Véritable phénomène au Japon, les codes-barres bidimensionnels font leurs premiers pas au Québec. Ces carrés de lignes labyrinthiques noir et blanc cryptent de l'information qui permet d'interagir avec le mobinaute. Et les applications touristiques les exploitant prolifèrent.

Les codes-barres 2D jettent au tapis leurs ancêtres, les lignes verticales numérotées: ils emmagasinent jusqu'à 7000 caractères plutôt qu'une douzaine. De grandes promesses tiennent dans ces petits carrés à complexité variable. Pour décrypter un code, rien de plus simple pour le mobinaute: il suffit de le photographier avec un téléphone intelligent (iPhone, etc.) équipé d'un logiciel de lecture téléchargeable ou préinstallé. Le logiciel interprète le code. En un simple clic, le mobinaute accède ainsi à du texte, un site internet, une vidéo, de l'audio, des coordonnées géolocalisées, des horaires d'autobus, des coupons de réduction, etc.

«L'Europe et l'Amérique sont aujourd'hui là où le Japon était il y a cinq ans», dit le fondateur du site internet 2d code, Roger Smolski, en entrevue téléphonique. Il cite en exemple une entreprise japonaise qui propose, depuis 2008, des pierres tombales avec un code-barres 2D qui redirige les utilisateurs vers la biographie et des photos du défunt. Cet informaticien britannique recense les initiatives dans le monde avec des collaborateurs depuis une visite marquante au Japon en 2006. L'uniformité en téléphonie mobile y a propulsé leur usage.

Le code QR, inventé au pays du Soleil-Levant en 1994, s'impose d'ailleurs mondialement parmi les autres normes. Gratuit et sous licence libre, il est préféré à d'autres, comme le flashcode conçu en France par des fournisseurs télécoms.

Un outil intrigant

L'été dernier, le musée McCord a tenté sa première expérience: des codes QR étaient jumelés aux 48 photographies de l'exposition D'après Notman, présentée sur l'avenue McGill College. Chaque code liait une photographie à un microsite complémentaire et interactif, explique celui qui en a dirigé l'implantation, Hugues Boily. En quatre mois, plus de 1000 personnes en ont photographié au moins un. Expérience concluante, le musée planifie d'autres emplois. En février, c'est le Centre des sciences de Montréal qui a surpris ses visiteurs avec des codes QR intégrés dans une course à relais et d'autres sur des... cupcakes.

En 2009, des touristes ont découvert Venise dans un tour guidé nouveau genre grâce à des codes QR placardés sur des réverbères, des bâtiments et même des poubelles. Le projet-pilote TagMyLagoon visait à les sortir des sentiers battus et à enrichir leur expérience. En France, le mobilier urbain de Paris, de Bordeaux ou de Toulouse devient de véritables points d'information touristique et patrimoniale grâce à des codes-barres 2D. Et à New York, le nouveau projet Gotham Guide promet un tour guidé au rythme de votre décryptage.

D'autres initiatives misent sur leur aspect pratique et écolo. Des compagnies aériennes multiplient ainsi les cartes d'embarquement virtuelles: un code-barres 2D reçu par courriel et affiché sur le téléphone intelligent est scanné à l'embarquement. La deuxième compagnie japonaise en importance, ANA, offre au voyageur de compenser les émissions de carbone de son vol au moyen d'un code QR. Et le musée d'art contemporain Mattress Factory de Pittsburgh les utilise afin d'imprimer moins de brochures.

Le marketing s'est emparé - depuis longtemps au Japon - du pictogramme qui permet à l'imprimé de devenir interactif. Tourisme Montréal, Tourisme Québec et la Commission canadienne du tourisme ont ajouté cette année des codes-barres 2D à leur campagne promotionnelle à l'étranger, que ce soit dans des magazines, des abribus ou des taxis.

«C'est un outil génial pour nous, intrigant et avant-gardiste pour le client, dit le responsable de la promotion au ministère du Tourisme du Québec, Julien Cormier. Le mobinaute boucle son cycle de planification en découvrant, au moyen d'un code-barres 2D imprimé sur nos publicités, notre site internet spécialisé où il peut faire des réservations, commander des brochures ou joindre nos agents.»

Tourisme Québec pourrait d'ailleurs s'inspirer de bureaux touristiques français qui affichent un code-barres 2D sur leur devanture. De l'information est ainsi accessible même hors des heures d'ouverture.

À quand des codes-barres 2D sur le patrimoine montréalais? «Nous n'avons pas de projet précis, mais c'est très réalisable à court terme», répond Dinu Bumbaru, directeur des politiques d'Héritage Montréal qui travaille à promouvoir et à protéger le patrimoine.

Une règle d'or demeure, avertit Roger Smolski: les codes doivent toujours apporter une valeur ajoutée au mobinaute.