Tout entraîneur de hockey va lancer un défi à son équipe à différents moments. Chaque entraîneur le fait à sa façon, parfois en s'adressant au groupe en entier, parfois en ciblant des individus en particulier. Claude Julien n'est pas différent de ses compères.

L'an passé, certains de ces défis avaient fini par « sortir » du vestiaire. Par exemple, en janvier, avant un match contre le Lightning, Julien avait mis sa troupe au défi, qui avait répondu avec un gain contre une des grosses pointures de la LNH. Après une défaite gênante à Boston, il avait critiqué ses joueurs publiquement, une autre forme de défi. L'équipe avait répondu en battant les puissants Capitals.

Malgré les déboires du CH de 2017-2018, le canal de communication entre le coach et ses joueurs n'était pas coupé. Mais quand une équipe perd 53 matchs, il arrive parfois qu'elle n'ait tout simplement pas les ressources pour répondre aux défis qui lui sont posés.

Ce qui nous amène à la victoire de 3-0 du Tricolore contre les Bruins samedi, au TD Garden. Jeudi, le CH avait fait un de ses rares faux pas de la saison et s'était incliné à Buffalo.

« Claude nous le dit depuis le début de l'année : les bonnes équipes n'en perdent pas deux de suite. C'est important de se challenger. Quand on en perd une, il faut sortir encore plus fort au match suivant », a lancé Danault.

C'est quoi, sortir fort ? C'est Jeff Petry qui plaque le dangereux David Pastrnak derrière le but dès la première minute. C'est Carey Price qui annonce ses couleurs dès le départ en fermant l'angle contre Sean Kuraly, plutôt que de répéter son erreur de samedi dernier à Ottawa. C'est Artturi Lehkonen et Max Domi qui créent le chaos grâce à leur vitesse. C'est Jonathan Drouin qui provoque une punition grâce à son intensité en échec avant contre Brandon Carlo. Certes, les Bruins étaient privés de deux de leurs meilleurs défenseurs en Charlie McAvoy et Torey Krug. Mais ils avaient tout de même les ressources pour l'emporter.

Additionnez donc ces gestes, et vous obtenez une équipe qui a répondu au défi lancé par son entraîneur. Le message est banal, direz-vous. Une équipe veut toujours gagner, peu importe le résultat du match précédent. Mais l'important, c'est que le message soit entendu, et appliqué.

« J'ai entendu ça toute ma vie. C'est juste quelque chose qui se dit au hockey depuis des années, a répondu Brendan Gallagher. Mais c'est vrai. Les bonnes équipes réussissent à surmonter l'adversité. On a une jeune équipe, mais on est capables de mettre ça derrière nous. »

Le CH a subi quatre défaites cette année. Sa fiche après ces défaites : 4-0-0. On pourrait ajouter qu'il s'agit probablement de ses quatre performances les plus complètes de la saison : deux victoires contre les Penguins, un 3-2 acquis à la dure contre les Flames, et la prestation de samedi.

L'an passé, Julien avait sans doute le même désir de voir son équipe rebondir. Ça ne l'avait pas empêchée de perdre 35 matchs après avoir subi une défaite. Dix fois, cette formation avait connu des séquences de trois revers ou plus.

UN BON PREMIER SEGMENT

Avec tout ça, le Canadien conclut sa première tranche de 10 matchs avec une fiche de 6-2-2. Si quiconque affirme avoir prédit ça, regardez bien son nez : c'est possible qu'il allonge.

Pour rester dans l'esprit de la célèbre envolée lyrique de Jim Mora, il faut attendre avant même de se demander si cette équipe pourrait atteindre les séries. L'an passé, les Canucks de Vancouver comptaient eux aussi six victoires après dix matchs. Au match des Étoiles, ils étaient déjà largués.

Mais ce que l'on voit, c'est une équipe qui démontre que ses succès ne sont pas le fruit du hasard ou de la chance.

Ils ne sont pas le fait d'un joueur ou d'un trio qui transporte l'équipe. L'unité de Max Domi empile peut-être les points, mais celle de Phillip Danault apporte sa contribution en contrant les meilleurs joueurs adverses. Idem en défense : Mike Reilly, Jeff Petry, Xavier Ouellet et parfois même Jordie Benn alternent au titre de meilleur défenseur d'un match.

Et que dire de Carey Price ? Samedi, il a réussi un jeu blanc et il a dépassé Patrick Roy pour occuper seul le deuxième rang de l'histoire du Canadien au chapitre des victoires. Il a joué un très bon match, ça ne fait aucun doute. Mais l'a-t-il « volé » ?

Autant d'indices que le Tricolore d'octobre n'est peut-être pas un feu de paille.