Le numéro un mondial des téléphones mobiles, le finlandais Nokia, se trouve actuellement sur «une plate-forme en feu» encerclée par un «violent incendie», avertit son nouveau PDG Stephen Elop dans un courriel aux employés dont l'AFP a eu copie mercredi.

Prévenant les 130 000 salariés du groupe de «l'énorme effort» à accomplir «pour transformer l'entreprise», le dirigeant ne prend pas de pincettes pour décrire la situation.

«Nokia, notre plate-forme est en feu», écrit M. Elop, qui est depuis fin septembre le premier étranger à diriger le géant finlandais, dans un courriel simplement signé «Stephen».

Une source proche du groupe a confirmé à l'AFP l'authenticité du message, précisant qu'il a été envoyé à un nombre inconnu de destinataires la semaine dernière.

Stephen Elop, Canadien transfuge de Microsoft, doit dévoiler vendredi la nouvelle stratégie de Nokia, qui va de déboires en déconvenues depuis plus de deux ans en raison de la percée de l'iPhone de l'américain Apple et des téléphones multifonctions pilotés par le système d'exploitation Android de Google.

«Au cours des derniers mois, j'ai partagé avec vous ce que j'ai entendu de nos actionnaires, de nos opérateurs, de nos développeurs, de nos fournisseurs et de vous-mêmes», écrit dans son courriel aux employés celui qui est surnommé «Le Général».

«Aujourd'hui, je vais partager ce que j'ai appris et ce en quoi je crois», dit-il.

«J'ai appris que nous sommes sur une plate-forme en feu», lance-t-il, comparant Nokia à un employé de plate-forme ayant le choix entre une mort certaine dans l'incendie ou un saut périlleux mais salutaire dans les eaux glacées.

«Et il y a plus d'une explosion: il y a de nombreux points brûlants qui alimentent un violent incendie autour de nous», écrit le patron dans un style très opposé aux déclarations publiques habituelles, avant de dresser un long tableau dramatique de la situation du leader mondial du secteur.

Il énumère: «Pression intense des concurrents», notamment Apple qui a «bouleversé le marché». Android de Google, qui est devenu «une force de gravité» du secteur des téléphones mobiles. «Perte de parts de marché» également dans le bas de gamme sous la pression des Chinois.

Le système d'exploitation de Nokia, Symbian, est «non compétitif» sur les marchés développés; les nouveaux produits du finlandais comme le système d'exploitation MeeGo «n'arrivent pas assez vite sur les marchés», assène-t-il.

«Comment en est-on arrivé là? Comment nous sommes nous retrouvés à la traîne quand le monde autour de nous a évolué?», s'interroge M. Elop, connu pour parfois brusquer les très réservés Finlandais avec ses déclarations directes.

«Nous avons mis de l'huile sur notre propre plate-forme en feu», dit-il, et «manqué de responsabilité et de leadership».

«Nous avons eu une série d'échecs. Nous n'avons pas livré d'innovations à temps. Nous n'avons pas collaboré en interne», reproche le Canadien.

Selon l'hebdomadaire économique allemand WirtschaftsWoche, Stephen Elop pourrait débarquer la moitié de la direction du groupe lors de l'annonce de sa nouvelle stratégie vendredi lors d'une journée d'investisseurs à Londres.

Les analystes interrogés ces derniers jours par l'AFP réclament «un nouveau cap», notamment sur le juteux créneau des smartphones où le finlandais est en déroute, ou sur l'Amérique du Nord, où Nokia, bien que numéro un mondial depuis 1998, ne s'est jamais imposé.

Selon une étude du cabinet de référence Gartner publiée mercredi, la part de marché de Nokia en 2010 a chuté à 28,9% contre 36,4% en 2009, même si le finlandais reste numéro un mondial devant Samsung (17,6%), LG (7,1%), RIM (3,0%) et Apple (2,9%).