(Toronto) Le joueur le mieux classé toujours en vie à Toronto a eu chaud, mais il a tenu bon. Jannik Sinner s’est frayé un chemin jusqu’en finale en battant Tommy Paul en deux manches identiques de 6-4, samedi. Maintenant, il ne lui reste qu’à gagner. Mais ce refrain, il le connaît déjà.

Sinner, huitième joueur mondial, a remporté sept titres sur le circuit de l’ATP. Il a également pris part à trois finales. Deux d’entre elles en tournoi Masters 1000, à Miami, cette année et il y a deux ans.

Le joueur de 21 ans n’a encore jamais remporté un titre de cette importance. Ce dimanche après-midi, contre Alex de Minaur, joueur qu’il a déjà défait quatre fois, il tentera de mettre fin à sa disette et, surtout, de fermer le clapet à ceux qui ont envie de lui lancer : « Jamais deux sans trois ! »

Guerre de fond

Sinner a trimé dur. Reconnu comme l’un des meilleurs joueurs de fond de terrain au monde, l’Italien a également l’une des frappes les plus franches du circuit. Lorsque sa raquette touche la balle, on croirait qu’un micro est installé près de lui pour amplifier le son de la férocité du contact.

Ce match de 1 h 56 min a été une véritable guerre de tranchées, mais avec des opposants séparés par un terrain de 23,77 m de long.

Peu de dentelle, encore moins de fantaisie. Sinner et Paul se sont livré un combat long, fait de répétitions et sans flafla.

L’idée n’étant pas de savoir qui allait sortir un coup de génie le premier, mais bien qui allait trébucher le premier.

À ce chapitre, Sinner a cédé plus souvent, avec 14 fautes directes, mais il l’a fait peu de fois dans un même jeu. Ultimement, sa régularité a été déterminante.

PHOTO DAN HAMILTON, USA TODAY SPORTS

Tommy Paul

Le plan de match était assez simple, et ce, pour les deux assaillants. Au cours de la rencontre, il n’y a eu que cinq volées et quatre amortis. Là-dessus, huit coups appartiennent à Sinner.

Paul s’était peut-être enivré de la confiance acquise en battant Carlos Alcaraz la veille. Sinner peut difficilement être battu lorsque l’adversaire s’obstine à rester derrière sa ligne de fond. L’Américain n’a rien tenté, et c’est pourquoi il ne jouera pas ce dimanche.

Des ajustements

De son côté, Sinner n’a pas été sans reproche. Son premier service, notamment, a fait défaut. Et ce, dès le premier jeu du match, lorsqu’il s’est fait briser. Le huitième joueur au monde a terminé la rencontre avec seulement 46 % de premières balles en jeu. Il a également remporté seulement 42 % de ses points en deuxième service. Trop peu pour un joueur de sa trempe.

« Je ne servais pas très bien, surtout sur le premier service. J’essayais de rester dans le moment présent pour jouer de la bonne manière. J’essayais d’oublier. J’ai senti la pression, mais je pense que [Tommy Paul] aussi », a convenu Sinner.

Cependant, lorsque son service passait, Sinner était intraitable. Il prenait le contrôle des échanges rapidement, suffisamment pour gagner 78 % de ses points en premier service.

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Jannik Sinner

Il a tout de même montré ses failles. Brisé trois fois à des moments opportuns, l’Italien devait parfois s’incliner devant l’infatigable Américain, lui aussi en quête d’un premier titre important. Avec ses 19 coups gagnants, Paul n’a pas été déclassé par le jeune prodige italien.

Leur match était si serré qu’un échange à lui seul peut résumer son allure.

En situation de bris au septième jeu de la deuxième manche, lorsque Sinner menait 4-2, les deux joueurs se sont offert un échange de 46 coups. Une séquence spectaculaire pendant laquelle chacun des joueurs a exécuté 23 coups derrière sa ligne de fond. Le point s’est conclu par un lob trop long de Paul, à bout de bras.

Pendant que l’Américain avait les deux mains sur les genoux pour reprendre son souffle, Sinner se tenait debout sur sa ligne de service, figé, épuisé, mais galvanisé. Comme s’il venait de réciter la tirade du nez de Cyrano de Bergerac devant 12 000 personnes sans avoir bronché.

« Fatigué », a répondu Sinner lorsqu’on lui a demandé comment il se sentait à la fin du point.

« C’était facile de rester concentré, car c’était une balle de bris, donc c’était un point important. C’était difficile, vous l’avez senti. Tous les deux, on frappait assez fort et on essayait de bouger la balle. C’était épuisant. Je sentais mes jambes plus lourdes à chaque coup. Mais l’adrénaline et l’importance du point aident à rester concentré. »

Jusqu’au bout

Sinner tentera donc de finalement mettre la main sur un premier titre d’importance. Il a perdu contre Daniil Medvedev en mars dernier et contre Hubert Hurkacz en 2021.

Dimanche, il fera face à son partenaire de double dans le tournoi, Alex de Minaur, qu’il a battu quatre fois, dont trois fois sur dur.

« Ce sera un autre beau défi pour moi, mais surtout une nouvelle chance. Je suis heureux d’être dans cette position. J’ai travaillé fort pour jouer ce match », a-t-il expliqué.

S’il remporte le titre, Sinner grimpera en sixième position du classement, ce qui serait un sommet pour lui en carrière.