La volonté des écoles d'utiliser la tablette numérique en classe se bute à plusieurs obstacles.

Les manuels scolaires en format numérique sont rarissimes, tout comme les applications en français.

Quelques collèges privés ont choisi de doter tous les élèves d'une tablette numérique.

Des commissions scolaires ont emboîté le pas avec des projets-pilotes, mais on est encore loin d'une révolution dans le sac à dos des élèves.

«À la rentrée de septembre, aucun collège n'aura seulement que du matériel numérique. Il y aura encore des manuels scolaires imprimés», soutient d'ailleurs le président et directeur général de Chenelière Éducation, Jacques Rochefort.Il rappelle qu'une minorité d'écoles ont opté pour l'iPad en classe.

«C'est un phénomène encore rare.»Pour que la tablette offre réellement des avantages, le manuel numérique doit proposer de l'interaction sous forme de vidéos, de cartes ou de graphiques. Ces éléments coûtent cher et prennent du temps à produire, précise M. Rochefort.

La production de matériel scolaire nécessite près de deux ans de travail actuellement.Les contraintes sont nombreuses.

«Nous devons obtenir l'approbation du ministère de l'Éducation. Nous avons l'obligation de rigueur et d'exactitude du contenu», indique l'éditeur.

Des questions sans réponsesLes discussions avec le ministère de l'Éducation avancent peu concernant le virage numérique dans les écoles, explique Jean Bouchard, vice-président Édition scolaire scientifique et technique de l'Association nationale des éditeurs de livres, également directeur général du Groupe modulo. 

«Toute l'année, les questions des éditeurs sont restées sans réponses. On leur demandait quels sont les critères pour définir les ressources pédagogiques numériques, quels sont les critères d'approbation», affirme M. Bouchard.

Des informations qu'il a été impossible de corroborer auprès du Ministère qui n'a pas donné suite à nos questions.

Déjà, les éditeurs doivent produire du matériel numérique adapté aux tableaux blancs interactifs, que le gouvernement Charest souhaite implanter dans toutes les classes d'ici 2016.

En parallèle, ils développent aussi des manuels scolaires numériques pour répondre à la demande des écoles qui veulent se tourner vers les tablettes.Ce développement est coûteux, affirme aussi M. Bouchard.

«On ne voit pas à l'horizon un budget du ministère de l'Éducation pour cela.»

Dans le milieu de l'éducation, plusieurs croient pourtant que l'un des avantages du numérique est qu'il sera moins dispendieux de modifier une information que de réimprimer la totalité d'un manuel scolaire. 

Encore faut-il préciser à quelle fréquence les manuels numériques seront mis à jour. Les données changent vite dans le contexte mondial actuel, cite en exemple M. Bouchard.

Des choix à faire

Le virage numérique est l'occasion de mener une réflexion sur les façons de faire, affirme pour sa part Vincent Tanguay, vice-président affaires et innovation au CEFRIO, un centre facilitant la recherche et l'innovation dans les organisations à l'aide des technologies de l'information et de la communication.

L'enjeu repose sur le matériel produit par les enseignants, dit-il.

Le contenu qu'ils ont développé sous forme d'applications pourrait prendre plus de place, au lieu de se limiter à des manuels scolaires achetés pour plusieurs années.

«Si on ne fait pas le virage d'ici un an ou deux, on va rester prisonnier», affirme M. Tanguay.

«Tout le matériel est conçu pour toute l'année scolaire. L'enseignant doit avoir la liberté de choisir en fonction de ce qu'il veut faire», précise-t-il.Les enseignants et les élèves eux-mêmes pourraient éventuellement concevoir des applications.

«On est en train d'élaborer un cours pour les élèves de 5e secondaire qui pourront développer des applications», explique ainsi le directeur général de la Commission scolaire Sorel-Tracy, Alain Laberge, où tous les élèves de la 4e année à la 5e secondaire pourraient travailler sur un iPad d'ici quatre ans.