(Pékin) Jeremy Colliton a rassemblé ses joueurs vers la fin d’un entraînement.

« Ayons ce sentiment d’urgence, a calmement dit à son groupe l’entraîneur-chef de l’équipe canadienne de hockey masculin. Ayons ce sentiment de désespoir. »

C’était une consigne — et un emploi à l’autre bout du monde — qu’il n’aurait jamais imaginée il y a à peine trois mois.

« Tu ne planifies pas ces choses, a soutenu l’entraîneur-chef de 37 ans. Tu fais simplement de ton mieux et tu te prépares pour tes opportunités. »

Colliton en a certainement toute une sous les projecteurs aux Jeux olympiques de Pékin.

Alors que l’entraîneur-chef Claude Julien n’a pas pu voyager en Chine, après s’être cassé des côtes lors d’une activité d’équipe, l’ancien entraîneur-chef des Blackhawks de Chicago s’est fait présenter une occasion improbable — tenter de guider le Canada vers une médaille d’or olympique.

« La feuille de route de Claude parle d’elle-même, a insisté Colliton. J’étais très emballé de travailler avec lui et d’être dans son entourage. »

Après avoir été congédié par les Blackhawks au début du mois de novembre, à la suite d’un début de saison au cours duquel l’équipe a montré un dossier de 1-9-2, l’Albertain a réfléchi à son avenir.

« Tu dois te regarder et regarder la situation qui s’est produite, a indiqué Colliton. Tu dois commencer à te préparer pour peu importe quel sera le prochain chapitre. »

Le prochain chapitre était initialement le rôle d’adjoint avec le Canada lorsque la LNH s’est retirée des Jeux olympiques en raison des inquiétudes liées à la COVID-19. L’entraîneur-chef du Lightning de Tampa Bay, Jon Cooper, avait d’abord été sélectionné pour diriger le Canada.

Colliton a sauté sur l’occasion. Quel jeune entraîneur, surtout s’il cherche à se réaffirmer, ne voudrait pas apprendre de Julien ?

Gagnant de la Coupe Memorial, entraîneur-chef au Championnat mondial de hockey junior, lauréat du trophée Jack-Adams, champion de la Coupe Stanley. Colliton a travaillé avec Julien pour bâtir la formation canadienne, composée notamment de joueurs d’âge junior et de joueurs qui évoluent dans la Ligue continentale en Russie.

L’équipe s’est rassemblée pour un camp en Suisse, le mois dernier. Les esprits étaient élevés. Les Jeux approchaient à grands pas.

La blessure à Julien a présenté une autre tournure des évènements et, comme pour ses joueurs lorsque la LNH s’est retirée, elle a ouvert une nouvelle porte sur la plus grande scène mondiale.

« Nous avons passé beaucoup de temps ensemble, a affirmé Colliton. Nous avons travaillé ensemble à bâtir l’équipe et le plan. »

Ce sera maintenant à l’élève d’exécuter le plan.

PHOTO DAVID W CERNY, REUTERS

Jeremy Colliton donne des consignes à ses joueurs lors d’un entraînement, le 6 février.

« Il a pris le relais sans problème, a déclaré le capitaine du Canada, Eric Staal, qui est deux mois et demi plus vieux que son entraîneur-chef. Nous bâtissons le plan vers l’objectif ultime. »

Josh Ho-Sang a ajouté que Colliton bâtit également l’équipe selon les fondations établies par Julien.

« Claude est encore dans notre vestiaire, même s’il ne l’est pas, a observé l’ailier. Ses messages sont encore vrais. Jeremy amène sa propre touche. »

J’ai été chanceux. C’est une très belle expérience pour moi et c’est une occasion de développement.

Jeremy Colliton

La situation ne ressemble également en rien à celle qu’il a dû gérer à Chicago dans les jours qui ont précédé son congédiement — une situation qui n’avait rien à voir avec son mandat comme entraîneur-chef.

Un rapport indépendant publié à la fin octobre a révélé que les Blackhawks avaient mal géré les allégations selon lesquelles un entraîneur adjoint aurait agressé sexuellement le choix de première ronde Kyle Beach, lors du parcours de l’équipe vers une conquête de la coupe Stanley, en 2010.

Le directeur général Stan Bowman a immédiatement démissionné, tandis que le prédécesseur de Colliton derrière le banc — Joel Quenneville — a par la suite démissionné de son poste d’entraîneur-chef des Panthers de la Floride.

Le rapport a également joué un rôle dans le départ d’un autre haut dirigeant de hockey des Blackhawks, tandis que la LNH a infligé une amende de 2 millions US à l’équipe pour « procédures internes inadéquates et réponse insuffisante et inopportune ».

Colliton, qui était encore joueur professionnel en 2010, a tenté de préparer son équipe pour les matchs, alors que la controverse était bien présente, avant d’être éventuellement congédié, le 6 novembre. Il a montré une fiche de 87-92-26 à Chicago.

La priorité actuelle de Colliton est de préparer son équipe pour ce qui devrait être un tournoi au cours duquel la médaille d’or est à prendre. Le Canada doit participer à une séance d’entraînement avec les États-Unis, lundi, avant son match d’ouverture du groupe A contre l’Allemagne, jeudi.

Les Canadiens croiseront également le fer avec les États-Unis et la Chine lors du tournoi à la ronde.

Colliton a mentionné que Julien faisait encore partie des têtes dirigeantes, bien qu’il soit loin de Pékin.

« C’est bien d’avoir quelqu’un avec qui tu peux simplement échanger sur des idées, a fait valoir Colliton. Il offre assurément son point de vue. »

Colliton a disputé des parties de cinq saisons avec les Islanders de New York. Il a également remporté la médaille d’argent au Mondial junior de 2004 et la médaille d’or, l’année suivante, au sein d’une équipe canadienne composée des vedettes Patrice Bergeron, Ryan Getzlaf, Jeff Carter et Sidney Crosby.

« Il n’est pas question d’une seule personne, il est question du Canada, a-t-il souligné à propos de son expérience avec l’équipe nationale. Les joueurs et les entraîneurs partagent ce point de vue. Quel honneur. »