Est-ce un débrayage illégal ou une simple application de la convention collective ? Depuis ce matin, les nombreuses grues sur le chantier du nouveau pont Champlain sont à l'arrêt, faute d'ouvriers pour les opérer.

Le consortium Signature sur le Saint-Laurent, maître d'oeuvre du chantier, refuse de dire s'il s'agit d'un débrayage illégal ou d'une procédure normale lorsque la météo se fait pluvieuse, comme ce qui prévaut depuis le début de la matinée.

L'Union des opérateurs grutiers, affiliée à la FTQ-Construction, assure pour sa part qu'«il n'y a aucune grève illégale sur les chantiers du Québec».

La Commission de la construction du Québec, qui a sur le chantier des enquêteurs depuis quelques jours, «considère la situation comme un débrayage illégal et a ouvert une enquête», indique la porte-parole Mélanie Malenfant.

Le syndicat dénonce depuis plusieurs semaines des modifications au programme de formation pour devenir grutier. Un allègement réglementaire permet désormais à des opérateurs non formés d'utiliser des camions-flèche («boom truck»), ce qui ne fait pas l'affaire du syndicat.

Selon des rumeurs persistantes, des grutiers du chantier du nouveau pont laissent planer qu'un débrayage spontané (et illégal) pourrait avoir lieu au cours des prochains jours pour dénoncer cette situation. Le rythme de travail sur le chantier a été considérablement augmenté ces dernières semaines pour respecter la date limite de livraison de l'ouvrage, prévue pour le mois de décembre, mais certains grutiers refuseraient de faire des heures supplémentaires les week-ends et appliqueraient la convention collective avec zèle.

La tension avec le consortium signature sur le Saint-Laurent serait telle que des inspecteurs de la Commission de la construction du Québec «surveillent en permanence les faits et gestes des grutiers, allant même jusqu'à chronométrer leurs allées et venues», affirme le syndicat dans un communiqué.

Or, ce matin, plusieurs des grutiers ont décidé de quitter le chantier du nouveau pont Champlain après que l'employeur ait décrété que la météo ne permettait pas de procéder aux opérations de levage normales. La convention collective prévoirait que les ouvriers doivent dans de telles circonstances quitter le chantier, mais sont rémunérés pour une période de quatre heures. Une entente spécifique avec les grutiers prévoirait qu'ils soient plutôt rémunérés pendant neuf heures lors d'un arrêt des travaux pour cause d'intempéries.

Les grutiers d'installations en hauteur auraient décidé de quitter le chantier puisque l'employeur ne leur rémunérait que 4 heures. Les grutiers qui travaillent au sol avec des équipements de moindre taille auraient décidé d'emboîter le pas alors que leurs opérations n'étaient pas affectées par la pluie.

Le consortium Signature sur le Saint-Laurent, dirigé par SNC-Lavalin, a dit ne vouloir faire «aucun commentaire sur cette situation». Le président du syndicat des grutiers, Evans Dupuis, a aussi refusé de commenter.