Depuis qu’elle est joueuse professionnelle, Marie-Yasmine Alidou en a vu, du pays. Assez pour faire de jolis chandails de tournée. Or, après la France, la Suède, l’Espagne, la Norvège et l’Autriche, la Québécoise semble enfin être arrivée à destination.

L’endroit où elle a finalement posé ses valises, c’est au Portugal. Alidou a rejoint Famalicão pour la saison 2022-2023, ce qui semblait être seulement une autre escale dans ce long périple. Toutefois, elle savait pertinemment que c’était l’ouverture nécessaire pour s’enraciner comme joueuse professionnelle.

Au terme d’une saison ponctuée de succès – lauréate à deux reprises du titre de joueuse du mois, 12 buts et 4 passes décisives, et meneuse du premier triomphe de son club en coupe –, la Montréalaise devenait une menace. À un tel point que les champions en titre, Benfica, ont tout simplement décidé d’embaucher la vedette rivale.

À la fin de juin, la polyvalente milieu offensive s’est entendue avec l’équipe la plus prestigieuse et dominante du pays pour un pacte de deux saisons assorti d’une année d’option. Un excellent coup après avoir passé tant d’années à trimbaler son baluchon de gauche à droite et de droite à gauche.

Malgré les autres offres sur la table, le choix s’est imposé de lui-même. En s’engageant avec l’équipe de Lisbonne, elle demeure dans un circuit qu’elle connaît bien et avec le club vainqueur des trois derniers championnats. Qui plus est, elle participera à la Ligue des champions féminine.

C’est sûr qu’avant d’aller avec Famalicão l’année dernière, l’équipe avec laquelle je voulais jouer au Portugal, c’était Benfica.

Marie-Yasmine Alidou

« J’avais toujours dans le fond de ma tête un truc qui me disait : "Si je performe bien, je vais me faire remarquer par Benfica." Donc, c’était sûr qu’après la saison que j’ai connue, j’étais vraiment contente d’avoir eu cette offre pour aller avec la meilleure équipe au Portugal », raconte-t-elle.

Au moment de la visioconférence avec La Presse, la joueuse de 28 ans est dans un appartement avec d’autres coéquipières. Une phase de transition obligatoire dans l’attente de la préparation de son nouveau chez-soi et qui, accessoirement, concorde avec la présaison.

Mais avant même de se présenter, la recrue estivale avait une réputation qui la précédait. Durant la conquête de la coupe, Alidou a inscrit un but spectaculaire, une frappe parfaite de l’extérieur de la surface qui a lobé la gardienne. Un coup de génie qui a ultimement permis à Famalicão de défaire son futur club, Benfica, en demi-finale.

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En un instant, la surprise a été créée et les souvenirs ont été gravés. « C’est un but qui est encore marqué dans leur tête. Justement, elles m’en reparlent encore ici », laisse-t-elle tomber, sourire en coin.

Une courbe de progression tardive

Avant de se rendre parmi les grands clubs européens, Alidou a bûché. Elle a joué une saison avec l’Université du Québec à Montréal et a pris part aux Universiades, cette version universitaire des Jeux olympiques.

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Marie-Yasmine Alidou en 2017

C’est donc à 22 ans qu’elle s’est embarquée dans le monde professionnel. Pas le parcours typique, disons. Mais cela lui a permis de gravir les échelons un à un et de progresser de façon linéaire.

« J’ai eu un petit déclic un peu plus tard, admet-elle. Il y en a qui l’ont à 16 ans et qui sont hyper bonnes très tôt dans leur vie. Après, ça chute. Moi, ç’a toujours été comme un peu progressivement. J’apprends tous les jours. […] Je sais que je peux encore m’améliorer, donc c’est positif. »

Donc, ce long parcours lui a permis « de prendre un petit peu de bagages » à chaque arrêt. Ce dernier passage à Famalicão lui a fait réaliser que sa polyvalence était l’un de ses plus grands atouts. « Il ne faut pas être fâché quand les coachs changent des fois de position, c’est un plus d’être capable de jouer à plusieurs postes », explique celle qui a pratiquement pourvu tous les rôles offensifs imaginables.

Un plus qui l’a menée jusqu’en équipe nationale.

À un poil du Mondial

On n’a pas éternellement passé sous silence les récents succès d’Alidou en club. En février 2022, elle a reçu sa première convocation avec l’équipe nationale senior et a aussi obtenu sa première titularisation. Au départ, l’équipe a tenté de la faire évoluer comme milieu défensive, sauf que ça n’a pas duré, compte tenu des aptitudes offensives de la Québécoise.

Malgré tout, l’entraîneuse-chef de l’équipe canadienne, Bev Priestman, a continué à l’appeler en sélection.

C’est donc le vent dans les voiles qu’Alidou est arrivée au camp préparatoire pour la Coupe du monde féminine, en juin. Parmi ce groupe de 25 joueuses conviées, 23 ont été en mesure de se rendre en Australie et en Nouvelle-Zélande. Toutefois, sur cette liste, le nom de la milieu de terrain ne figurait pas.

« Même sans avoir atteint mon plein potentiel, je pense que cet été, avant le Mondial, j’étais à un très bon niveau. Surtout après une saison lors de laquelle je pense avoir très bien fait. Puis lors des camps en équipe nationale, j’ai aussi très bien performé, même si je n’ai pas eu la chance de jouer… Carrément. J’avais très bien joué au dernier camp en Australie, donc j’étais vraiment déçue. Je ne vais pas le cacher. »

Priestman a préféré choisir seulement cinq milieux de terrain pour le Mondial. En rétrospective, notant le manque de buts et la blessure de Jessie Fleming, la présence d’une doublure pour la vedette de Chelsea aurait grandement pu servir. Si des leçons ont été tirées d’ici les Jeux olympiques en 2024, peut-être Alidou atteindra-t-elle la destination si prisée de Paris.

S’informer à Cloé pour faire un choix bien éclairé

En rejoignant Benfica, Alidou sera la seule Canadienne de l’équipe. Cependant, c’est un constat qui aurait été faux il y a quelques semaines à peine, alors que Cloé Lacasse y figurait. L’attaquante franco-ontarienne a toutefois rejoint Arsenal durant l’été. Cela dit, avant même de rejoindre Benfica, ou même le circuit, Alidou a fait appel à sa coéquipière en équipe nationale pour avoir sa vision des choses. « Avant de signer avec Famalicão, j’ai parlé avec Cloé. Je lui ai demandé comment c’était la ligue et si elle connaissait le club. […] Par contre, elle n’a pas vraiment eu à vendre beaucoup de choses à propos de Benfica », complète-t-elle.