Encore deux. Deux motoneigistes qui ne rentreront jamais à la maison. De bons vivants qui mordaient à pleines dents dans la vie et qui y ont laissé la leur sur les sentiers de motoneige en fin de semaine. Depuis le début de l'hiver, 17 motoneigistes sont morts au Québec et deux n'ont toujours pas été retrouvés. Est-ce que la sécurité est défaillante sur les sentiers? Non, en croit la famille de l'une des victimes et la Fédération des clubs de motoneigistes du Québec (FCMQ).

«Sa femme le suivait en arrière. Il lui a dit : "Suis-moi, on rentre à la maison." Il était tard et il voulait la protéger en allant moins vite. Il roulait peut-être bien à 40 ou 50 km/h. Un moment donné, sa femme l'a perdu de vue. Ils l'ont retrouvé dans une curve, à côté d'un arbre», raconte Régis McNicoll, frère de Mario McNicoll. Ce dernier a perdu la vie dans la nuit de vendredi à samedi, près de La Malbaie, dans Charlevoix.

L'enquête confirmera le cours des événements. En attendant, la famille de M. McNicoll, nouvellement grand-père et si fier de l'être, est convaincue qu'il n'a pas fait preuve d'imprudence ou de témérité.

«L'hiver, toutes les fins de semaine, il partait avec ma mère et des amis faire du skidoo et l'été, c'était pareil, mais en moto», raconte sa fille Amélia, dévastée d'avoir perdu «le meilleur homme sur la terre, pour qui la famille comptait plus que tout au monde».

«Mon frère, c'est un habitué. Il a des machines depuis longtemps, c'est un bon chauffeur. La preuve, c'est qu'il s'est mis devant sa femme pour lui ouvrir le chemin tellement qu'il est prudent. Et c'est arrivé pareil...», raconte Régis. Lui aussi motoneigiste expérimenté, il croit que les conditions sont imprévisibles et que les récentes pluies ont rendu les courbes particulièrement glissantes et dangereuses.

«Même avec du monde d'expérience, on ne le sait jamais d'avance. On peut rouler à 30 km/h et on arrive dans une courbe glacée et ça ne freine pas pantoute. Je ne sais pas on doit être combien à l'avoir échappé belle dans une courbe et à s'être dit : "Crime, j'ai été chanceux sur ce coup-là."»

Tout comme le frère de M. McNicoll, Johanne Poulin, une femme de 56 ans de Sainte-Julie, n'a pas eu cette chance. Samedi après-midi, elle a été éjectée de sa motoneige dans un sentier de Laurierville, dans le Centre-du-Québec. Cette «infirmière toujours souriante», «cette femme toujours de bonne humeur et gentille» est devenue la 17e personne à perdre la vie en motoneige cette saison.

Des statistiques plus sombres cette année?

Les questions s'accumulent au même rythme que les morts, parmi lesquelles : est-ce que les sentiers sont suffisamment bien entretenus?

«On ne peut pas chialer contre les pistes de skidoo, ce sont des bénévoles qui s'en occupent. Ils font du mieux qu'ils peuvent. Ils font ce qu'il faut pour que les motoneigistes soient en sécurité», estime le frère de Mario McNicoll.

La Fédération des clubs de motoneigistes du Québec compte 1200 patrouilleurs bénévoles. Les sentiers sont entretenus par 200 clubs de motoneige et 4500 bénévoles. L'OSBL, qui travaille en partenariat avec la Sûreté du Québec et le ministère des Transports, notamment, compte plus de 100 000 membres qu'il tente de sensibiliser aux dangers de ce loisir par tous les moyens.

«On fait des campagnes de sensibilisation, on est actifs sur le terrain, sur les médias sociaux, à la radio, à la télé... On espère faire baisser le bilan des décès, mais il faut comprendre que la responsabilité est ultimement sur la personne qui utilise le véhicule», explique Marilou Perreault, porte-parole de la FCMQ, qui chapeaute la gestion des 33 000 km de sentiers de motoneige du Québec.

De plus en plus d'adeptes

La popularité de ce loisir est à la hausse. Au Québec, environ 180 000 motoneiges sont enregistrées, selon la FCMQ, qui a observé une augmentation de 15% des abonnements aux droits d'accès entre les deux dernières années. Une hausse qui s'est poursuivie cette année dans une proportion qui sera connue à la fin de la saison. Si le nombre d'accidents sera toujours trop élevé tant qu'il y en aura, la tendance est toutefois à la baisse.

«La saison dernière, on a fini avec 23 décès. Mais on a eu des années avec 35, 28 décès. On voit quand même une baisse. C'est sûr que ces dernières semaines, c'est beaucoup en peu de temps. On ne sait pas si c'est parce que la saison a commencé plus tôt, si c'est parce qu'il y a plus de gens... On n'a pas encore tous les facteurs [en main pour l'expliquer]», admet Mme Perreault, qui espère ardemment que le bilan cesse de s'alourdir.

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Mario McNicoll et sa fille Amélia.