(Montréal) Tard jeudi, on ne savait toujours pas si le match entre l’Impact et le Toronto FC allait être reporté. Il a eu lieu. Mais contre le gré des joueurs montréalais.

En soutien au mouvement de protestation contre le plus récent acte de brutalité policière envers un Noir aux États-Unis, les joueurs de l’Impact souhaitaient son report, ont fait savoir les défenseurs Rudy Camacho et Luis Binks en conférence d’après-match. Les joueurs du TFC n’étaient pas du même avis.

Après le match, l’entraîneur Thierry Henry a refusé catégoriquement de répondre à toutes les questions à ce sujet, insistant pour parler du duel, remporté 1-0 par Toronto.

« Toronto nous a été supérieur, il faut leur donner le crédit. On a la chance de rejouer mardi et de rectifier [le tir] », a-t-il essentiellement répété à quelques reprises, ajoutant plus tard qu’il ne voulait pas discuter davantage des arbitres ou des absents. « Il y avait une équipe en face qui devait jouer contre Toronto, et ça n’a pas été suffisant. »

Mais Camacho a été davantage loquace. « On s’était mis d’accord avec l’équipe pour ne pas jouer. Entre-temps hier [jeudi], on a eu un appel téléphonique avec le Toronto FC, avec leurs soi-disant joueurs importants pour la cause, et ils nous ont signalé qu’eux voulaient jouer. On a trouvé ça un peu bizarre, on s’est posé des questions, on a un peu hésité, on a dit qu’on allait jouer le match, et le lendemain, on a réfléchi, et on n’était pas du tout d’accord aujourd’hui. Donc, c’était un peu oui et non, mais finalement, on ne voulait vraiment pas jouer ce match, sauf qu’on a senti que personne [du côté du TFC] ne nous soutenait. »

On ne demandait pas de boycotter, c’était juste pour la cause. On voulait faire ce geste. Ils devaient avoir leurs raisons, on avait les nôtres. On n’était pas d’accord sur ce point-là.

Rudy Camacho, défenseur de l’Impact

Dans le camp torontois, le coach, Greg Vanney, a raconté avoir eu une longue discussion avec Justin Morrow, Jozy Altidore et Richie Laryea jusqu’à tard dans la nuit de jeudi à vendredi. Ses leaders voulaient jouer. Partant de là, il a décidé d’appuyer la décision de ses joueurs.

Altidore n’était pas de la rencontre, mais pour des raisons personnelles, a affirmé l’entraîneur.

« Ç’a été incroyablement difficile pour moi de jouer ce soir », a pour sa part assuré le défenseur torontois Justin Morrow.

Par ailleurs, le milieu étoile Michael Bradley est le seul joueur sur le terrain à ne pas avoir posé le genou au sol pendant l’hymne national. Tout comme son coach, il ne l’a fait que pendant le moment de recueillement pour le mouvement Black Lives Matter juste avant le coup de sifflet inaugural. Bradley a affirmé y avoir pensé longuement et ne pas juger bon de parler de lui pendant 30 secondes pour s’expliquer, ajoutant qu’il serait toujours « une voix forte pour l’égalité raciale ».

Et le match?

La poignée de fans disséminés dans les gradins du stade Saputo ont vu les leurs s’incliner au terme d’un duel peu animé. La cloche enveloppée d’un drapeau noir sur lequel étaient inscrites en jaune les lettres BLM n’aura jamais retenti. Ils sont rares, les matchs ternes entre les deux ennemis jurés. Celui de vendredi fera partie des exceptions.

Jugez-en : aucun tir après 30 minutes. Aucun tir cadré de toute la première demie. Ni même un carton ! En fait, il y a bien eu un tir cadré… avant qu’il ne soit retiré de la feuille de match : un but de la tête refusé au TFC sur hors-jeu à la 36e minute.

En début de deuxième demie, une main malchanceuse dans la surface aura coûté le match à l’équipe montréalaise, Álex Pozuelo concrétisant le tir de pénalité à la 50e minute.

L’Impact croyait bien avoir égalé le score un peu plus tard par l’entremise de Romell Quioto, mais l’attaquant était tout juste hors-jeu sur la séquence.

Le onze montréalais se débrouillait sans les services de Saphir Taïder et de Samuel Piette, qui ont accueilli l’arrivée de nouveau-nés jeudi et vendredi respectivement.

Ce match comptait à la fois pour le classement de la ligue et le championnat canadien. Les deux formations remettent ça avec ces mêmes enjeux, mardi, à Toronto.

— Avec La Presse canadienne