En rachetant BellSouth, ATT va renforcer sa position de géant des télécoms et d'opérateur de nouvelle génération rivalisant directement avec les câblo-opérateurs, présents dans la télévision jusqu'à l'internet à très haut débit.

En rachetant BellSouth, ATT va renforcer sa position de géant des télécoms et d'opérateur de nouvelle génération rivalisant directement avec les câblo-opérateurs, présents dans la télévision jusqu'à l'internet à très haut débit.

Si le rapprochement entre ATT et BellSouth vient s'ajouter aux opérations finalisées ces derniers mois -fusions Verizon-MCI et ATT-SBC-, la rapidité de l'annonce en a surpris plus d'un.

«Le rachat de l'ancien ATT par SBC (la nouvelle entité a gardé le nom de ATT, ndlr) vient à peine d'être finalisé en novembre qu'ils se lancent déjà dans une nouvelle acquisition», commentait lundi Carmi Levy, de Infotech Research.

«La consolidation et l'intégration restent les thèmes centraux du secteur des télécoms pour l'année 2006», estimait pour sa part un analyste de Briefing.com dans une note, en faisant à la fois part de sa surprise et saluant une opération «positive financièrement et bonne pour l'actionnaire».

Du côté d'ATT et BellSouth, c'est un sentiment d'urgence qui a été exprimé. «Cette opération est critique alors que toute l'industrie se dirige vers la convergence des trois écrans qu'utilisent la plupart des consommateurs aujourd'hui: la télévision, l'ordinateur, et un appareil mobile».

Ces derniers veulent «unifier les réseaux de Cingular (téléphonie mobile, ndlr), de BellSouth et d'ATT pour offrir un seul réseau intégré, fixe et mobile, basé sur le protocole internet IP».

L'usage de ce protocole permettra de mettre au point une offre dite «triple pay» comprenant téléphonie sur internet -dite voix sur IP, en train de supplanter la ligne téléphonique classique-, internet haut débit ADSL et de la télévision sur internet, dite IPTV.

L'IPTV est considérée comme le prochain service populaire, après la voix sur IP.

Grâce à cette télévision de nouvelle génération, l'idée est de rivaliser avec le câble. Les câblo-opérateurs tels Comcast et Time Warner Cable dominent le marché de l'accès à internet aux Etats-Unis, et ont également déclenché la bataille avec les compagnies de télécoms en offrant de la voix sur IP.

Mais le futur colosse ATT-BellSouth -représentant 120 milliards de dollars de chiffre d'affaires, 70 millions d'abonnés au fixe, 54 millions au mobile et 10 millions au haut-débit ADSL- inquiète les associations de consommateurs, qui redoutent des tarifs moins avantageux avec une concurrence réduite.

«Le Congrès et les régulateurs fédéraux doivent regarder avec attention la compétition inerte que leur politique a créé et devraient rejeter cette fusion», estiment Consumers Union et Consumer Federation of America, dans une demande conjointe au ministère de la justice de «bloquer» l'opération.

Dans le collimateur, la politique de libéralisation des télécoms, qui a aboutit à un éclatement en 1984 de l'opérateur historique ATT pour conduire aujourd'hui à un retour en arrière.

ATT fait valoir son rôle de contrepoids à la prédominance des câblo-opérateurs: «les consommateurs cherchant une véritable alternative au monopole du câble vont avoir des services IP de nouvelle génération plus rapides et plus économiques grâce à l'irruption d'ATT dans la télévision sur internet».

Pour l'association de défense de la démocratie sur internet (CDD), l'opération ATT-BellSouth «reflète la stratégie des acteurs du câble et des télécoms de bâtir un paysage de type monopolistique dans le haut débit et la télévision».

«ATT veut être le maître du numérique et imposer ses tarifs», juge cette association.

«Quand on enlève un acteur du marché, ce n'est jamais bon pour les consommateurs, car cela enlève de la pression sur les tarifs, même si la palette de services se veut plus sophistiquée», renchérit Carmi Levy, qui «attend de voir ce que ATT va apporter à la concurrence».