La lutte s'annonce serrée dans la course à la mairie de Longueuil. Ancienne députée du Bloc québécois, Caroline St-Hilaire tentera de mettre fin à 27 ans de règne du Parti municipal de Longueuil en obtenant plus de voix que son rival, le notaire Jacques Goyette. La Presse vous présente aujourd'hui un portrait des deux candidats qui espèrent diriger l'une des plus importantes banlieues de Montréal.

Jacques Goyette

Le notaire réputé

Au cours des 27 dernières années, le Parti municipal de Longueuil (PML) a géré sans interruption cette municipalité de la Rive-Sud de Montréal. Le 1er novembre prochain, le candidat à la mairie Jacques Goyette tentera de poursuivre la domination de son parti.

 

Quand on lui suggère que Longueuil a peut-être besoin d'un changement, M. Goyette répond: «Moi, ça fait quatre ans que je suis là. C'est la première fois que je me présente à la mairie. J'ai juste assez d'expérience pour savoir quoi faire. Mais juste assez pour ne pas être un politicien usé.»

Âgé de 50 ans, M. Goyette a été élu pour la première fois il y a quatre ans. Il est depuis vice-président du comité exécutif de la Ville de Longueuil.

Sur la Rive-Sud, M. Goyette s'est plutôt fait connaître en tant que notaire. M. Goyette a fondé le cabinet aujourd'hui connu sous le nom d'Hardy Goyette et Associés il y a 27 ans avec son père et sa soeur.

À peine quelques mois après la création du cabinet, les deux parents de M. Goyette ont péri dans un accident de voiture. Encore aujourd'hui, M. Goyette évoque l'accident avec les larmes aux yeux. «Pour ma soeur et moi, ça voulait dire: t'as bien de la peine. Mais il faut se retrousser les manches et il faut que ça vive, ce bureau-là», raconte M. Goyette.

En se tissant de nombreux contacts au fil des ans, M. Goyette a fait de son cabinet «l'un des plus importants bureaux de notaires au Québec». Les liens étroits établis entre M. Goyette et plusieurs hommes d'affaires de Longueuil ont été étalés dans les journaux au cours des dernières semaines. Les médias ont mentionné qu'en tant que vice-président du comité exécutif, M. Goyette a, au cours des quatre dernières années, voté des propositions avantageant certains de ses clients.

Mais M. Goyette assure qu'il a toujours bien agi: «J'ai un esprit de transparence. Est-ce que je vais gâcher 27 ans de carrière pour me faire une mauvaise réputation?» M. Goyette refuse de renier son passé. «J'ai eu une carrière florissante dont je suis très fier. Personne ne me fera jamais regretter d'avoir eu du succès en affaires», dit-il.

En juin dernier, M. Goyette a décidé d'abandonner sa pratique de notaire «pour [se] consacrer à 100% à [sa] campagne». Une décision difficile. «Oui, le notariat me manque. J'ai mis ma vie là-dedans, remarque-t-il. Mais en même temps, ce que je fais actuellement est captivant.» Sans vouloir s'apitoyer, M. Goyette explique qu'il a laissé «tous ses revenus» et «une carrière florissante» pour se plonger dans la course à la mairie. «Il faut vraiment avoir une passion et le goût de le faire», note-t-il.

En plus de pratiquer le notariat, M. Goyette s'est engagé dans plusieurs organismes. Il se plaît à dire qu'il a été «président d'honneur d'à peu près tout ce qui bouge sur la Rive-Sud». «Il est très dédié à son milieu. Il est honnête et au service du public», dit un directeur d'établissement qui a bien connu M. Goyette.

«Il est très dévoué et attentionné», ajoute la soeur de M. Goyette, Hélène Goyette. Dans sa jeunesse, M. Goyette ne rêvait pas d'une carrière politique. Mais sa soeur, de deux ans son aînée, souligne qu'il s'est toujours engagé dans sa communauté. «Il aime vraiment ça, dit-elle. Il aime les gens.»

Un homme d'affaires qui connaît M. Goyette depuis des années estime que le notaire n'est «pas très exubérant», mais qu'il est «très consciencieux et très travaillant».

Il y a quatre ans, l'actuel maire Claude Gladu a sondé M. Goyette pour l'inviter à s'engager en politique. En acceptant cette offre, M. Goyette voulait «aider les gens». Ce père de deux filles de 20 et 22 ans qui habite Longueuil depuis son enfance voulait aussi «mettre Longueuil sur la «map»».

Selon M. Goyette, sa principale qualité est d'être «près des gens». Et son pire défaut? «Je parle un peu trop», dit-il. Invité à donner une qualité et un défaut à son adversaire, la chef d'Action Longueuil Caroline St-Hilaire, M. Goyette refuse. «Je ne la connais pas vraiment... Je serais malhonnête de lui donner un défaut ou une qualité.»

