La nouvelle administration lavalloise est dans le pétrin. Malgré la présence de vérificateurs du gouvernement et l'enquête policière en cours, on aurait récemment tenté de faire disparaître des données dans des ordinateurs, en particulier au cabinet du maire. C'est d'ailleurs ce geste qui a provoqué la plus récente perquisition, a appris La Presse.



De plus, certains fonctionnaires de la Ville auraient reçu une «formation» de leur contentieux sur l'attitude à adopter en cas d'interrogatoire policier.

On sait désormais pourquoi les enquêteurs de l'escouade Marteau, de l'Unité permanente anticorruption, ont perquisitionné au bureau du maire par intérim Alexandre Duplessis, à celui de sa secrétaire ainsi que dans les serveurs informatiques de la Ville, le 13 décembre au matin.

Les enquêteurs auraient agi dans l'urgence après avoir été informés que des données venaient d'être effacées de divers supports informatiques - notamment celui de la secrétaire du maire.

Les enquêteurs souhaitaient forcément protéger et récupérer la preuve nécessaire à leur vaste enquête sur des irrégularités potentielles dans l'attribution de contrats à la Ville de Laval. Cette enquête a déjà généré neuf perquisitions en quelques semaines - un record. On ignore cependant quels dossiers auraient été jetés dans la poubelle virtuelle de l'hôtel de ville.

«C'est la première fois que j'entends parler de ça, a affirmé Pierre Desjardins, conseiller au cabinet du maire. Mais il y a tellement de rumeurs qui se disent [sur Laval].» Il confirme seulement que l'ordinateur de la secrétaire d'Alexandre Duplessis a été emporté.

L'escouade Marteau avait agi de la même façon dans la foulée de l'annonce du sabordage du défunt parti Pro de l'ex-maire Gilles Vaillancourt. Lorsque les policiers ont fait irruption dans les bureaux du parti, boulevard Saint-Martin Ouest, mandat de perquisition en main, des cartons de documents étaient déjà empilés près de la porte.

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Par ailleurs, selon nos informations, plusieurs fonctionnaires proches du comité exécutif, en particulier des secrétaires, qui pourraient potentiellement détenir des informations sensibles, ont été conviés à une séance d'information au début du mois. Cette rencontre aurait été menée par le contentieux de la Ville. Au menu: que dire et ne pas dire aux enquêteurs et, surtout, rappeler aux fonctionnaires qu'ils ne sont pas obligés de signer la déclaration.

Cela n'est pas sans rappeler la polémique suscitée par une note interne du ministère des Transports du Québec, dans laquelle la sous-ministre expliquait à ses fonctionnaires la marche à suivre si les enquêteurs de la commission Charbonneau prenaient contact avec eux.

Nadine Lussier, porte-parole de la Ville de Laval, a répondu à La Presse que ce genre de sujet n'est pas de nature publique, puisqu'il appartient à la «régie interne» de son administration. Elle précise cependant qu'«aucun mandat n'avait été donné à l'externe» pour une réunion de ce type et que «personne à la direction générale ou au niveau politique n'a confirmé avoir assisté à une telle rencontre».

Pierre Desjardins minimise la chose. Selon lui, il s'agissait plutôt simplement de rappeler aux employés concernés qu'ils ont le droit de recourir aux services d'un avocat externe s'ils le désirent. «Il n'y a pas eu d'autres démarches», assure-t-il.

Ces nouveaux faits troublants concernant Laval surviennent dans le contexte où l'administration du nouveau maire Duplessis fait l'objet d'une surveillance étroite par un vérificateur spécial assisté par un comité de vérification, mandaté à la mi-novembre par le ministre des Affaires municipales. «Je veux savoir ce qui se passe à Laval», a alors affirmé le ministre Sylvain Gaudreault pour justifier la démarche. Plus récemment, le ministre leur a aussi confié le mandat d'éplucher le dossier controversé de la future Place Bell. On attend toujours leurs conclusions.

Quant à l'enquête policière, elle s'annonce encore longue avant de déboucher sur d'éventuelles arrestations. Les policiers doivent d'abord éplucher et analyser un volume important de documents et de données informatiques saisis lors des neuf perquisitions qui ont visé l'administration lavalloise, son ex-maire, son maire intérimaire et des entreprises obtenant la majorité des contrats de la Ville dans leur domaine.