La Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) a mis en demeure vendredi Google de procéder aux «déréférencements» de liens internet sur «toutes les extensions» du moteur de recherche, y compris google.com, quand des internautes le lui demandent au nom du droit à l'oubli.

En mai 2014, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) avait consacré ce droit à l'oubli numérique, c'est-à-dire le droit de faire supprimer des moteurs de recherche les liens vers des pages comportant des informations personnelles, notamment si elles sont périmées ou inexactes.

Concrètement, «toute personne qui souhaite voir effacer un ou plusieurs résultats apparaissant sous une requête à partir de son nom peut en faire la demande au moteur de recherche», rappelle l'autorité de contrôle de protection des données.

Mais «la CNIL a été saisie de plusieurs centaines de demandes de particuliers s'étant vu refuser le déréférencement de liens Internet (ou adresses URL) par Google».

Car un an après l'arrêt de la cour de Justice de l'UE, le géant américain d'internet «a donné suite à de nombreuses demandes de déréférencement, mais seulement sur les extensions européennes du moteur de recherche», telles que google.fr, déplore la CNIL.

La présidente de la CNIL, Isabelle Falque-Pierrotin, demande donc «qu'il soit procédé, dans un délai de 15 jours, au déréférencement des demandes favorablement accueillies sur l'ensemble du traitement et donc sur toutes les extensions du moteur de recherche» (.fr, .uk, .com, etc.).

La CNIL rappelle cependant que «cette mise en demeure n'est pas une sanction». Mais si Google ne s'y conformait pas, la Commission pourrait décider de «sanctionner les manquements à la loi Informatique et libertés».

«Google va se battre»

Interrogé par l'AFP, Google estime pour sa part tenter «de trouver le bon équilibre dans l'application de l'arrêt de la CJUE en travaillant étroitement avec les autorités de protection de données».

«L'arrêt visait des services à destination des utilisateurs européens, ce qui est l'approche que nous avons retenue pour nous mettre en conformité avec celui-ci», a précisé le groupe.

Pour la Quadrature du Net, opposée à la décision de la CJUE qui, selon l'association, place Google en «juge de paix», la mise en demeure du géant américain par la CNIL «entérine totalement ce système de contrôle par Google».

«Nous sommes assez déçus que la CNIL ait embrayé sur cet arrêt plutôt que de pousser à un retravail en profondeur sur la question», a ajouté l'association.

Le président de l'agence d'«e-réputation» (gestion de la réputation sur internet) ReputationVIP, Bertrand Girin, a assuré à l'inverse soutenir «la CNIL dans sa démarche».

«Aujourd'hui, il suffit d'utiliser une version non européenne du moteur pour trouver les informations désindexées, la protection des internautes n'est donc absolument pas assurée», a-t-il déploré dans un communiqué.

Le patron de ReputationVIP n'est cependant pas certain que Google appliquera la décision de la CNIL. Ce n'est «pas dans son intérêt», assure M. Girin. «Google va se battre pour préserver ses moteurs internationaux du droit à l'oubli européen».

En décembre 2014, Google avait été condamné pour la première fois par une juridiction française pour avoir refusé une demande de droit à l'oubli numérique.