Imaginez une Formule 1 qui commence son Grand Prix avec un tour de retard. Le Jean Alesi de 1996, dans sa Benetton-Renault, aurait certainement eu des chances de remonter le peloton pour viser un podium. Mais le Heinz-Harald Frentzen de la même année, dans sa Sauber, aurait peiné à même s’approcher de la 6e et dernière place donnant des points.

La saison de la LNH n’est vieille que de trois matchs, mais le Canadien a tout intérêt à avoir du Jean Alesi dans le nez. Car de défaite en défaite, l’équipe se condamne à devoir soutenir un rythme effréné d’ici la fin du calendrier.

Dans les six saisons « complètes » depuis le lock-out de 2012, la dernière place donnant accès aux séries éliminatoires, dans l’Association de l’Est, s’est gagnée quelque part entre 93 points (Detroit en 2013-2014) et 98 points (Pittsburgh en 2014-2015 et Columbus en 2018-2019).

Coupons la poire en deux et disons que la dernière place donnant accès aux séries nécessitera 95 points. Pour y arriver, le Canadien doit maintenant amasser 95 points en 79 matchs, soit un rythme de ,601 (60,1 % des points disponibles). C’est une fiche de 44-28-7, par exemple.

C’est donc encore jouable pour le Canadien, à condition de freiner la glissade sans trop tarder. Depuis la campagne 2013-2014 – et en excluant la saison écourtée de 2021 –, 16 équipes ont commencé leur saison avec zéro point à leurs trois premiers matchs. Du lot, quatre sont parvenues à remonter la pente. Les voici.

Stars de Dallas, 2019-2020

PHOTO PERRY NELSON, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Joe Pavelski

Classement : 37-24-8, 3es dans la division Centrale
Séries : éliminés en finale de la Coupe Stanley en 6 matchs

Les Stars sont sur la bonne voie après un parcours au deuxième tour des séries au printemps 2019. Au cours de l’été, ils ajoutent deux vétérans respectés en Joe Pavelski et Corey Perry. Mais le début de saison est catastrophique. Après neuf rencontres, ils montrent une fiche de 1-7-1. Une séquence de sept victoires en novembre leur permet toutefois de remonter la pente. Puis, en décembre, l’entraîneur-chef Jim Montgomery est remercié ; on apprendra par la suite que des problèmes de dépendance à l’alcool étaient en cause. Rick Bowness permet tout de même à l’équipe d’être en position pour participer aux séries quand la pandémie éclate en mars 2020. Leurs succès en séries, dans la bulle à Edmonton, sont évidemment à prendre avec circonspection, en raison des conditions inhabituelles du tournoi.

Penguins de Pittsburgh, 2015-2016

Classement : 48-26-8, 2es dans la division Métropolitaine
Séries : champions de la Coupe Stanley

La saison précédente, les Penguins amassent 98 points et se font battre sèchement en cinq matchs par les Rangers de New York dès le premier tour. Mais l’équipe d’alors compte sur des vedettes (Sidney Crosby, Evgeni Malkin, Phil Kessel et Kristopher Letang) qui n’ont pas encore 30 ans. Les Penguins font vite oublier leurs trois premières défaites en remportant leurs trois rencontres suivantes, puis en collant six autres victoires de suite. Mais tout n’est pas réglé pour autant. Le 12 décembre, Mike Sullivan remplace Mike Johnston derrière le banc et l’équipe perd les quatre premiers matchs sous le nouvel entraîneur. Sullivan tirera finalement le maximum de son formidable noyau, avec la première de deux conquêtes de suite de la Coupe Stanley.

