Bon dernier du classement général, la lanterne rouge Svein Tuft a été, de loin, le meilleur des trois Canadiens au Tour de France: contribution majeure à la victoire d'Orica-GreenEdge au contre-la-montre par équipes de Nice, de longues heures à rouler devant le peloton pour défendre le maillot jaune de ses coéquipiers Gerrans et Impey, préparation des sprints pour Matthew Goss et, pour couronner le tout, une brillante sixième place au contre-la-montre individuel au Mont-Saint-Michel.

Comme quoi, à moins de figurer parmi les 30 ou 40 premiers, le classement d'un coureur n'est pas nécessairement le meilleur indicateur de sa prestation générale.

David Veilleux a fini son premier Tour de France. C'est une réussite en soi, même si ce fut le lot de 169 des 198 inscrits cette année. Dans l'histoire, des 15 000 partants au Tour, 3900 l'ont complété au moins une fois, soit moins du tiers.

Le Québécois s'est montré à une reprise en échappée, lors de la deuxième étape en Corse, une affaire de 80 kilomètres. Il s'est réessayé à quelques reprises par la suite, dans les rares étapes où le terrain s'y prêtait. Ça n'a pas fonctionné. Parfois par manque de chance (il n'est pas le seul à tenter le coup!) mais aussi parce qu'il n'a «pas voulu trop en faire», comme il le disait à RDS samedi. La multiplication des efforts où il doit se «mettre dans le rouge» n'est pas son point fort. «Je suis meilleur pour rouler dans l'"orange" longtemps», nous a-t-il expliqué à quelques reprises en entrevue.

De toute façon, David Veilleux n'était pas au Tour de France pour jouer sa carte personnelle. Comme ses coéquipiers Cyril Gautier, Davide Malacarne et Jérôme Cousin, son mandat était de prendre soin de son leader Pierre Rolland. Prendre le vent pour lui, le repositionner à l'avant à l'approche des cols, assurer son approvisionnement en eau ou simplement lui prêter son vélo en cas de pépin, comme c'est arrivé à Ajaccio.

Veilleux s'est acquitté de ces tâches de l'ombre sans jamais compter ses efforts. Sauf que le Tour de Rolland ne s'est pas déroulé comme prévu. Incapable de se battre pour l'une des 10 premières places au classement général, comme lors des deux années précédentes, il s'est rabattu sur le maillot à pois de meilleur grimpeur, qui a fini par lui échapper. Rolland s'est donc lancé dans de longs raids dès le début des étapes, reléguant son équipier canadien à un rôle plus marginal.

Relativement tendu en Corse, David Veilleux a semblé prendre ses aises au fur et à mesure que les 3400 km s'égrenaient. On l'a senti dans le ton de ses entrevues et les propos qu'il tenait dans ses comptes rendus quotidiens à Sportcom. Physiquement, il a tenu le coup haut la main, gage de ses facultés de récupération et d'une bonne gestion de ses efforts.

Cela ne garantit pas pour autant son retour sur le Tour l'an prochain. Comme tous les coureurs de son statut, David Veilleux devra refaire ses preuves en 2014. Cela se fera-t-il sous les couleurs d'Europcar? La question se pose.

Équipier modèle, polyvalent, un Tour complété, vainqueur d'étape au Critérium du Dauphiné, gagnant des Trois Vallées varésines: le profil de l'athlète de 25 ans ne manquera pas de susciter de l'intérêt de quelques équipes.

À l'annonce du renouvellement de la commandite d'Europcar, le coureur de Cap-Rouge s'est montré évasif. On comprend qu'il ne veuille pas se peinturer dans un coin avant le début imminent des négociations pour un nouveau contrat. Mais un commentaire générique pour dire qu'il était à l'aise dans la formation de Jean-René Bernaudeau n'aurait pas été très engageant. Intrigant.

La présence de Veilleux au Tour 2013 ouvrira-t-elle la porte à d'autres Québécois? Ce n'est pas si simple. Dominique Rollin a déjà prouvé qu'il en avait déjà les capacités. Son équipe, FDJ.fr, a cependant l'embarras du choix. Question de circonstances. D'autres jeunes coureurs, comme Hugo Houle et Guillaume Boivin, continuent à progresser et peuvent légitimement l'espérer. D'autres suivront. Et il ne faut pas oublier que le cyclisme sur route ne se limite pas au Tour de France.