(Montréal) L’organisme de réglementation des transports du Canada a renforcé sa charte des droits des passagers en imposant des règles plus strictes concernant le remboursement par les compagnies aériennes.

L’Office des transports du Canada a indiqué mercredi que les nouveaux règlements, qui seront en vigueur à compter du 8 septembre, obligeront les transporteurs à rembourser les passagers ou à leur offrir une nouvelle réservation, au choix du voyageur, si un vol est annulé ou considérablement retardé.

Jusqu’à maintenant, le Règlement sur la protection des passagers aériens n’exigeait des remboursements que pour les perturbations de vol qui étaient attribuables à la compagnie aérienne, ce qui excluait les situations allant des tempêtes aux problèmes mécaniques imprévus.

« Ce règlement permettra de combler la lacune du régime canadien de protection des passagers aériens mise en évidence par la pandémie de COVID-19 et de s’assurer que même en cas d’annulations et de retards prolongés attribuables à des situations indépendantes de la volonté de la compagnie aérienne, les passagers seront protégés si la compagnie aérienne ne peut faire en sorte qu’ils complètent l’itinéraire prévu dans un délai raisonnable », a affirmé la présidente de l’agence, France Pégeot, dans un communiqué.

Des milliers de Canadiens sont confrontés ces jours-ci à une multitude de longs retards et d’annulations de vols, alors que les compagnies aériennes et les agences de sécurité et de douane ont du mal à gérer une pénurie de personnel au milieu de la récente vague de voyages, un problème qui devrait se poursuivre pendant une grande partie des deux prochains mois. Les nouvelles règles ne protégeront cependant pas les voyageurs d’été, puisqu’elles n’entrent en vigueur qu’à l’automne.

La réglementation obligera les compagnies aériennes à proposer une nouvelle réservation ou un remboursement dans les 30 jours si elles ne peuvent pas fournir une nouvelle réservation dans les 48 heures suivant une annulation de vol ou un « long retard ».

Toute portion inutilisée du billet doit être remboursée, y compris « tout service additionnel acheté, mais non utilisé », a précisé l’OTC. Et le mode de remboursement doit être identique à celui du paiement initial. Cela signifie qu’un achat par carte de crédit ne pourrait pas être remboursé en espèces — ou par bon de voyage, comme la plupart des compagnies aériennes canadiennes l’ont fait pendant près d’un an à partir de mars 2020, alors que la pandémie forçait l’annulation de centaines de milliers de vols.

Les lignes aériennes contestent le règlement

Malgré leur resserrement, les nouvelles règles ne vont pas assez loin pour certains. Gabor Lukacs, président du groupe Droits des voyageurs, a qualifié le nouveau cadre d’« imposture ».

Selon M. Lukacs, exiger un remboursement ou une nouvelle réservation uniquement si la compagnie aérienne ne peut pas garantir un autre siège dans un avion qui part dans les deux jours suivant l’heure de départ initiale ne répond pas aux besoins des voyageurs.

« Que vous voyagiez pour un week-end, des vacances ou pour affaires, voyager 48 heures plus tard va à l’encontre du but de votre voyage », a-t-il fait valoir dans un courriel.

« Le Canada est le seul pays occidental où les compagnies aériennes peuvent conserver l’argent des passagers pour les vols annulés. Les États-Unis, l’Union européenne, Israël ou même la Turquie ont des règles claires selon lesquelles lorsqu’un vol est annulé pour une raison quelconque, le passager doit être remboursé — même si la compagnie aérienne peut proposer une alternative quelques heures plus tard. »

Les lignes aériennes soutiennent pour leur part que le Règlement sur la protection des passagers aériens, entré en vigueur en 2019, va déjà trop loin.

Les transporteurs canadiens ont demandé en avril à un comité de la Cour d’appel fédérale d’annuler les règles qui renforcent l’indemnisation des passagers victimes de vols retardés et de bagages endommagés.

Air Canada et Porter Airlines, ainsi que 16 autres appelants, dont l’Association du transport aérien international — l’IATA compte environ 290 compagnies aériennes membres —, ont affirmé que la charte des droits des passagers violait les normes mondiales et devrait être invalidée pour les vols internationaux.

Lancée en 2019, l’action en justice fait valoir que le régime outrepasse les pouvoirs de l’Office des transports du Canada. Il contreviendrait également à la Convention de Montréal, un traité multilatéral, en imposant des exigences d’indemnisation plus lourdes en cas d’annulation de vol ou de perte de bagages.

Ottawa soutient qu’il n’y a pas de conflit entre les règles sur la protection des passagers et la Convention de Montréal.

En vertu des règles fédérales mises en place il y a trois ans, les passagers doivent être indemnisés jusqu’à 2400 $ s’ils se sont vu refuser l’embarquement parce qu’un voyage a été surréservé, et recevoir jusqu’à 2100 $ pour les bagages perdus ou endommagés. Les retards et autres paiements pour les vols annulés justifient une indemnisation pouvant aller jusqu’à 1000 $.

Le problème s’est retrouvé à l’avant-scène après un incident survenu en 2017, au cours duquel deux avions d’Air Transat à destination de Montréal ont été détournés vers Ottawa en raison des mauvaises conditions météorologiques et ont été retenus sur le tarmac jusqu’à six heures, ce qui a amené certains passagers à appeler le 911 pour être secourus.

La question a pris une nouvelle importance pour des milliers de Canadiens à partir de mars 2020, alors que la pandémie de COVID-19, les restrictions de voyage et les fermetures de frontières ont entraîné des annulations massives de vols et ont cloué au sol les flottes des lignes aériennes.