(Ottawa) Le ministre canadien du Développement international demande aux talibans de revenir sur leur décision d’interdire aux femmes de travailler dans des organisations non gouvernementales en Afghanistan.

Les commentaires de Harjit Sajjan interviennent alors que plusieurs grands groupes d’aide internationale annoncent leur intention de suspendre les opérations dans le pays repris par les talibans — une entité terroriste inscrite — en août 2021.

Des millions de personnes ont été plongées dans la pauvreté depuis lors et sont maintenant confrontées à la faim, les Nations unies estimant que jusqu’à six millions d’Afghans sont actuellement menacés de famine. Le Comité international de la Croix-Rouge a également signalé une augmentation de la malnutrition et de la pneumonie chez les enfants, les inquiétudes ne faisant que croître avec l’arrivée de l’hiver.

À la lumière de la décision des talibans, Save the Children, CARE International et le Conseil norvégien pour les réfugiés ont publié une déclaration commune indiquant qu’ils ne pouvaient pas fournir l’assistance nécessaire sans leur personnel féminin et suspendaient les programmes.

« Notre gouvernement est profondément préoccupé par la récente décision des talibans d’interdire aux employées (des organisations non gouvernementales) de faire leur travail important en Afghanistan », a indiqué M. Sajjan dans une déclaration dimanche.

« Ils contribuent au travail essentiel qui consiste à répondre aux besoins humanitaires urgents du peuple afghan. Nous exhortons les talibans à revenir sur cette décision, car cela ne fera qu’aggraver les souffrances du peuple afghan. »

Le ministre Sajjan va évaluer l’impact que le changement aura et prévoit de contacter des partenaires internationaux et des groupes internationaux dans la région, a ajouté son bureau.

Les groupes humanitaires canadiens ont déjà déclaré qu’ils n’avaient pas été en mesure de fournir de l’aide parce que le gouvernement canadien n’a pas encore trouvé de solution de contournement à ses lois antiterroristes. Les responsables ont averti les organisations qu’elles pourraient les violer si elles payaient des gens en Afghanistan pour des services tels que le transport ou pour l’achat de marchandises.

Citant les sanctions du Canada, un porte-parole de la Croix-Rouge canadienne — qui fait partie d’une coalition de groupes d’aide poussant le gouvernement du premier ministre Justin Trudeau à trouver des logements pour qu’ils puissent travailler dans la région — a déclaré qu’il n’était pas affecté par la décision des talibans.

M. Sajjan a précisé que son gouvernement prévoyait de modifier le Code criminel pour fournir une solution de contournement aux groupes d’aide, mais a indiqué qu’aucun changement ne pourrait être introduit avant au moins le printemps 2023.

L’interdiction des femmes dans les organisations non gouvernementales par les talibans a suscité un tollé parmi les organisations d’aide internationale telles que l’UNICEF, dont la directrice générale a qualifié cette décision de « violation flagrante » du droit international humanitaire et des droits des femmes.

« Ces décisions auront des conséquences considérables sur la fourniture de services essentiels aux enfants et aux familles à travers le pays — en particulier dans les domaines de la santé, de la nutrition, de l’éducation et de la protection de l’enfance — des domaines où les travailleuses humanitaires ont un rôle extrêmement important à jouer », a souligné Catherine Russell dans un communiqué.

Le Comité international de la Croix-Rouge affirme qu’il emploie des centaines de femmes en Afghanistan et qu’il est particulièrement préoccupé par la signification de la décision des talibans pour les personnes faisant partie de son système de santé.

Le gouvernement canadien exprime depuis longtemps des inquiétudes quant au traitement des femmes et des filles en Afghanistan, notamment la semaine dernière lorsque la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, s’est jointe à ses homologues des pays alliés pour condamner le fait que les talibans ont exclu les femmes des universités et les filles des écoles secondaires. Ils ont publié une déclaration disant que de telles politiques « auront des conséquences sur la manière dont nos pays s’engagent avec les talibans ».

Avec des informations de l’Associated Press