Kyoto et Osaka: deux géants urbains du Kansai, région occidentale du Japon, qui attirent des millions de visiteurs. Mais ces derniers oublient trop souvent qu'à moins d'une heure de train se nichent deux perles, plus modestes mais non moins précieuses: la ville de Nara et son voisin le mont Koya. Leur particularité? Berceaux de traditions religieuses et patrimoniales (Nara fut la toute première capitale nipponne), on y côtoie des légions de daims, des hordes de moines, et une nécropole fort mystérieuse.

JOUR 1

9 h: Des daims très mondains

Au sortir de la gare de Nara, vous accueillent un vaste parc... et ses occupants, impossibles à esquiver. Ils viennent, en groupe, encercler les touristes pour quémander un quignon à croquer: les daims sont en ville, et ils sont plus de 1000! En toute liberté, ils déambulent sur les sentiers et les routes, entre les arbres ou les autos. Considérés comme sacrés, ils seraient les colporteurs de messages divins. Mais pour nos yeux d'étrangers, l'unique message qu'ils énoncent semble être: «Donnez-nous à manger!» Pendant des heures, on caresse et nourrit les bêtes, avec prudence: sous leur air candide, certaines sont devenues tellement accros aux offrandes qu'elles attaquent les bienfaiteurs dont les réserves sont épuisées!

10 h: Todai-ji, le géant de bois

Toujours sous l'oeil intéressé des daims, notre chemin passe devant une magnifique pagode à cinq étages, puis rejoint l'allée du temple Todai-ji, qui n'est rien de moins que le plus grand bâtiment en bois dans le monde. Initialement érigée au VIIIe siècle, reconstruite à plusieurs reprises, sa structure imposante abrite un autre type de colosse: la plus grande statue en bronze du monde, un bouddha de 15 m de haut (50 pieds). Ça fait méditer!

11 h: Sculpter sa culture

Une petite pause culturelle s'impose au Musée national de Nara, où la sculpture est à l'honneur. Des statues de divinités, de toutes matières et de toutes époques permettent d'apprécier l'incroyable maîtrise de cet art par les Nippons.

Midi: «Okonomiyaki!»

Sustenter les daims, c'est bien; mais il faut se restaurer soi-même. Et succomber à l'une des spécialités du Kansai, les okonomiyakis. À mi-chemin entre la crêpe et l'omelette, cuits sur plaque telle une pizza, ils peuvent être garnis de boeuf, de poulpe, de crevettes, etc.

14 h: Éclairez votre lanterne

Au Japon, bouddhisme et shintoïsme se côtoient intimement. Exemple éclairant: à deux pas du Todai-ji, est implanté le sanctuaire shinto de Kasuga Taisha, paré d'un impressionnant chapelet de 3000 lanternes. Certaines d'entre elles sont logées dans des réceptacles de pierre, le long du chemin, ce qui ouvre une voie de toute beauté vers l'édifice. Elles ne sont allumées que deux fois l'an, en février et en août; mais même lorsqu'elles sont éteintes, le spectacle enflamme le regard.

15 h: Purement japonais

À ce stade, deux options se présentent à vous: la visite du Kofuku-ji ou celle du Horyu-ji. Le premier, temple datant de 710, présente la caractéristique rare de ne jamais avoir subi d'influence chinoise dans son architecture. Le second, plus ancien bâtiment en bois au monde, à une dizaine de minutes de train de Nara, fut le tout premier site japonais classé à l'UNESCO. Majestueux!

18 h: Soupe au lait

Ne passez pas à côté de l'Asuka Nabe, spécialité culinaire locale. Cette délicieuse soupe est composée de poulet, d'épinards, de choux, de shiitakes et d'une bonne rasade de lait. Itadakimasu! (Bon appétit!)

20 h: Un tatami pour la nuit

En tant que ville de traditions, Nara est parée de très nombreux ryokans, des auberges nippones typiques où vos hôtes vous traitent aux petits oignons. L'occasion de tester futons et tatamis, que l'on trouve en ville à tous les prix.

JOUR 2

8 h: Vers le mont Koya

Le lendemain, il faut se lever avec les poules pour entamer son pèlerinage vers le mont Koya, village monastique au sud de Nara. Train, bus et funiculaire nous amènent au sommet d'une montagne sacrée, lieu d'implantation du bouddhisme au Japon, où un millier de moines aiguisent leur foi depuis des siècles. Dès les premiers pas dans le village, on ne voit que robes traditionnelles et crânes rasés! À noter que les moines ne désirent pas être photographiés - et le rappellent très poliment aux frénétiques du clic.

10 h: Nature morte

C'est à la lisière du village, au coeur d'une forêt de cèdres géants, que se trouve Okuno-in, un cimetière parmi les plus étonnants. Le long d'une voie pavée de plusieurs kilomètres, on tombe sous le charme de 200 000 tombes, lesquelles n'ont rien de sordide: recouvertes de mousse verdoyante, ornées de statuettes mystérieuses, elles semblent en parfaite harmonie avec la nature. On se croirait même dans l'ambiance merveilleuse d'un film de Miyazaki! Côte à côte, les stèles dédiées à d'illustres samouraïs voisinent celles de parfaits inconnus ou d'hommes d'affaires. En revanche, les maringouins, eux, sont bien vivants... Au terme de l'escapade, se dressent une surprenante pyramide de statuettes ainsi qu'un temple de recueillement, fort étrange...

14 h: Orange orange

De retour au village, un haut lieu du bouddhisme difficile à rater: le site de Kondo, très clinquant avec sa massive pagode de 50 m de haut, arborant un orange éclatant. Les décorations intérieures sont également remarquables, composées de mantras, de peintures d'une grande finesse, et d'une armada de bouddhas habilement ciselés.

16h: Sa sainteté le thé

Tous les moines vous le confirmeront: le thé apaise l'âme. Et ce serait une hérésie que de ne pas s'asseoir à l'une des tables de la rue principale Odawara, le temps d'un sencha ou d'un matcha (thé vert réduit en poudre).

18 h: Bercé dans les bras du Bouddha

Au mont Koya, point d'hôtels, ni de ryokans. En fait, la seule solution reste de souper et dormir dans un temple en compagnie des moines. Selon le lieu, le confort peut être rudimentaire, mais l'ambiance ésotérique fait de cette nuit une expérience mémorable. Peut-être aurez-vous, au gré d'un songe, une révélation mystique délivrée par un moine... ou un daim?