L’industrie touristique québécoise devra se plier à de nouvelles normes en matière de sécurité.

Dans la foulée de la tragédie de Saint-Henri-de-Taillon, au Lac-Saint-Jean, la ministre du Tourisme, Caroline Proulx, a décidé de devancer l’annonce des intentions gouvernementales visant à mieux encadrer l’industrie.

« À la lumière de l’accident de mardi, nous nous sommes entendus sur le fait qu’il fallait agir maintenant et sans attendre », a-t-elle déclaré en conférence de presse, jeudi, à Laval.

L’un des éléments-clés de l’annonce touche d’ailleurs les motoneiges et les autres véhicules hors route : Québec entend imposer une formation obligatoire pour tous les guides en véhicules hors route ainsi que pour les touristes voulant louer un véhicule hors route. Bien qu’elle planchait sur l’idée de l’encadrement depuis environ un an, la ministre Proulx a précisé que dans le cas des formations obligatoires pour guides et touristes, la mesure annoncée émane directement des événements des dernières heures et de ses discussions avec son collègue aux Transports, François Bonnardel.

« On a un souhait, une volonté d’entrer rapidement dans l’étude de la formation qui pourrait être donnée. Je crois qu’on n’a pas de temps à perdre. Il faut agir rapidement, il faut agir de façon responsable aussi […], mais c’est une décision du gouvernement qu’on a prise hier, d’avoir cette formation obligatoire. »

Accréditation pas obligatoire, mais…

Par ailleurs, dès maintenant, les entreprises de tourisme de nature et d’aventure auront tout avantage à obtenir l’accréditation Qualité sécurité qui est offerte par Aventure Écotourisme Québec. Bien que cette accréditation ne soit pas obligatoire, les entreprises devront y penser à deux fois avant de l’ignorer, la ministre ayant décidé de ne pas lésiner sur la notion d’incitatif.

« C’est une mesure incitative qu’on leur présente aujourd’hui. Ce qu’on leur dit, c’est que si vous n’avez pas l’accréditation, le ministère du Tourisme du Québec ne vous donnera pas de subventions », a-t-elle dit.

Le programme Qualité Sécurité comprend une soixantaine de normes à respecter et des formations techniques pour les guides. Il s’accompagne d’un programme d’inspections surprises et de visites mystères d’entreprises à la suite de plaintes.

Pas moins de 135 entreprises de tourisme nature et aventure détiennent présentement cette accréditation, mais « à terme, ce que nous souhaitons […], c’est que des centaines d’entreprises non membres détiennent aussi cette certification », a-t-elle déclaré.

Caroline Proulx a du même coup annoncé une aide immédiate de 200 000 $ à l’association Aventure Écotourisme Québec pour qu’elle puisse répondre avec célérité aux nouvelles demandes d’accréditation Qualité Sécurité qui risquent de se multiplier très rapidement. Une période de transition est également prévue pour ne pas priver les entreprises d’argent public si elles ne sont pas accréditées, mais qu’elles sont en mesure de démontrer qu’elles ont fait une demande pour l’être.

« Faux sentiment de sécurité »

Ce programme a été créé dans la foulée des recommandations de la coroner Andrée Kronstrom, qui avait enquêté sur le décès du neveu de la plongeuse Sylvie Bernier, Raphaël Bernier, survenu en 2002 lors d’une expédition en canot sur la rivière Nouvelle en Gaspésie.

La coroner avait notamment conclu que le guide qui prenait place à bord de l’embarcation n’avait pas la formation requise pour venir en aide au jeune garçon de 5 ans, qui était demeuré coincé sous le canot renversé durant plus de 30 minutes sous les yeux horrifiés de ses parents et de sa tante, impuissants à lui venir en aide.

Caroline Proulx a tenu a souligner le travail de la médaillée olympique, qui était présente à l’annonce.

« Sylvie a trouvé, au cœur de sa peine, le courage de militer pour de meilleures mesures de sécurité dans la pratique des sports d’aventure et de plein air », a-t-elle affirmé.

Sylvie Bernier, pour sa part, a déclaré que « le faux sentiment de sécurité que nous avons vécu, il ne faut pas que personne ne le vive au Québec. Il faut qu’on ait vraiment le sentiment que, lorsqu’on va faire une activité de tourisme de plein air, que nous puissions la vivre dans la joie et dans le bonheur […] et qu’en même temps il y ait l’aspect indissociable de la sécurité. »

Cinq touristes français manquent toujours à l’appel depuis la tragédie de mardi soir dernier au Lac-Saint-Jean, où un groupe de neuf motoneigistes — huit touristes français et leur guide québécois — se sont retrouvés dans un secteur extrêmement dangereux à l’embouchure de la rivière La Grande Décharge. Trois des touristes ont réussi à éviter le pire, mais le guide, Benoît L’Espérance, 42 ans de Montréal, est décédé et l’on craint le pire pour les cinq disparus.