Un fraudeur de 18 ans qui a soutiré des milliers de dollars à des aînés vulnérables par l’entremise d’un stratagème de faux représentant s’en tire avec six mois de détention. Une peine bonbon digne du « tribunal jeunesse », selon le juge, qui n’a pas eu le choix d’entériner la suggestion commune de la Couronne et de la défense.

« Ce crime-là vaut deux ans. Six mois, c’est une sentence de tribunal de jeunesse. Vous êtes chanceux que ce soit une suggestion commune, je n’interviendrai pas. Je l’aurais envoyé au pénitencier, je vous le garantis », s’est étonné le juge Pierre Bélisle la semaine dernière.

Les juges sont habituellement tenus d’accepter les suggestions communes. Depuis l’arrêt Cook en 2016, la Cour suprême a placé la barre très haut pour qu’un juge puisse rejeter une telle suggestion.

Le juge Bélisle était visiblement mécontent de la peine clémente proposée dans le dossier de Koby Elong. Le cégépien de 18 ans a plaidé coupable à des accusations de fraude, de tentative de vol de voiture et de possession d’outil de cambriolage. Il devra purger une peine globale de six mois.

« Je vous rappelle qu’on n’est pas au tribunal de la jeunesse. On est au tribunal pour adulte, il faut que ça paraisse », avait avisé le juge Bélisle avant d’entendre la suggestion commune des deux parties.

La peine suggérée tient compte du règlement hâtif des dossiers et du fait que le fraudeur commence sa vie d’adulte.

« C’est des bons débuts », a ironisé le juge de la Cour du Québec.

Six aînés victimes de fraude

Koby Elong a berné six aînés vulnérables en se procurant leur carte de débit et leur NIP par l’entremise d’un crime très répandu, la fraude du faux représentant.

Même modus operandi chaque fois : la personne ciblée reçoit un appel téléphonique d’un individu se faisant passer pour un policier. Ce dernier explique à la personne qu’elle vient d’être victime d’une fraude. Il lui suggère de laisser ses cartes de guichet et son NIP dans une enveloppe devant chez elle. Les bandits ramassent ensuite le tout et retirent de l’argent à même le compte des victimes, généralement des aînés.

Koby Elong utilisait les cartes moins d’une heure après les appels frauduleux. Un complice, qui n’a pas pu être identifié par la police, se chargeait de contacter les victimes.

L’une d’entre elles s’est d’ailleurs rendu compte de la supercherie quelques minutes après avoir été appelée. Mais le mal était déjà fait : l’enveloppe déposée sur le pas de sa porte avait déjà disparu.

Koby Elong a usé de ce stratagème six fois durant l’été 2023.

Les banques ont remboursé les sommes perdues par les citoyens piégés, malgré le fait qu’ils aient transmis leur NIP de leur plein gré. « Il s’agit de personnes vulnérables. C’est un stratagème très connu auquel les banques sont habituées », a expliqué la procureure de la Couronne.

Les pertes pour les trois institutions financières ciblées sont évaluées à 10 606,18 $. Le total de la fraude s’élève à près de 23 000 $, puisque Koby Elong a fait d’autres tentatives qui ont échoué grâce à la limite de retrait imposée.

Le jeune malfaiteur a été identifié par les autorités sur des images de caméra de surveillance près d’un guichet automatique. Il pouvait facilement s’y procurer le montant maximum de retrait puisque ses victimes avaient transmis leur NIP.

Un crime odieux, selon le juge

« Il ne faut pas dire que parce que c’est des banques, c’est pas grave. Vous êtes chanceux qu’on les ait remboursées », a insisté le juge Bélisle.

Il a qualifié de « lourds et odieux » les crimes commis par le jeune homme. « Voler des personnes âgées, c’est odieux. Je ne sais pas quoi dire de ce genre de crime à part que ça me renverse, le manque de morale », a-t-il expliqué à Koby Elong.

Ce dernier devra faire 50 heures de travaux communautaires et rembourser les pertes subies par les trois institutions financières dans un délai de deux ans, en plus de sa peine de six mois.

Le juge s’est d’ailleurs questionné sur la façon dont le jeune homme allait s’y prendre pour régler sa dette.

Son client va recommencer à travailler et devenir un actif pour la société, a assuré son avocat, MJean-Luc Dagenais.

C’est MGeneviève Bélanger qui représentait le ministère public dans ce dossier.