C’était le 10 mai dernier. LAFC venait de passer en huitièmes de finale de la Coupe des États-Unis de soccer. Et Maxime Crépeau, sur le terrain du Banc of California Stadium de Los Angeles, se faisait chanter la pomme par les partisans de son nouveau club. C’était son anniversaire le lendemain, après tout.

Déjà, on sentait que le gardien québécois était en symbiose avec l’équipe qui avait fait son acquisition quatre mois plus tôt. Et, surtout, avec ses groupes de supporters.

« Quand je suis arrivé dans la ville de Los Angeles, même avant que la saison commence, je suis allé rencontrer les capos », explique Crépeau lors d’un entretien virtuel avec La Presse.

Les capos – qui signifie « têtes », en italien – sont les leaders ou même les chefs d’orchestre des tribunes. Ils font dos au jeu et dirigent les chants et les vibrations émanant des supporters.

« Pour moi, c’était la moindre des choses d’aller m’asseoir avec eux, de leur serrer la main, et de parler. En faisant ça, l’intégration s’est faite naturellement. Tu comprends l’ampleur des choses. Leur mentalité. Ce qu’ils exigent de toi. »

Surtout que devant son filet, Maxime Crépeau n’est qu’à quelques mètres de ceux qui créent une des plus belles atmosphères de la MLS : The 3252, l’union indépendante des supporters du LAFC.

« Au début, tu portes attention, souligne-t-il. Tu as l’oreille, parce qu’ils sont juste à côté. Mais plus la saison va, plus tu t’intègres et ça fait partie de ton expérience du match. »

Tu n’as pas besoin de motivation supplémentaire. Le stade, c’est un chaudron. C’est bruyant. C’est fort. Ils influencent l’énergie, et comment l’équipe peut répondre.

Maxime Crépeau

En quête de trophées

Crépeau et son équipe le leur rendent bien. Le LAFC domine le championnat en 2022, avec 57 points après 28 matchs, même si sa première place vient de lui être ravie par l’Union de Philadelphie (60 points, deux matchs en main). Sa place en éliminatoires a été assurée alors qu’il restait sept matchs au calendrier.

Le gardien de Greenfield Park a été titulaire pour toutes les rencontres, sauf une. Et il a permis au Black & Gold d’afficher le deuxième total parmi les plus bas du circuit au chapitre des buts alloués.

Pas mal pour un joueur à la recherche de nouveaux défis après trois ans avec les Whitecaps de Vancouver.

Son échange de l’Ouest canadien vers la Californie avait fait l’effet d’une bombe, en janvier dernier. C’est que Crépeau, après avoir connu la meilleure saison de sa carrière, avait lui-même demandé à être échangé. Les Whitecaps avaient cité une « demande spéciale » de sa part, tandis que lui parlait de « raisons personnelles ».

PHOTO JEFFREY SWINGER, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Maxime Crépeau avec les Whitecaps de Vancouver en avril 2021

Le résultat : l’échange le plus important jamais conclu en MLS pour un gardien, position dont les joueurs ne sont pas toujours les plus convoités. Le LAFC envoyait 1 million de dollars en argent d’allocation générale aux Caps, répartis sur quatre ans, en plus d’un choix de premier tour au SuperDraft en 2025.

Lors de son entretien avec La Presse plusieurs mois plus tard, il affirme qu’il y avait « plusieurs raisons derrière l’échange ».

Ç’a été une accumulation. En somme, j’allais avoir 28 ans cette année. J’avais parlé avec mon agent, et on se demandait : « Est-ce que Vancouver est la place où je veux rester ? Est-ce que c’est la place où ma carrière va avancer, se propulser ? » Ça faisait trois ans que j’étais là. Il fallait trouver une solution dans un club où on voulait aller chercher des trophées.

Maxime Crépeau

Les Whitecaps s’étaient qualifiés pour les séries en 2021. Le LAFC, non. Le scénario inverse est en train de se produire en 2022, avec des Wings dominants, malgré une certaine baisse de régime récemment. Inutile de dire que son pari a payé.

« Il n’y a pas d’ego »

L’entraînement au centre de performance de son équipe vient de se terminer. Crépeau est assis sur la terrasse des installations construites sur le campus de la California State University, dans l’est de la ville.

Avant de le laisser vaquer à ses occupations, on ne peut faire autrement que de l’interroger sur les acquisitions des supervedettes Gareth Bale et Giorgio Chiellini par le LAFC, qui a fait montre de ses ambitions cet été.

PHOTO JAYNE KAMIN-ONCEA, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Gareth Bale

« C’est super de côtoyer ces gars-là, soutient Crépeau. Ils sont easy-going. Ils ont une bonne tête sur les épaules. On s’entend qu’on a de beaux noms dans notre vestiaire, mais il n’y a pas d’ego. C’est ça qui est magnifique. Tout le monde est là pour le groupe, et non pour sa personne. »

« Leur expérience, leur calme, leur vécu, ce sont des choses que tu ne peux pas acheter. Après, tu vois leur effet sur le groupe. Une fois que tu arrives avec ces noms-là, le niveau du groupe en général augmente. »

On lui demande s’ils lui ont raconté des anecdotes de leur parcours international depuis leur arrivée.

Et Crépeau de répondre en riant : « On a des anecdotes, mais je ne peux pas les raconter ! »

Le Canada en tête ?

Avec tout ça, il y a quand même une pause internationale dans quelques semaines. Et Maxime Crépeau ne cache pas qu’il cherche encore à obtenir « des minutes » avec l’équipe canadienne, même si Milan Borjan est le partant indiscutable de John Herdman à l’heure actuelle, et en vue de la Coupe du monde en novembre.

« Chaque gardien veut jouer, explique Crépeau. Tout comme chaque joueur veut jouer. Tout le monde veut avoir du temps de jeu. C’est le fait qu’on est des professionnels et qu’on veut tout le temps atteindre le prochain niveau. »

Il nuance tout de même en indiquant connaître son rôle dans l’équipe.

Du reste, le gardien dit toujours avoir « du mal à [se] projeter plus loin que le prochain match ».

« Je me concentre sur une chose à la fois, dit-il, faisant référence à la saison de la MLS. Mais oui, j’y pense. Parce qu’une fois que tu arrives là-bas, tu es avec tous tes coéquipiers. Tout le monde est content. Ça fait trois mois qu’on n’a pas été ensemble. »

« C’est vraiment plaisant de retrouver les coéquipiers et les couleurs du Canada. »

Prendre du galon… en quittant Montréal

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Maxime Crépeau avec l’Impact de Montréal en 2017

Le « tournant » de la carrière de Maxime Crépeau, c’est quand il a été envoyé en prêt de l’Impact au Fury d’Ottawa, en 2018. Parce que jusque-là, il n’avait été que réserviste derrière Evan Bush, notamment.

« En tant que gardien, il faut que tu aies une saison complète sous la ceinture pour connaître un peu qui tu es. […] Tu dois apprendre un peu comment te gérer et comment gérer une année au complet. Lorsque je l’ai fait à Ottawa, j’ai appris beaucoup sur moi-même. Et je savais que j’avais un autre niveau à mon jeu. »

Il voulait retourner à Montréal pour la saison 2019. Mais il a demandé à être échangé parce qu’on lui avait préféré Evan Bush pour le poste de partant, à l’époque. « Je n’ai aucun problème avec ça », soutient-il aujourd’hui.

« À Vancouver, c’est là que j’ai vraiment pris du galon. Ç’a été le geste où je me suis dit : “OK, je peux m’établir dans la ligue.” Vancouver a été extrêmement important pour moi, avec mon passage de trois ans là-bas. »