Reverra-t-on Karim Benzema en équipe de France? L'avenir de l'attaquant du Real Madrid, grand absent de l'Euro 2016 en raison de sa mise en examen dans l'affaire du chantage à la sex-tape, sera l'un des fils rouges des prochaines semaines.

Calendrier judiciaire

Le futur de Benzema en bleu dépend en premier lieu des suites judiciaires de l'affaire. Mis en examen pour « complicité de tentative de chantage » contre Mathieu Valbuena et « participation à une association de malfaiteurs », le joueur a déposé début mai une requête en nullité de la procédure qu'il juge « déloyale ».

Deux autres personnes impliquées dans ce scandale ont fait de même : Mustapha Zouaoui, présenté par les enquêteurs comme le cerveau de l'entreprise de tentative de chantage, et Karim Zenati, autre membre présumé du groupe de maîtres chanteurs. Mustapha Zouaoui, remis en liberté en février après quatre mois de détention, a de nouveau été incarcéré fin juin pour violation de son contrôle judiciaire.

Les réquisitions du parquet de Versailles en faveur d'un non-lieu ou d'un renvoi en correctionnelle sont attendues d'ici à la mi-juillet, mais cette date pourrait être repoussée si l'instruction est suspendue, le temps d'examiner ces trois requêtes.

Le «timing» a son importance : le prochain rendez-vous des Bleus est prévu le 1er septembre en Italie (amical) avant le début des qualifications pour le Mondial-2018en Biélorussie, le 6 septembre.

S'il est blanchi, le joueur du Real Madrid sera de nouveau sélectionnable. La balle sera alors dans le camp du président de la Fédération française de football Noël Le Graët et du sélectionneur Didier Deschamps, qui avaient décidé de l'écarter mi-avril, au nom de « l'exemplarité » et de « la préservation du groupe ».

Peut-il revenir en cas de non-lieu ?

Benzema a aggravé son cas avec sa déclaration-choc juste avant l'Euro, dans laquelle il reprochait à Deschamps d'avoir « cédé à la pression d'une partie raciste de la France » en le privant de Championnat d'Europe. Cette accusation a profondément meurtri l'ex-capitaine des champions du monde et d'Europe 1998 et 2000 dont la maison en Bretagne a été ensuite taguée du mot « raciste ».

DD a toujours refusé de commenter publiquement ces propos, mais son adjoint Guy Stéphan a été plus direct dans L'Equipe : « Comment voulez-vous qu'il ne soit pas touché ? Pourquoi ne le dit-il pas ? Par pudeur, peut-être ».

Le pragmatisme légendaire de Deschamps sera-t-il plus fort que la rancoeur ?

Noël Le Graët, qui n'a jamais caché son affection pour Benzema, n'a lui pas voulu l'accabler après cette sortie médiatique. « Je l'aime bien, je n'ai pas changé d'idée, il s'est laissé un peu aller (dans son interview au quotidien sportif Marca, NDLR), je préfèrerais qu'il soit plus aimable, mais je ne répondrai plus sur ce sujet », avait-il dit lors du stage de préparation en Autriche.

Il avait ensuite assuré à Clairefontaine que le joueur « n'est pas suspendu à vie », ajoutant qu'il n'était pas un adepte de ce genre de sanction.

Une chose est sûre : l'impopularité de Benzema ne plaide pas en sa faveur. Rejeté par l'opinion, Benzema risquerait, en cas de retour, de briser l'élan populaire qui s'est créé autour des Bleus. Même si durant l'Euro, il n'a cessé de les encourager sur les réseaux sociaux.

« Tous avec les bleus ce soir !!! Allez les gars !!! AllezLesBleus », a-t-il tweeté avant la finale dimanche.

« Déçu pour nos bleus... Vous avez tout donné !!! Merci AllezLesBleus », a-t-il enchaîné juste après.

Une autre équipe est née

Depuis sa mise à l'écart, les attaquants français ont saisi l'occasion de s'affirmer. Antoine Griezmann est devenu à l'Euro le nouveau leader technique avec ses 6 buts (désigné meilleur joueur du tournoi par l'UEFA)  et son association avec Olivier Giroud a très souvent fait merveille. Ce dernier, qui a longtemps réclamé le statut d'avant-centre numéro un, a pleinement assumé cette responsabilité avec ses trois buts, son altruisme et son sens du sacrifice.

Dimitri Payet a lui aussi pris à bras le corps la chance offerte en mars de revenir en grâce aux yeux du sélectionneur. Kingsley Coman a confirmé tout son potentiel, Anthony Martial moins, mais à 21 ans, l'avenir lui appartient forcément. Seul, André-Pierre Gignac, à quelques millimètres près sur son poteau trouvé en finale face au Portugal, est passé à côté de son Euro.

Le joueur des Tigres savait qu'il devait sa présence dans les 23 à l'absence de Benzema. Sur son seul talent, ce dernier a de quoi lui reprendre son dû. Mais sans Benzema, la ligne d'attaque française est apparue inspirée, désinhibée et finalement plus efficace. Rien ne dit que Deschamps consente à sacrifier ce nouvel équilibre, alors que d'autres jeunes joueurs frapperont à la porte (Lacazette, Fekir, Dembele...).