(Columbus) D’un tir sec et précis, Patrik Laine marque le tout premier but de la saison des Blue Jackets de Columbus. Quelques minutes plus tard, il rentre au vestiaire, victime d’une blessure à une épaule. Les Jackets perdent le match et surtout Laine pour deux semaines.

L’anecdote et son zeugme semblent banals. Mais dès les premiers instants de cette campagne 2022-2023, un mauvais sort semblait avoir été jeté sur l’équipe de l’Ohio.

Au moment d’affronter le Canadien, ce jeudi à Columbus, les locaux seront vraisemblablement privés de huit joueurs. Et pas les moindres.

Le gardien Elvis Merzlikins a quitté la rencontre de mardi contre les Flyers de Philadelphie. Aucun détail n’a filtré sur son état, mais il ne s’est pas entraîné le lendemain et Daniil Tarasov a été rappelé d’urgence. Rien d’encourageant là.

En défense, le grand meneur Zach Werenski ne jouera plus de la saison en raison d’une blessure à l’épaule. Jake Bean et Adam Boqvist sont eux aussi tombés au combat. Le jeune Nick Blankenburg avait fait son chemin jusqu’au premier duo : une cheville fracturée le contraint aujourd’hui au repos.

PHOTO PAUL VERNON, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Zach Werenski

En attaque, ce n’est pas mieux. À peine remis de sa blessure initiale, voilà Laine de nouveau au rancart, lui aussi en raison d’une cheville amochée. Il a rejoint Jakub Voracek et Justin Danforth à l’infirmerie.

En ajoutant à tous ces malheurs des performances inconstantes et peu convaincantes au cours des 10 premiers matchs, on obtient le résultat qu’on devine : les Blue Jackets se retrouvent à l’avant-dernier rang du classement général de la LNH. La chute est brutale pour cette équipe qui pouvait légitimement aspirer aux séries éliminatoires et qui se retrouve plutôt dans la course au premier choix au repêchage.

Rôle accru

Erik Gudbranson ne tente pas de se défiler : l’actuel état des lieux n’est pas exactement ce qu’il avait envisagé lorsqu’il a signé un contrat de quatre ans avec les Jackets l’été dernier.

Identifié depuis des années comme un défenseur dit « de profondeur », le natif d’Ottawa a joué plus de 27 minutes mardi soir dernier après que Jake Bean eut quitté la rencontre. Avec deux défenseurs recrues dans la formation, l’entraîneur-chef Brad Larsen n’a eu d’autre choix que de surcharger ses vétérans. Gudbranson s’est donc retrouvé, à 30 ans, à établir un sommet personnel en matière de temps de glace.

« Je m’en suis remis à mon expérience et j’ai tenté de garder mon jeu le plus simple possible ; ce n’était pas le moment de prendre de risques », explique-t-il, en français, au bout du fil.

L’épreuve de la réalité a été rapide pour lui. Le rôle du dernier arrivé dans une équipe n’est pas étranger à ce voyageur chevronné, qui enfile un huitième uniforme depuis ses débuts dans la LNH. Les Jackets sont en effet sa sixième équipe en trois ans. Sa femme et lui étaient devenus « confortables à être inconfortables », raconte-t-il pour dépeindre l’instabilité qu’il a connue.

Après avoir posé ses valises à Columbus, il croyait pouvoir profiter d’une rare « période d’ajustement ». La naissance d’une petite fille, deuxième enfant du couple, tout juste avant le début de la saison, a également injecté une bonne dose de chaos chez les Gudbranson.

Or, sans avertissement, il est devenu celui vers qui son entraîneur et ses jeunes coéquipiers se sont tournés. Fini l’ajustement. Après seulement 15 matchs, l’heure est déjà non pas à la panique, mais à la recherche accélérée de solutions.

Comme tout le monde, le défenseur ne sait que penser de la pluie de blessés. « Ça devient presque ridicule », s’exclame-t-il. La perte de Werenski, en particulier, est très douloureuse.

Or, il refuse d’invoquer cette excuse pour justifier les insuccès de son équipe, qui n’a jusqu’ici signé que cinq victoires. « On n’a pas bien joué, c’est aussi simple que ça », dit-il sans détour. Lui-même accepte sa part de responsabilité. Un coup d’œil rapide à ses indicateurs défensifs confirme en effet qu’il a son lot de gaffes à se faire pardonner.

Belle humeur

Malgré les circonstances, c’est une troupe de belle humeur qui se mesurera au Tricolore. Les Jackets ont en effet récolté cinq points sur une possibilité de six au cours de leurs trois derniers matchs.

On est pris dans un coin, mais on va s’en sortir. C’est la manière de penser de notre groupe. Chaque jeu, chaque période, chaque match, on regarde droit devant nous. Et on travaille.

Erik Gudbranson

Il se dit impressionné par les nombreux jeunes joueurs qui font leur place dans l’organisation. « Ils ont tous tellement de talent… », s’émeut-il.

Yegor Chinakov se voit confier des responsabilités accrues. Kent Johnson prouve qu’il a sa place à temps plein dans la LNH. À sa deuxième année, Cole Sillinger connaît un début de campagne timide, mais le meilleur est certainement devant lui.

Les deux victoires de la dernière semaine ont jeté une « fondation », croit encore Gudbranson. Elles doivent dicter la manière de jouer des prochaines semaines. Car même si le quart de la saison n’est pas encore atteint, le temps presse déjà si les Blue Jackets veulent garder vivant le rêve d’accéder aux séries éliminatoires.

« Il y a du travail à faire », conclut le défenseur. C’est sans doute un euphémisme.