Faire bonne chère à l'aéroport? Voilà une idée avec laquelle on pourra bientôt se réconcilier à Montréal. Envers et contre tous les clichés, le chef Louis-François Marcotte ouvrira dès le mois prochain le premier bar à vin de l'aéroport Montréal-Trudeau. De quoi rendre l'attente entre deux vols -un peu- plus agréable et rehausser l'image de la métropole aux yeux des touristes étrangers.

La Cabine M remplacera avant Noël le restaurant Boulevard dans la zone internationale, réservée aux passagers en transit. À l'opposé des chaînes de restauration rapide qui tiennent le haut du pavé des aéroports, on y proposera un menu à déguster tranquillement, un ballon de rouge à la main, en regardant le lent ballet des avions dans le ciel.

Les habitués du Local y retrouveront la classique salade de betteraves jaunes et haricots verts du restaurant amiral de Louis-François Marcotte. Mais le reste de la carte a été simplifié pour n'y retenir qu'une douzaine de plats à mi-chemin entre l'entrée et le plat principal: salade-repas, steak frites, saumon laqué à l'érable, plateau de charcuteries et de fromages. Pas de menu du jour: travailler en zone internationale, après tous les contrôles de sécurité, impose trop de contraintes. «Si on manque de carottes, on ne peut pas s'en faire livrer aussi facilement qu'au centre-ville!» lance le chef.

Très vaste (3600 pied2), le restaurant pourra accueillir 160 personnes. Entièrement vitré, il offrira une vue dégagée sur les pistes de décollage et d'atterrissage, mais les amateurs de vin pourront aussi jeter un coup d'oeil aux bouteilles garnissant l'imposant cellier auquel on a réservé un mur entier. «La portion bar sera très importante: il faut que les voyageurs puissent s'asseoir et profiter du restaurant même s'ils sont seuls», explique Louis-François Marcotte. Deux gros lustres et une décoration dans les teintes de mauve ajouteront une petite touche baroque au décor. La cuisine sera ouverte aux regards.

Une fenêtre sur Montréal

Ce n'est pas Louis-François Marcotte qui a eu l'idée de se lancer dans cette aventure: c'est elle qui est venue à lui. Aéroports de Montréal (ADM) a bien vu que les palais des voyageurs sont de plus en plus exigeants. «Le trafic international, qui connaît une croissance importante, nous amène une clientèle plus haut de gamme, particulièrement en soirée, confirme Jean Teasdale, vice-président des services immobiliers et commerciaux d'ADM. On voulait se mettre à la page.»

L'enjeu est grand: la restauration génère 43 millions de dollars par année à Pierre-Elliott-Trudeau.

Plusieurs concepts ont donc été explorés. L'exemple de Wolfgang Puck, ce cuisinier américain renommé -et homme d'affaires- qui exploite près d'une trentaine de restaurants dans des aéroports des États-Unis et du Canada a été soigneusement étudié. Puis rejeté. «On voulait avoir un visage montréalais, une signature locale. On dit toujours que Montréal est différent du reste de l'Amérique du Nord, que c'est une capitale gastronomique: l'aéroport est une belle occasion de montrer aux visiteurs ce que la ville a à offrir», dit Jean Teasdale.

C'est pour cela que La Cabine M fera la plus belle part possible aux artisans du terroir. Les plateaux de charcuteries et de fromages devraient être entièrement garnis de produits faits au Québec.

Et c'est aussi ce qui a guidé Aéroports de Montréal dans le choix des quatre prochaines concessions alimentaires qui verront le jour dans la zone américaine. D'ici un an, on y servira du smoked-meat de chez Lester's et d'authentiques bagels du Mile End. Deux incontournables des virées gourmandes dans la métropole.

Ce n'est pas demain la veille, par contre, que les chaînes de restauration rapide seront exclues de Pierre-Elliott-Trudeau, assure Jean Teasdale. «Si on enlevait le Burger King demain matin, on aurait une levée de boucliers. Tout le monde ne rêve pas de salades fraîches et de saumon fumé!» Mais ceux qui le font auront bientôt une option de plus.