L'affaire fera sûrement saliver quelques entrepreneurs technos québécois. Taleo, entreprise fondée par deux gars de Québec dans les années 90, a été vendue hier au géant du logiciel Oracle pour 1,9 milliard US. Oracle allongera 46$US pour chacune des actions de Taleo, qui s'échangent au NASDAQ. L'action de Taleo a grimpé de 17,2% hier pour clôturer tout près du prix d'acquisition, à 45,64$.

Ni Oracle ni Taleo n'a voulu commenter la transaction hier. Notons cependant que l'offre, loin d'être hostile, a reçu l'aval du conseil d'administration de Taleo.

Fondée à Québec par Martin Ouellet et Louis Têtu à la fin des années 90, Taleo conçoit des logiciels pour recruter, conserver et motiver les employés. La boîte a multiplié les acquisitions au fil des années et compte aujourd'hui 1500 employés. Avec des bureaux aux États-Unis, en Europe et en Australie, l'entreprise a enregistré un chiffre d'affaires de 237 millions US l'an dernier.

Au moment de son inscription en Bourse, en 2005, Taleo avait déplacé son siège social de Québec à San Francisco. L'entreprise a toutefois conservé son centre de recherche et développement dans la Vieille Capitale, qui emploie aujourd'hui 330 personnes.

Celui-ci restera-t-il? Faut-il s'attendre à des licenciements? Le président de Taleo, Michael Gregoire, restera-t-il au sein de l'entreprise?

Chez Taleo et Oracle, c'était silence radio, hier.

Louis Têtu, l'un des deux cofondateurs et toujours actionnaire de Taleo, se réjouit en tout cas de la transaction.

«C'est une belle concrétisation de la valeur qu'on peut créer, ici, au Québec», a commenté à La Presse Affaires cet entrepreneur en série, qui a quitté Taleo depuis pour prendre les rênes d'une autre entreprise techno de Québec, Coveo.

«C'est aussi une bonne nouvelle dans le sens où Oracle est un acteur important en pleine croissance qui investit beaucoup et qui aura maintenant pignon sur rue à Québec», a continué M. Têtu.

Selon lui, il ne faut pas déplorer la perte de ce qui fut auparavant un fleuron québécois à des intérêts étrangers.

«C'est ça qui fait tourner la roue. Si on peut créer de la valeur, monétiser nos investissements et réinvestir cet argent pour créer encore plus d'emplois localement, il me semble que c'est positif.»

La guerre des nuages

Taleo fait dans le créneau en plein essor de l'informatique en nuage, ce qui signifie que ses clients ne font pas rouler les logiciels chez eux, mais sur des serveurs informatiques distants.

Cette industrie est en pleine ébullition, et la transaction d'hier s'inscrit dans une guerre que se livrent les grands fabricants de logiciels de la planète pour la contrôler.

En achetant Taleo, Oracle semble ainsi répliquer à son concurrent allemand SAP, qui a annoncé en décembre dernier son intention d'acheter le fabricant de logiciels de ressources humaines SuccessFactors pour 3,4 milliards US.

Le projet d'acquisition devra être approuvé par les actionnaires de Taleo et les autorités réglementaires. Les deux entreprises espèrent conclure la transaction au milieu de cette année.