Plus de 100 immeubles et près de 20 millions bloqués par le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) au cours des dernières années sont actuellement en attente de confiscation aux profits de la Ville, des groupes communautaires et des victimes d'actes criminels. Ces chiffres ont été dévoilés lors d'un événement organisé par l'Association des spécialistes certifiés de lutte au blanchiment d'argent (ACAMS) auquel La Presse a assisté récemment à Montréal.

Division discrète

Immeubles, terrains, voitures, métaux précieux, bijoux. Ce sont les types de biens qui figurent au tableau de chasse de la discrète Division des produits de la criminalité du SPVM, qui fait partie de la Division du crime organisé. Créée au début des années 2000, elle a pour mandat de cibler les biens appartenant aux suspects, à prouver leur propriété et à les saisir. Son rôle peut être limité, par exemple prouver l'origine criminelle d'une liasse d'argent trouvée dans une voiture après une interception pour une banale infraction, mais il peut également être plus important, comme accompagner une autre section dans une opération majeure ou encore mener sa propre enquête d'envergure.

La mission

«Le crime organisé existe pour faire de l'argent. Si on ne s'attaque pas à cette facette, on passe à côté de notre mission. Oui, il y a les saisies et les arrestations, mais si on veut faire mal et ébranler les organisations criminelles, c'est la meilleure façon», explique le commandant Martin Renaud, patron de la division. «On fait partie de toutes les enquêtes où il y a un potentiel de récupération fiscale.» Une fois confisqués, les biens sont partagés selon la proportion suivante: 50% à la Ville de Montréal, 25% à des organismes communautaires et 25% au Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels.

Hausse fulgurante

La division a connu des débuts plutôt modestes alors que les enquêteurs, moins expérimentés, assistaient leurs collègues d'autres sections une fois que les enquêtes étaient terminées et les frappes, réalisées. Mais depuis cinq ans, ils sont mis à contribution dès le début d'une enquête et mènent leurs propres projets d'envergure. Depuis, la hausse de la valeur des biens bloqués et confisqués est fulgurante. «Il fut un temps où nous étions à la remorque des enquêtes des autres. Nous arrivions six mois ou un an après la commission des actes criminels et c'était difficile de récupérer les biens. Mais il y a eu un changement de stratégie», confirme le commandant Renaud.

Projet Loupe

28 mai 2014: Les enquêteurs démantèlent un réseau indépendant d'individus soupçonnés d'importation et de distribution de cocaïne opérant principalement dans le sud-ouest de Montréal, avec la bénédiction des motards. Plusieurs actifs appartenant aux suspects qui, selon la police, écoulaient 20 kg de cocaïne par semaine, sont bloqués. Durant l'enquête, les douaniers ont mis la main sur 123 kg de cocaïne dans une camionnette qui tentait de franchir la frontière canadienne à Sarnia, en Ontario.

Frappe contre des producteurs de mari

19 juin 2013: L'enquête visait des individus de la Colombie-Britannique qui produisaient de la marijuana au Québec en raison du marché immobilier plus favorable, et qui investissaient ensuite dans des immeubles dans la région de Vancouver. Cinq immeubles, d'une valeur totale de 2,3 millions, ont été saisis dans la première phase de l'enquête ainsi que trois autres bâtiments, et 45 comptes en banque et deux coffrets de sûreté ont été saisis dans la seconde phase de l'enquête en avril 2014.

Projet Promu

Septembre 2010: Les enquêteurs des produits de la criminalité ont visé une organisation criminelle spécialisée dans la production de marijuana et dont les revenus s'élevaient, selon la police, à 5 millions par année. Cinq ans plus tard, les procédures se poursuivent contre certains des 18 suspects arrêtés, dont deux qu'on soupçonne d'être les têtes dirigeantes. Huit propriétés, dans lesquelles des plantations de marijuana ont été aménagées, et au moins un chalet et des comptes en banque, d'une valeur totale de 3,3 millions, sont toujours bloqués par les autorités.