Caroline St-Hilaire

La politicienne déterminée

Quiconque entre dans le bureau d'Action Longueuil risque de se frotter à un grand homme souriant, arborant une belle chevelure blanche. «Vous venez voir ma fille?» demandera assurément l'homme. Ancien conseiller municipal de Longueuil, Jean St-Hilaire est le fier papa de la candidate à la mairie de Longueuil et chef d'Action Longueuil, Caroline St-Hilaire.

L'automne dernier, Mme St-Hilaire s'est retirée de la scène politique fédérale après avoir été députée du Bloc québécois dans Longueuil-Pierre-Boucher pendant 11 ans.

À peine un an plus tard, la femme qui s'apprête à fêter ses 40 ans fait le saut en politique municipale. «Je me paye un défi pour mes 40 ans!» lance-t-elle à la blague. Mme St-Hilaire pourrait devenir la première mairesse élue de Longueuil et mettre fin à 27 ans de règne du Parti municipal de Longueuil (PML).

Jean St-Hilaire, qui a toujours appuyé sa fille dans ses campagnes, a donc retroussé ses manches une fois de plus et prend part à une nouvelle course électorale. «Ma fille? C'est un pitbull. Elle ne lâche jamais!» dit-il.

Caroline St-Hilaire rigole quand elle apprend que son père la traite de «pitbull». «Ce n'est pas très positif! Je dirais plutôt que je suis déterminée, passionnée et intègre.»

Une affirmation confirmée par un homme d'affaires de Longueuil qui a côtoyé Mme St-Hilaire. «Elle est aussi spontanée, mais tout de même prudente. Mais on peut peut-être lui reprocher d'être un peu moins présente auprès des groupes sociaux de Longueuil que M. Goyette...»

Le porte-parole du Bloc québécois en matière d'environnement, Bernard Bigras, croit au contraire que Mme St-Hilaire est «très proche de ses citoyens». «C'est aussi quelqu'un de sensible, d'attentionné, avec un très beau sens de l'humour», dit-il.

M. Bigras, qui a côtoyé Mme St-Hilaire durant ses années passées au Bloc québécois, se rappelle entre autres avoir fait une tournée des régions avec elle pour sensibiliser les jeunes à l'importance de la politique. «Elle avait une proximité naturelle avec tous les gens qu'on rencontrait», dit M. Bigras.

Quand elle a quitté la politique fédérale le 14 octobre 2008, Mme St-Hilaire croyait bel et bien que «c'était fini». «Je voulais être avec mes fils», dit cette mère de deux garçons de 6 et 11 ans.

Mais la population de Longueuil s'est mise à la solliciter. «Les gens me disaient: Caroline, il y a juste toi qui pourrait les tasser de là», raconte-t-elle, en faisant référence au PML.

Mme St-Hilaire jonglait avec l'idée quand son conjoint, le député péquiste de Bourget, Maka Koto, lui a dit qu'elle devait tout simplement «ne pas regretter sa décision».

C'est à ce moment qu'elle s'est lancée. «J'ai une réelle volonté de changement pour Longueuil», dit Mme St-Hilaire en ajoutant que ce qui l'allume en politique municipale, ce sont les contacts étroits avec les gens. «On touche au quotidien des gens, dit-elle. On peut faire la différence pour eux.»

Invitée à donner une qualité et un défaut à son adversaire, Mme St-Hilaire estime que Jacques Goyette est «très bon en affaires», mais qu'il est «malhonnête intellectuellement». «Il a souvent répété que je fais une campagne de salissage sur lui. Mais en fait, je ne fais que poser des questions. Selon moi, c'est malhonnête», dit-elle. Et Mme St-Hilaire, a-t-elle un défaut? «Je suis très déterminée. Donc des fois, je m'emporte un peu...» confie-t-elle.

Caroline St-Hilaire veut changer la culture ambiante: «À Longueuil, tout ce qu'on a fait au cours des dernières années, c'est du développement immobilier. On a envahi sauvagement les espaces verts. Longueuil devient une ville-dortoir. On dort ici, mais on ne vit pas ici. Ça m'inquiète. Il faut une autre vision.»

Pour Mme St-Hilaire, Longueuil a besoin de changement. Depuis le début de sa campagne, elle martèle que son parti fera preuve d'éthique et de transparence, et sera au service des citoyens.

Mais avant tout, Mme St-Hilaire dit qu'il est important que les citoyens aillent voter le 1er novembre. «Aux dernières élections municipales, 38% des gens seulement ont voté. Il faut que les gens se déplacent et votent.»