En atterrissant à l’aéroport de Whitehorse, au Yukon, Sandryne Berger et Émile Gagnon-Girard étaient à quelques heures de réaliser un rêve pour lequel ils se préparaient depuis plusieurs mois déjà. Deux heures et demie de route plus tard, après avoir traversé des paysages grandioses, ils atteignaient leur destination finale : Atlin, un village de 400 habitants campé entre lac et montagnes, au nord de la Colombie-Britannique. Depuis, ils vivent l’aventure du Mountain Shack, leur restaurant.

Le couple est dans la mi-vingtaine. Dès l’âge de 12 ans (!), en marge de ses études, Émile a travaillé en restauration. Sandryne, diplômée de HEC Montréal, est une entrepreneuse dans l’âme. Mais pourquoi donc cette destination ? « Ma mère est installée à Atlin, raconte Sandryne. Comme j’ai passé quelques étés dans son restaurant, j’ai eu l’idée de bonifier l’expérience en squattantses heures de fermeture, c’est-à-dire en ouvrant le soir. On a composé notre nom, notre menu et une expérience différente. » « Tout ça s’est décidé en 24 heures, sur un coup de tête, à l’automne 2018 », ajoute Émile.

Le grand départ

Durant plusieurs mois, le couple a planifié, élaboré et testé la composition du menu, notamment dans les cuisines du Beaufort Bistro, à Montréal, dont Jean-François Girard (le père d'Émile) est copropriétaire. « On voulait créer quelque chose de simple, à notre image », dit le couple.      

Le paternel n’a fait qu’une seule demande au fiston : exporter à Atlin le macaroni au fromage de sa grand-mère Thérèse, rebaptisé le Jeff’s Mac & Cheese pour l’occasion. Mission accomplie : depuis l’ouverture du Mountain Shack, la recette est devenue le plat signature de l’établissement ! Le Fish Tacos, le Miner’s Burger et l’incontournable poutine, célébrée d’un océan à l’autre, ont aussi la cote.  

« C’est vraiment intense », lance Sandryne au sujet de ces derniers mois durant lesquels le couple a dû aménager les espaces, se procurer l’attirail de cuisine puis attirer la clientèle. « Quand le premier client est entré, on s’est sauté dans les bras ! » Le duo a aussi eu l’occasion de découvrir le défi qui consiste à trouver les fournisseurs, ce qui implique des allers-retours hebdomadaires à Whitehorse.

La recette du succès ?

« Premièrement, on fait les choses avec amour », dit Émile. Il ajoute que la nature et l’absence de réseau cellulaire représentent à la fois une déconnexion et une reconnexion : « L’énergie est vraiment différente de celle de Montréal. Autour de nous, c’est calme; on aperçoit de gigantesques montagnes. » Des moustiques ? « Aucun ! » assure le jeune homme, qui raconte avoir souvent croisé des chevaux en liberté.

Au nombre des autres avantages, le couple cite l’absence de tentations liées à la vie trépidante d’une ville : « On dépense moins, et comme on doit consacrer notre énergie au resto, on arrive à économiser rapidement. »

Pour bâtir la réputation du restaurant, Sandryne évoque le rôle des médias sociaux et de l’image de marque. « Une amie, Alixe Côté, a réussi à mettre en image ce que j’avais en tête. Avoir un nom, un logo, des chandails, ça nous a vraiment motivés », raconte-t-elle.

Dans l’intervalle, l’été qui bat son plein, un festival de musique local et la saison de la chasse en septembre alimenteront ce succès, sans oublier les prochains rêves du couple. « Certains clients viennent presque tous les jours, révèle Émile. On a l’appui de la communauté et on constate qu’il y a beaucoup d’entraide, ici. »

Et la vie de couple ?

« On est deux têtes fortes, alors c’était un peu plus difficile au début, expliquent Sandryne et Émile. On ne parlait que du resto, même en revenant à la maison. » Après leur aventure estivale à Atlin, le tandem partira deux mois en Asie, notamment pour s’imprégner de la nourriture locale, avant de prendre la direction des vagues de l’Australie, en fourgonnette, où ils travailleront aussi. Et le Mountain Shack en 2020 ? Une histoire à suivre…