Idelson Guerrier a tué deux patients avec une serviette et a tenté d'étouffer deux femmes à l'hôpital Notre-Dame en 2012. Deux ans après avoir été déclaré non criminellement responsable en raison de sa schizophrénie, il a déjà retrouvé sa liberté, même s'il représente toujours un «risque important pour la sécurité du public», selon la Commission d'examen des troubles mentaux.

L'homme de 38 ans a frôlé la mort le mois dernier dans un bar de Montréal-Nord. Selon nos informations, il se serait interposé devant un homme qui s'en prenait à une serveuse. Son agresseur, qui l'aurait poignardé au cou, a été accusé de tentative de meurtre. Idelson Guerrier a obtenu depuis son congé de l'hôpital et se trouve toujours en liberté sous conditions, a indiqué à La Presse son avocat Me François Bérichon.

Deux ans plus tôt, Idelson Guerrier risquait la prison à vie sans possibilité de libération avant 25 ans pour les meurtres prémédités de Gaétan Sénécal, 69 ans, et de Claude Courtemanche, 77 ans, et les tentatives de meurtre contre deux femmes hospitalisées à l'hôpital Notre-Dame. Le résidant de Joliette avait été admis au département de psychiatrie après avoir tenté d'étrangler un quidam. Il se croyait victime d'un complot depuis plusieurs mois.

Pendant sept jours, Idelson Guerrier a rôdé dans l'aile de l'hôpital en étouffant avec une serviette ses victimes alitées, sans alerter le personnel. La preuve a révélé qu'il souffrait alors de schizophrénie paranoïde et entendait des voix. Le jury l'a ainsi déclaré non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux au terme de son procès en mars 2016.

Progrès «importants»

Détenu depuis à l'Institut Philippe-Pinel, Idelson Guerrier a obtenu ses premières sorties à peine six mois après le verdict grâce à ses «importants» progrès. «L'accusé n'a plus d'hallucinations et sa méfiance envers les autres a disparu. Il est capable de participer à son traitement et a développé une bonne autocritique de sa maladie», explique la Commission d'examen des troubles mentaux dans sa décision du 1er décembre 2016.

La Commission a ensuite élargi ses privilèges de sorties en novembre 2017 pour favoriser sa réinsertion sociale. On note alors que l'accusé a respecté son traitement, n'a pas consommé de drogue et a commencé à travailler quatre jours par semaine. 

Idelson Guerrier a «démontré qu'il pouvait fonctionner tout à fait adéquatement en société», conclut son médecin traitant, le psychiatre Gilles Chamberland.

Néanmoins, l'accusé demeure à risque en raison de l'«extrême gravité» de ses crimes, de son «historique de violence en phase psychotique» et de sa schizophrénie, toujours susceptible d'entraîner «une désorganisation et un comportement à risque de passage à l'acte agressif», prévient la Commission dans cette troisième décision.

«Risque pour la sécurité»

C'est finalement à sa quatrième audience que la Commission ordonne sa libération, sous certaines conditions, telles que de s'abstenir de consommer de l'alcool et de la drogue. Le Dr Chamberland soutient dans son rapport que M. Guerrier est en rémission de sa schizophrénie paranoïde et que son état de santé est stable depuis deux ans. De plus, il travaille à temps plein et démontre une bonne assiduité à son travail. Idelson Guerrier affirme lui-même ne plus entendre de voix et être maintenant en mesure de reconnaître les signes précurseurs de sa maladie.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) s'oppose toutefois à la demande de libération de l'hôpital et recommande plutôt de poursuivre la période d'intégration jusqu'en novembre prochain.

«Pour le DPCP, la prudence doit s'imposer étant donné la gravité des crimes», indique alors le DPCP.

Le Tribunal admet dans sa décision que l'accusé représente un «risque important pour la sécurité», mais ajoute que la sécurité du public ne «commande pas qu'il soit gardé à l'hôpital», puisque ses soins peuvent lui être prodigués au service de consultations externes. La Commission explique que Idelson Guerrier prend sa médication de «façon optimale» et respecte toutes ses conditions depuis plus d'un an.

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QU'EST-CE QUE LA COMMISSION D'EXAMEN DES TROUBLES MENTAUX?

La Commission d'examen des troubles mentaux est le tribunal administratif chargé d'évaluer le danger que représente pour la société un accusé aux prises avec des problèmes mentaux. Elle est notamment appelée à déterminer si un accusé déclaré inapte à subir son procès est maintenant devenu apte. Dans un cas de verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux, la Commission se prononce sur l'importance du risque que l'accusé représente pour la sécurité du public. Un accusé profite d'une première audience devant la Commission dans un délai maximal de 90 jours à partir du verdict, puis d'une révision toutes les années tant qu'il n'est pas libéré sans condition. Les décisions de la Commission sont publiques. Par contre, seules les initiales de l'accusé s'y retrouvent.