Les Thaïlandais désemparés par une communication officielle parfois confuse sur les inondations historiques qui les frappent se sont tournés vers les réseaux sociaux, mais ce flot ininterrompu d'informations non vérifiées n'est pas forcément la panacée.

Photos de rues noyées sur Facebook, mises en garde contre les serpents sur Twitter, vidéos de conseils sur YouTube: l'internet fourmille depuis des semaines de détails en temps réel, prenant le relais de médias traditionnels et d'autorités qui peinent à satisfaire une population qui veut connaître les risques qu'elle encoure, minute par minute.

«En ce moment, le gouvernement ne répond pas aux demandes d'informations que le public réclame», estime ainsi Somkiat Onwimon, ancien sénateur et présentateur du journal télévisé, suivi par plus de 68.000 personnes sur Twitter.

«L'internet dans son ensemble a été important pendant les inondations, avec beaucoup de sites d'informations enregistrant une fréquentation sans précédent et des blogues racontant des histoires personnelles de fuite devant l'eau qui monte», renchérit Jon Russell, spécialiste des réseaux sociaux.

Depuis le début de cette catastrophe qui a tué plus de 500 personnes en trois mois, les Thaïlandais sont confrontés à des déclarations contradictoires des autorités locales et nationales, sur les zones les plus à risque ou les précautions à prendre.

Mais si les sites appelant à donner du sang ou prévenant de la présence d'un crocodile échappé peuvent avoir leur utilité, les experts mettent en garde contre le danger d'ajouter à la confusion.

«Les réseaux sociaux peuvent être aussi trompeurs qu'utiles», souligne Russell.

C'est bien «d'obtenir des mises à jour de la part de journalistes et de civils sur place», mais «il n'y a pas de validation de l'information et des déclarations trompeuses peuvent être diffusées comme des faits très facilement».

Mais malgré la présence de certains «journalistes citoyens non professionnels», les avantages des réseaux sociaux dépassent largement les inconvénients lors d'une telle crise, assure Somkiat.

«Vous avez du négatif et du positif, mais pour les inondations, le gouvernement n'a pas fourni assez d'informations».

Le nombre d'utilisateurs de Twitter en Thaïlande est passé de 600.000 en septembre à 720.000 en octobre, selon McFiva, qui détient les droits publicitaires du site dans le pays.

Une hausse de 20% directement liée aux inondations, selon son directeur général Supachai Parchariyanon.

«Avant les inondations, il y avait moins de 5% d'augmentation par mois», précise-t-il, notant que Thaiflood (inondations en Thaïlande) est actuellement le premier mot clé dans le royaume.

Alors que les gigantesques masses d'eau venues du nord après une mousson particulièrement abondante sont entrées dans le nord et l'ouest de Bangkok et menacent son centre-ville, bkkflood gagne désormais en popularité.

Les utilisateurs de Facebook sont eux passés d'un peu plus de 7 millions au début de l'année à 12 millions, soit 18% de la population, selon Socialbakers, qui compile les données sur le site.

Et YouTube n'est pas en reste. Un dessin animé de réalisateurs indépendants, comparant la masse d'eau à 50 millions de baleines bleues déferlant sur la capitale, a été vu 870.000 fois ces deux dernières semaines.

«Roo Su Flood» (Comprenez, combattez les inondations) propose également d'autres épisodes donnant des conseils pratiques pour se préparer au pire.

La classe politique a essayé de garder le rythme. La première ministre Yingluck Shinawatra et son équipe ont utilisé Facebook pour garder le contact avec la population, postant chaque jour comptes-rendus et photos de ces visites aux sinistrés.

Mais pour Somkiat, les réseaux sociaux remplissent surtout leur rôle lorsqu'ils fournissent des détails, comme la hauteur de l'eau dans le canal près de chez vous.

«Tout ce que nous voulons, ce sont des informations sur notre quartier et sur ce qui va arriver».