Pas toujours facile de célébrer la diversité au sein d'une entreprise. Home Depot Canada a pu le constater cette semaine après qu'une publicité francophone lui eut valu une volée de commentaires islamophobes au Québec.

La vidéo promotionnelle dure tout juste sept secondes et met en vedette une employée portant le voile. « Nos programmes de formation spécialisés et nos possibilités d'avancement illimitées ont aidé Sehrish à passer du statut de caissière à celui de spécialiste en recrutement », peut-on lire sous la publicité mise en ligne le 9 août.

Dans les jours qui ont suivi, les commentaires négatifs ont fusé sur les réseaux sociaux francophones. « On peux-tu arrêter la promotion de la femme voilée tbnk... y'aurait pu choisir n'importe qui d'autre pour une pub... Ça commence à puer en esti quand les gouvernements et les grosses compagnies pousse la religion du voisin... », a écrit Stefan Belliveau, un utilisateur de Facebook, recueillant plusieurs réactions. « Pourquoi il nous montre toujours quelqu'un avec une nappe sur la tête », écrit Carol Brassard.

« Salauds d'hypocrites et d'esclaves obeissants aux maitres pour faire une publicite aux musulmans », renchérit un internaute utilisant le nom de Mazighus Massyles.

Plusieurs autres utilisateurs de Facebook affirment aussi qu'ils vont boycotter la chaîne de magasins de rénovation. « Boycottons home dépôt », écrit Colette Delisle. « Finis pour moi Home dépôt », rajoute Lise Danis.

Réaction raciste

« Dans plusieurs cas, c'est une réaction raciste et islamophobe claire, note le sociologue Rachad Antonius, professeur à l'Université du Québec à Montréal, après avoir consulté les commentaires. Mais elle a une portée restreinte. C'est un groupe très particulier de la société québécoise qui réagit comme ça. Les messages négatifs sont écrits par des gens peu scolarisés, qui n'occupent probablement pas des postes de responsabilités. Il n'y a pas de noms connus ou de politiciens parmi ceux qui ont réagi », analyse celui qui s'intéresse à la représentation des minorités arabes et musulmanes dans les médias du Québec et du Canada.

Il note aussi que plusieurs internautes québécois se sont portés à la défense de Home Depot et de l'employée mise de l'avant. « Félicitations à vous, madame Sehrish  ! Ne lâchez surtout pas à cause de quelques imbéciles racistes », a notamment écrit Françoise Gagnon, une utilisatrice de Facebook.

Joints par La Presse, les représentants de Home Depot, après avoir consulté l'employée mise en lumière par la publicité, ont décidé de ne pas commenter les insultes reçues et de ne pas retirer la vidéo promotionnelle du web. « Home Depot est fier de la diversité de sa main-d'oeuvre et l'objectif de cette publicité est de démontrer les possibilités d'avancement illimitées qu'offre l'entreprise », a écrit l'entreprise par l'entremise d'un consultant en communications.

Controverse en France

La publicité de Home Depot n'est pas la seule en son genre à créer des remous sur le web ces jours-ci. Une campagne du magasin Gap, mise en ligne le 24 juillet, est au coeur d'une controverse en France. Une élève prise en photo pour annoncer la collection de vêtements conçus pour le retour en classe porte un foulard islamique. « La tête de la classe mignonne », dit le slogan de l'entreprise.

Irrités, des internautes français ont lancé une campagne, #boycottgap. Une pétition lancée sur change.org a récolté 7500 signatures et demande à Gap Europe de se désolidariser de la campagne immortalisée dans une école de Harlem aux États-Unis. 

« Cette campagne banalise le port du voile, elle en donne une image joyeuse et frauduleuse. On n'arrête pas le progrès : aujourd'hui voilées, marquées sexuellement à 10 ans, demain empêchées de faire du sport et de se baigner sans un voile, après-demain excisées et mariées de force ? », peut-on lire dans le texte accompagnant la pétition.

Dans l'Hexagone, où l'État interdit le port du voile aux fillettes fréquentant l'école primaire ou secondaire publique, des députés du parti d'Emmanuel Macron, La République en marche, ont aussi appelé les Français à boycotter la chaîne de magasins de vêtements.

« Commencer l'année du bon pied consiste à ne plus en mettre un chez Gap, a tweeté vendredi la députée Aurore Bergé. Rien n'autorise ni ne justifie qu'on voile des petites filles : où est leur liberté ? Où est leur libre arbitre ? Où est leur choix ? Que ce soit un argument commercial m'écoeure », a écrit l'élue sur Twitter. Les réactions ont été tout aussi négatives chez Les Républicains. « Le marketing promeut la soumission à l'islamisme », a dit la députée Valérie Boyer, citée dans Le Parisien.

Interrogée par Le Figaro sur le port du voile dans une de ses publicités précédentes, Gap avait expliqué sa démarche : « Nous ne vendons pas le hijab qui apparaît sur cette image, néanmoins, Gap est une marque qui célèbre la diversité. Nos clients et les employés ont des origines, des religions et des modes de vie très différents et nous les soutenons tous », avait déclaré l'entreprise.