Ni Nick Suzuki ni Cole Caufield ne se souviennent de leurs premiers partenaires de trio au camp d’entraînement précédant leur saison recrue respective. Comme l’a sagement rappelé Caufield lui-même, il faut réfréner l’inévitable envie de tirer des conclusions prématurées.

Le personnel d’entraîneurs prend toutefois des décisions qui, même en tout début de camp, donnent une bonne idée de la valeur de certains joueurs à leurs yeux.

Jeudi matin, alors que les quelque 70 joueurs présents au camp du Tricolore ont sauté sur la glace pour la première fois, Emil Heineman a été jumelé à Nick Suzuki et à Cole Caufield pour un match simulé. Joshua Roy, lui, s’est retrouvé à la droite de Kirby Dach et de Sean Monahan.

Ces combinaisons seront peut-être défaites dès vendredi, alors aussi bien ne pas trop s’y attacher. Cela dit, elles ne sont pas le fruit du hasard pour autant.

Elles donnent une indication du degré d’intérêt de l’organisation à voir de quelle manière ces jeunes joueurs réagissent aux côtés de coéquipiers établis de la LNH.

Le cas de Heineman est particulièrement intéressant, pour deux raisons. D’abord, il a rapidement gravi la hiérarchie des espoirs du club au cours des derniers mois. Un bon camp l’an dernier et une forte première impression avec le Rocket de Laval à la fin de la saison en ont fait l’un des attaquants les plus surveillés au récent tournoi des recrues. Il est l’un des rares à avoir une chance légitime de créer une surprise.

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Ensuite, et surtout, Martin St-Louis et ses adjoints devront trouver un ailier droit à Suzuki et à Caufield. Cette quête est tout sauf anodine, car elle définira l’identité du premier trio de l’équipe, en début de saison à tout le moins.

Recherche

Jusqu’à maintenant, cette recherche a été ardue. Au cours des deux dernières saisons, plusieurs candidats ont obtenu des auditions, mais peu se sont réellement démarqués.

Même si St-Louis a affirmé mercredi avoir « plusieurs options » sous la main, trouver l’ailier droit idéal n’est pas une mince affaire, en tout cas si l’on se fie au passé.

Kirby Dach est celui qui a connu le plus de succès sur une longue période de temps. C’est avec lui que les deux autres ont le mieux paru. Lorsque les trois étaient réunis sur la glace à cinq contre cinq, le Canadien a obtenu la moitié ou plus des tentatives de tir, des tirs cadrés, des buts et des buts attendus.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Kirby Dach

Si l’on s’arrête strictement aux buts marqués, Josh Anderson a constitué une option intéressante. Cette combinaison, toutefois, n’est pas sans risque : en 2022-2023, pour chaque but attendu de ce trio, l’adversaire en a presque obtenu trois. Et on sait ce qui arrive quand on joue avec le feu : ce n’est pas juste chaud, c’est dangereux.

Sean Monahan apparaît comme le candidat de la stabilité, et il pourrait bien recevoir l’emploi au terme de la ronde d’entrevues. Mais son passage à la droite de Caufield et Suzuki a été trop court l’an dernier pour en faire un candidat indélogeable.

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Sean Monahan

En mêlée de presse, jeudi, les deux moteurs du premier trio ont énuméré les qualités qu’ils estiment essentielles pour compléter leur duo.

Suzuki : « Quelqu’un qui est capable de faire des jeux et de gagner des batailles, et qui est capable de nous appuyer. »

Caufield : « Le niveau de combativité [compete, en anglais] est primordial. Il faut compétitionner dans les trois zones. »

On pourrait ajouter à ces critères une responsabilité plus élevée que la moyenne sur le plan défensif, ce qui n’est pas la force des deux autres. C’est d’ailleurs probablement sur ce plan que Monahan les a le plus aidés.

Heineman

C’est peu dire, mais tous les candidats qui ont obtenu leur chance à ce jour n’ont pas montré la même maîtrise des concepts évoqués plus haut.

Un long détour qui nous ramène à Emil Heineman. Sans répondre à une question portant spécifiquement sur son association à Caufield et à Suzuki, il a certainement marqué des points en expliquant aux journalistes qu’il adorait le jeu « intense » qui lui permet d’utiliser sa carrure pour récupérer et protéger la rondelle.

Au cours du match simulé, sans être dominant, il n’a pas paru largué du tout. Et le tir violent qu’il a décoché du haut de l’enclave après une remise du revers de Suzuki lui a permis de déployer son arme la plus dangereuse.

Les chances que le Suédois amorce la saison à Montréal sont difficiles à chiffrer. C’est probablement ce qui l’a incité à relativiser son audition de jeudi, mettant l’accent sur l’« apprentissage » et le « développement » qu’il souhaitait tirer de l’exercice. Plus fébrile que nerveux, il a surtout voulu « ne pas [se] compliquer la vie » et tenter de les « aider » sur la glace.

Suzuki l’a néanmoins décrit comme un « gros ailier puissant » qui se place au bon endroit pour tirer. « Il peut certainement tirer ! », a répété Caufield en riant.

Mais peut-il faire sa place avec le grand club ? Et sur le premier trio ? Ce n’est pas au jour 1 du camp que la question sera tranchée. Mais elle mérite certainement d’être posée.