Kings de Los Angeles, 2015-2016

Classement : 48-28-6, 2es dans la division Pacifique
Séries : éliminés au 1er tour en 5 matchs

Difficile d’imaginer un départ plus catastrophique après trois matchs : des défaites de 5-1, 4-1 et 3-0, les trois à domicile ! L’entraîneur-chef Darryl Sutter évoque, dès la troisième défaite, un « sentiment d’urgence ». Les Coupes Stanley de 2012 et 2014 semblent alors bien loin, d’autant plus que les Kings ont été exclus des séries au printemps précédent. Mais comme les Penguins, les Kings comptent sur un noyau à maturité, composé de joueurs qui ont de 25 à 30 ans. La réponse n’a pas tardé : les rois remportent leurs sept matchs suivants et terminent leur première tranche de 10 matchs avec un dossier de 7-3-0. Contrairement à nos deux cas précédents, aucune tête n’a roulé ici, Sutter est resté en selle toute l’année. Cette saison sera toutefois la dernière avant le début d’un lent déclin des Kings.

Flyers de Philadelphie, 2013-2014

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Claude Giroux

Classement : 42-30-10, 3es de la division Métropolitaine
Séries : éliminés au 1er tour en 7 matchs

Ici, ça a brassé un brin. Cet été-là, les Flyers rachètent les contrats de Daniel Brière et d’Ilya Bryzgalov. Ils offrent une entente de cinq ans à Vincent Lecavalier, dont le contrat vient lui aussi d’être racheté. Le proactif Paul Holmgren décide qu’il en a assez vu après la troisième défaite de suite de son équipe : il limoge Peter Laviolette et le remplace par Craig Berube. Le propriétaire des Flyers, Ed Snyder, déclare alors que le camp d’entraînement de septembre 2013 était « un désastre », « le pire camp » auquel il a assisté. Les résultats ne seront pas immédiats puisque Philadelphie affiche un dossier de 1-7-0 après huit matchs. Claude Giroux attendra au 9 novembre avant d’inscrire son premier but de l’année, mais partira alors sur une lancée.

Le Canadien et les blessés…

Il y a des éléments intéressants à relever. Le camp d’entraînement désastreux des Flyers de 2013, par exemple, n’est pas sans rappeler ce que le CH a démontré en septembre. Cela dit, ces Flyers, tout comme les trois autres équipes, comptaient sur des formations en santé, du moins pour les têtes d’affiche. Ce n’est donc rien de comparable avec le Tricolore, privé notamment de son gardien numéro 1 (Carey Price), d’un défenseur stable (Joel Edmundson) et d’un dangereux marqueur (Mike Hoffman). Ce dernier est attendu dans la formation cette semaine. La date de retour des deux autres est inconnue pour le moment.

Et les autres

Voici la liste des 12 équipes qui, depuis 2013-2014, ont raté les séries après avoir perdu leurs trois premiers matchs en temps règlementaire. À l’exception des Bruins de 2015-2016, aucune de ces équipes n’est passée bien proche de se qualifier. On raconte qu’encore aujourd’hui, les chercheurs se demandent comment une équipe a pu rater les séries par plus de 40 points comme l’ont fait les Sabres.

2019-2020

  • Sénateurs d’Ottawa, fiche de 25-34-12 (,437)
  • Sharks de San Jose, fiche de 29-36-5 (,450)
  • Wild du Minnesota, fiche de 35-27-7 (,558)*

*Le Wild a participé aux séries en raison du format élargi à 24 équipes, mais était en voie de les rater quand la saison a été interrompue.

2018-2019

  • Rangers de New York, fiche de 32-36-14 (ont raté les séries par 20 points)

2017-2018

Aucune équipe n’a amorcé la saison avec une fiche de 0-3-0.

2016-2017

  • Kings de Los Angeles, fiche de 39-35-8 (ont raté les séries par 8 points)

2015-2016

  • Devils du New Jersey, fiche de 38-36-8 (ont raté les séries par 12 points)
  • Oilers d’Edmonton, fiche de 31-43-8 (ont raté les séries par 17 points)
  • Hurricanes de la Caroline, fiche de 35-31-16 (ont raté les séries par 10 points)
  • Blue Jackets de Columbus, fiche de 34-40-8 (ont raté les séries par 20 points)
  • Bruins de Boston, fiche de 42-31-9 (ont raté les séries par 3 points)

2014-2015

  • Sabres de Buffalo, fiche de 23-51-8 (ont raté les séries par 44 points)

2013-2014

  • Sabres de Buffalo, fiche de 21-51-10 (ont raté les séries par 41 points)