécois sauront agir en conséquence afin d'assurer une «stabilité politique, dans une période de turbulences économiques».

M. Charest répète depuis le début de la semaine qu'il aurait été impossible de traverser une éventuelle crise alors que les partis d'opposition sont majoritaires à l'Assemblée nationale.

Interrogé pour savoir quelles mesures annoncées hier il n'aurait pu faire adopter à cause de l'opposition, qui l'avait pourtant assuré de sa collaboration, le chef libéral a dû se défendre, encore une fois, d'avoir déclenché des élections hâtives.

«Pauline Marois et Mario Dumont se sont opposés à l'essentiel des mesures que nous avons déjà mises de l'avant», a-t-il souligné en guise de justification.

«Je ne peux pas présumer de leur collaboration, a-t-il ajouté. Il y a ce qu'ils disent et ce qu'ils font.»

Réactions

Selon Mario Dumont, le plan Charest est une insulte aux électeurs. Le chef de l'ADQ estime que si le premier ministre avait des suggestions pour stimuler l'économie, il n'avait qu'à les présenter à l'Assemblée nationale au lieu de précipiter la province en élections. «C'est rire du monde», a-t-il résumé.

Sur le fond, le projet des libéraux ne fera rien pour résoudre les problèmes de la classe moyenne, soutient le chef adéquiste. Ce sont plutôt «les grandes entreprises et les lobbyistes» qui empocheront, allusion à la proposition de fournir 1 milliard à la SGF pour mieux soutenir les entreprises.

«Ce ne sera pas des programmes universels axés sur tout le monde, a déploré M. Dumont. Pour avoir accès à cet argent, il faudra faire du lobbying auprès du gouvernement, une entreprise contre l'autre pour aller mettre la main sur l'argent.»

Le plan adéquiste, dévoilé par La Presse lundi, prévoit 1 milliard pour assurer le pouvoir d'achat de la classe moyenne. Le parti veut notamment rendre déductibles d'impôt les intérêts versés sur les hypothèques, une mesure qui aidera les petits propriétaires immobiliers.

De passage dans Verchères, en Montérégie, la chef péquiste Pauline Marois s'est réjouie que M. Charest se convertisse à la philosophie péquiste. «Dans son plan économique, M. Charest est passé aux aveux. Après cinq ans de négligence, il s'est enfin rendu compte qu'il y avait des institutions publiques québécoises de qualité qui étaient là pour aider au développement du Québec. Il était temps qu'il s'en rende compte et adopte la stratégie que nous avions retenue lorsque nous étions au gouvernement. Mais l'original serait meilleur que la copie», a-t-elle lancé. Le PQ a présenté lui aussi, hier, son plan pour aider l'économie (voir autre texte).

En soirée, le chef libéral a tenu sa soirée d'investiture à Sherbrooke où il a, une fois de plus, discuté longuement d'économie, devant plus de 500 partisans.

S'il est réélu, M. Charest a par ailleurs affirmé qu'il pourrait rappeler la Chambre dès le 13 janvier, plutôt qu'à la mi-mars comme le prévoit le règlement de l'Assemblée nationale.

Le Conseil des ministres, lors de sa dernière rencontre, mercredi, a adopté un décret en ce sens. Mais un nouveau gouvernement, même libéral, au lendemain du scrutin du 8 décembre, pourrait toujours en décider autrement, a-t-on laissé savoir.

Avec la collaboration de Tommy Chouinard et Martin Croteau.