L'équipementier télécoms Motorola repart dimanche du salon de l'électronique (CES) de Las Vegas avec trois trophées rendant hommage à la qualité de ses nouveaux appareils, tablette et téléphone, et consacrant la renaissance d'un pionnier déchu.

«Motorola a retrouvé son jeu», avait admiré l'analyste Ehud Geldblum chez Morgan Stanley, dès la présentation mercredi de ces appareils.

Couronnée meilleure nouveauté du salon, la future tablette Xoom (prononcé zoom), a été décrite par plusieurs observateurs comme le concurrent le plus prometteur de l'iPad d'Apple.

Le téléphone Atrix a séduit quand à lui le jury réuni par le site d'informations spécialisées Cnet avec la possibilité de le relier à divers appareils, pour en faire soit un boîtier multimédia, soit pratiquement un ordinateur portable classique.

Ces deux appareils ont été présentés alors que le nouveau Motorola Mobility débutait son existence indépendante en Bourse, distincte des équipements professionnels désormais rassemblés sous le nom Motorola Solutions. Entre mardi matin et vendredi soir, l'action Motorola Mobility a pris 2,5%, à 33,06 dollars, les investisseurs restant attentistes.

De fait, Motorola aura tout connu avec les téléphones portables: il a déposé les premiers brevets de la téléphonie mobile dès les années 1970, a longtemps été leader, puis faute d'avoir pris le tournant des «smartphones», il a failli sombrer.

En 2008, le groupe avait prévu de se scinder: d'un côté les équipements professionnels (infrastructure de réseaux, terminaux mobiles pour services de sécurité, lecteurs de codes-barres...), une activité saine et régulière, et de l'autre les téléphones portables, en difficultés faute d'avoir su se renouveler.

Six mois plus tard, ces plans avaient dû être reportés sine die: en chute libre, les téléphones étaient incapables de survivre seuls.

Aujourd'hui, la scission est réalisée, l'activité téléphones a enregistré plusieurs trimestres bénéficiaires, et surtout Motorola a restauré son image de marque novatrice.

«Je ne crois pas que qui que ce soit en arrivant au CES avait prédit le succès qu'il aurait», note William Stofega, spécialiste des appareils portables au cabinet de marketing IDC.

«Beaucoup avaient déjà écrit sa nécrologie» à l'époque des pertes sans fin, a rappelé M. Stofega dans un entretien à l'AFP, mais paradoxalement, «cela leur a donné le temps de changer».

Embauché pour piloter la scission à l'été 2008, le patron des téléphones portables Sanjay Jha a imprimé une direction claire:

1) se concentrer sur les téléphones multifonctions, principal vecteur de croissance du secteur depuis l'iPhone.

2) arrêter de se disperser sur de multiples systèmes d'exploitation, pour miser principalement sur le système Android, alors tout juste lancé par Google.

«Notre partenariat avec Google a été très intense et a débouché sur de la formidable technologie», a déclaré samedi un des responsables de Motorola Mobility, Alain Mutricy, en recevant ses trophées. «Nous avons pris de grands risques, et cela a payé», s'est aussi réjoui un ingénieur informaticien du groupe, Seang Chau.

Le succès est d'autant plus remarquable, note M. Stofega, que Motorola «a réussi son retour dans un des marchés les plus difficiles et concurrentiels» de la high tech, «et durant l'une des pires récessions économiques».

Pour autant, le succès reste à consolider. M. Jha a déjà prévenu le mois dernier que les téléphones portables perdraient de l'argent au premier trimestre.

Dans les milieux financiers, on reste prudent.

«Le buzz créé par le Xoom donne un coup de pouce à court terme, mais nous sommes inquiets de la perte de part de marché (chez l'opérateur américain) Verizon», qui devrait prochainement distribuer l'iPhone, a ainsi noté l'analyste Peter Mizek, dans une note de la maison de courtage Jefferies.