Pendant 20 ans, Adam* a traité sa femme comme sa propriété. Il l’a agressée sexuellement à d’innombrables reprises. « Tu es ma femme, je peux te faire ce que je veux », lui répétait-il. Il a aussi battu leur fille, au point d’affecter son audition. Mardi, il a été condamné à six ans de pénitencier.

« Sa violence était totalement gratuite. Sa femme était seule au pays. Et il a imposé une atmosphère de domination et de contrôle en instillant la peur », a affirmé mardi le juge Claude Leblond au palais de justice de Montréal.

Cette peine « importante » lance un message d’espoir aux victimes de violence conjugale, selon la Couronne. « C’est important de dire aux victimes qu’on va les accompagner et que c’est possible d’avoir des condamnations et des peines importantes », a affirmé MKahina Rougeau Daoud en entrevue avec La Presse.

Le résidant de Pierrefonds de 69 ans a été reconnu coupable, en novembre dernier, de plusieurs chefs d’accusation à l’égard de sa femme et de sa fille, dont agression sexuelle, voies de fait causant des blessures, et menaces. On ne peut nommer le délinquant pour protéger l’identité des deux victimes.

Rapidement violent

Le calvaire de Marie* commence en 1997 lorsqu’elle rejoint son mari au Canada. Le couple s’était marié quelques années plus tôt en Amérique du Sud. Très vite, Adam se montre jaloux, contrôlant et violent. Une fois, il assène plusieurs coups au visage de sa femme simplement parce qu’elle avait parlé à un autre homme.

Une spirale de violence dont Marie restera prisonnière pendant des années.

Chaque semaine, Adam revient du travail, ivre, et frappe sa femme. Il s’en prend à elle, même quand elle est enceinte.

Un matin, « furieux » après avoir fait un rêve, Adam frappe sa femme. Cette fois, elle appelle la police, mais la mère et la sœur d’Adam la supplient de laisser tomber sa plainte.

Les sévices physiques sont réguliers. Un soir, Adam soupçonne sa femme d’avoir couché avec un autre homme. Il l’agresse alors sexuellement. Le lendemain, Marie se réfugie dans une maison pour femmes violentées. Encore une fois, l’accusé et sa famille la pousseront à retirer sa plainte.

Une autre fois, pour éviter une énième agression sexuelle, Marie prend la fuite. Elle se retrouve nue, dehors, en plein hiver. Malgré le froid, elle y demeure pendant 10 minutes. Adam lui lance alors : « Tu es ma femme, je peux te faire ce que je veux. » Selon Marie, son mari l’a agressée sexuellement plus d’une centaine de fois.

Leur fille essaie de s’imposer

Dans une scène crève-cœur, leur fille a tenté de secourir sa mère pendant une agression. « Laisse ma mère toute seule », avait-elle sommé son père, qui était finalement parti. Par la suite, pour éviter toute intervention de sa fille, Adam agressait la victime au sous-sol, la porte verrouillée. Leur fille frappait ainsi en vain sur la porte.

Après avoir subi une opération, Marie a eu le malheur d’allumer une bougie dans sa maison. « C’est ma maison. Pas de bougie », a lancé Adam. Il a ensuite agrippé la victime exactement à l’endroit où elle avait subi son intervention chirurgicale. Il la tuerait, disait-il.

Quand la victime a composé le 911 en 2020, la mère et la sœur d’Adam ont encore une fois tenté de la convaincre de retirer sa plainte. Cette fois, elle a refusé. Son cauchemar était enfin terminé.

Au procès, Adam a nié sa responsabilité sur toute la ligne. Il a même offert une défense très étonnante en matière d’agression sexuelle : certains gestes intrusifs visaient seulement à soigner le problème de constipation de sa femme. C’était la pratique dans son pays, a-t-il plaidé. Une histoire « à dormir debout » [a cock-and-bull story], selon le juge, qui a rejeté sa version.

Aucun remords

Encore aujourd’hui, Adam n’a aucun remords. « Pour lui, [la version des victimes] n’est rien d’autre que des mensonges. Clairement, il n’a aucune introspection », a affirmé mardi le juge Leblond.

La Couronne réclamait sept ans de pénitencier, contre deux ans pour la défense. Pour justifier une peine réduite, la défense faisait valoir les problèmes de santé du délinquant. Le juge n’a pas retenu cet argument. Il a également refusé d’exclure Adam de l’inscription au Registre des délinquants sexuels pendant 20 ans.

« L’absence de remords et d’introspection sont des indicateurs que l’accusé pourrait très bien récidiver dans un contexte de violence conjugale », a tranché le juge.

* Prénoms fictifs, pour protéger l’identité des victimes

BESOIN D’AIDE ?

Si vous êtes victime de violence conjugale et cherchez aide et répit, contactez SOS violence conjugale au 1 800 363-9010. Des intervenants y sont disponibles 24 heures sur 24, sept jours sur sept.

Les Centres d’aide aux victimes d’actes criminels viennent en aide aux proches de victimes d’actes criminels à la suite d’évènements traumatiques : 1866 CAVAC (1 866 532-2822).

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