Un imam controversé qui prêche que l'islam et la démocratie sont «complètement» incompatibles parce qu'un homosexuel ou un athée peut devenir député ouvrira un «centre communautaire islamique» destiné aux jeunes Montréalais.

Hamza Chaoui prône une vision rigoriste de l'islam selon laquelle les femmes doivent avoir un tuteur, les hommes doivent porter la barbe et la musique doit être interdite.

Le Centre Ashabeb, où il enseignera, a annoncé son ouverture pour le début de février, dans l'est de Montréal.

Mais le maire de l'arrondissement concerné a averti que ses fonctionnaires doivent d'abord délivrer un certificat d'occupation et que cette étape n'est pas gagnée d'avance pour M. Chaoui et ses collègues.

«Dans ce dossier, on ne va pas seulement s'en tenir à une évaluation au niveau urbanistique, a indiqué Réal Ménard, maire de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve. Il y a le cadre urbanistique et il y a le cadre de la sécurité, de la compatibilité avec le milieu.»

M. Ménard a ajouté qu'il était «conscient qu'il y avait un potentiel de polémique».

Un centre religieux

M. Chaoui est d'origine marocaine. Il s'est fait connaître comme imam des étudiants musulmans de l'Université Laval, où il a étudié en génie électrique.

Au Centre Ashabeb, «les jeunes se regrouperont pour implorer Allah et étudier la science», a-t-il dit fièrement il y a deux semaines, lorsqu'il a fait l'annonce l'ouverture prochaine de l'établissement. 

Une première version de son message sur Facebook explique qu'on y fera cinq séances de prière quotidiennes et la grande prière du vendredi. Ces mentions ont été supprimées par la suite. 

Demeurent les cercles de mémorisation du Coran, des ateliers d'échange, un séminaire religieux hebdomadaire, un souper mensuel et des cours d'arabe.

Hamza Chaoui n'a pas rappelé La Presse et le message envoyé à l'adresse courriel du Centre Ashabeb est resté sans réponse. Au Journal de Mercier-Est, il a confirmé qu'il faisait partie de l'organisme qui gérera le centre.

L'imam Hamza Chaoui a fait des vagues par le passé en raison de ses enseignements rigoristes. Sur sa page Facebook, où il prêche à quelques centaines d'abonnés, l'imam a récemment exposé son rejet total du système démocratique. «La législation islamique et la démocratie sont sur deux lignes en parallèle qui ne seront jamais en intersection» parce que la démocratie peut déboucher sur des Parlements formés «d'un mécréant ou bien d'un homosexuel ou d'un athée qui affirme l'inexistence d'Allah», selon M. Chaoui.

En réponse aux commentaires d'autres internautes, il a ajouté que «le vote en islam est haram (un péché) et n'est pas permis». «La démocratie est un système de mécréance et il faut le boycotter.»

M. Chaoui juge aussi sévèrement le système criminel canadien, qui n'apprendrait pas aux criminels à ne plus recommencer. Dans un prêche prononcé en 2013, il défend notamment l'amputation d'une main devant la foule pour punir les voleurs ainsi que la lapidation pour les époux adultères.

Il souligne toutefois qu'il s'agit de la conséquence prévue pour ces crimes dans l'islam, et que les musulmans canadiens ne devaient pas se faire justice eux-mêmes ou appliquer cette loi au Canada.

L'imam se prononce toutefois contre l'interdiction de conduire pour les femmes saoudiennes. De toute façon, la possibilité «d'entrer en contact physique avec les hommes» dans le transport en commun ou encore d'être seule dans un taxi avec un chauffeur de sexe masculin serait bien pire, selon lui.

«Protocole des sages de Sion» et Coupe du monde

Toujours dans ses enseignements sur Facebook, l'imam s'insurgeait l'été dernier contre les Coupes du monde de soccer, où on voit des «joueurs presque nus à la fin du match» et «le stade plein pendant le temps des prières».

Certains jeunes utilisent même leur mémoire pour apprendre des noms de joueurs plutôt que des passages du Coran, a-t-il déploré.

«Durant ces matchs, on trouve souvent la danse, le sifflement, les cris, la musique, la consommation d'alcool, la publicité interdite et l'apparition de quelques filles à la télévision», ajoute le prédicateur. Pour appuyer ses dires, M. Chaoui se réclame même du «Protocole des sages de Sion», un faux document censé évoquer un complot juif contre le reste de l'humanité.

L'automne dernier, La Presse avait révélé que Hamza Chaoui avait pris la parole à plusieurs reprises devant les musulmans de Saint-Jean-sur-Richelieu, dans le local de prière que fréquentait Martin Couture-Rouleau. Aucune information ne nous indique toutefois que celui qui a heurté mortellement l'adjudant Patrice Vincent était présent lors des prêches de l'imam.