Les applications de partage de tracés peuvent être des outils intéressants pour planifier une randonnée. Encore faut-il en connaître les limites et savoir les utiliser.

Nadia Fredette, directrice générale des Sentiers de l’Estrie, et Guy Boudreau, guide d’aventure aux monts Groulx, sont aux premières loges pour constater les effets parfois pervers des applications de partage de tracés.

« Les applications comme AllTrails et autres ont pris beaucoup de place, commente Mme Fredette. C’est très pratique, on a l’information sur son téléphone, au creux de la main, mais ça amène les gens à ne pas se soucier du fait que ce n’est pas nécessairement une information juste, vérifiée. Ça éloigne les gens des sources d’information officielle que sont les sites internet et les cartographies des responsables de sites. »

Les tracés que l’on retrouve sur les applications de partage sont produits par de simples randonneurs qui suivent les sentiers officiels… ou pas.

Quelqu’un peut dire qu’il a trouvé un super beau sentier, avec une super belle cascade et un super beau point de vue, mais finalement, c’est sur un terrain privé. En partageant cette information, on incite les autres à aller faire ce tracé, alors que dans les faits, on ne devrait pas y avoir accès.

Renée-Claude Bastien, guide d’aventure et coordonnatrice du programme de guide de tourisme d’aventure du cégep de Saint-Laurent

Évidemment, les propriétaires de ces terrains n’apprécient pas la chose. Or, ce sont souvent les mêmes propriétaires qui, après de délicates négociations, avaient autorisé la mise en place d’un sentier de randonnée à un endroit précis. « Les Sentiers de l’Estrie se trouvent essentiellement sur des terres privés, précise Mme Fredette. Lorsque les propriétaires voient des randonneurs ailleurs que sur le sentier officiel, ils rejettent la faute sur les gestionnaires de sentiers qui, à leur avis, ne font pas leur job. Ça entraîne parfois des pertes de droits de passage. »

« Il y en a beaucoup qui ne se rendent pas compte de la fragilité des lieux de pratique, ajoute Renée-Claude Bastien. Ils ne réalisent pas à quel point ces lieux de pratique dépendent des droits de passage qui sont généreusement octroyés par des propriétaires privés. Les pleinairistes d’expérience connaissent cette fragilité des réseaux : souvent, ils ont été bénévoles, ils ont eu à négocier avec des propriétaires pour faire passer des sentiers. »

Les applications de partage de sentiers ne signalent pas non plus les tronçons fermés, ils n’indiquent pas si tel secteur est fermé pour la chasse ou si ce sentier est réservé au ski hors piste en hiver.

Le cas de la traversée des monts Groulx

Dans les monts Groulx, la problématique est un peu différente.

« La particularité ici, c’est qu’il n’y a pas de sentier pour faire la fameuse traversée des monts Groulx que les gens viennent faire, indique Guy Boudreau. Il y a bien deux sentiers d’accès qui permettent de traverser la forêt boréale pour accéder à une partie du massif principal, mais une fois rendu en haut, c’est la grande aventure, il n’y a pas de sentier pour faire une traversée dans un axe nord-sud. »

Le but du jeu, c’est de tracer son propre itinéraire, ce qui nécessite des connaissances en orientation et en navigation.

« Un appareil mobile, c’est utile, mais il ne faut pas en être dépendant, affirme M. Boudreau. Ça demeure un appareil électronique : on peut le perdre, il peut se briser, il peut prendre l’eau. »

Lorsqu’une telle malchance se produit dans le sud du Québec, à deux kilomètres d’une route, on peut facilement se tirer d’affaire. Sur un territoire isolé comme les monts Groulx, c’est une autre paire de manches. Une opération de recherche et sauvetage nécessitera un hélicoptère, à des coûts astronomiques.

L’autre problème est le terrain lui-même.

« On parle d’une végétation relativement sensible, rappelle Guy Boudreau. Dans de tels cas, le code d’éthique Sans Trace nous demande de ne pas se suivre : chacun emprunte un parcours différent pour ne pas faire de piétinement. »

En utilisant les tracés offerts sur les applications de partage, on augmente inévitablement la pression sur certains endroits. Des sentiers se créent, au détriment de la végétation. « C’est pour cela qu’on demande à ce que les parcours ne soient pas partagés, affirme Guy Boudreau. On le souhaite, mais avec toute l’effervescence des réseaux sociaux, c’est peut-être utopique de penser ça. »

Il y a quand même moyen de bien utiliser les applications de partage de tracés.

« Le premier réflexe, ce serait d’aller valider ces informations avec des instances plus reconnues ou des sources d’information plus fiables », indique Renée Claude Bastien.

Elle recommande les sites internet des gestionnaires de sentiers ainsi que Balise Québec, un site de RandoQuébec qui donne un grand nombre de renseignements sur les sentiers de randonnée de la province, avec coordonnées d’accès, cartes, descriptions, etc.

> Consultez le site de Balise Québec

Suggestion vidéo : Pas d’obstacles pour Danny MacAskill

Le sympathique cycliste écossais Danny MacAskill surmonte des obstacles de façon créative dans cette vidéo filmée pour le concours The World of X Games.

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Chiffre de la semaine : 9480

C’est le nombre de dindons sauvages que les chasseurs ont trucidés au Québec en 2020, un record depuis les débuts de cette chasse en 2008. Cette chasse permet de contrôler la population… et de manger du bon dindon.