Patrick Carpentier a écrit une page de l'histoire du NASCAR, hier, en devenant le premier pilote étranger depuis le Canadien Loyd Shaw, en 1953, à signer une pole position en série Sprint.

Le pilote québécois a mis 29,349 secondes à boucler son premier tour lancé du New Hampshire Motor Speedway avant qu'on ne lui demande de rentrer aux puits. «J'allais m'élancer pour mon deuxième tour en espérant pouvoir faire un peu mieux et ainsi m'assurer une place pour la course, a dit Carpentier en conférence de presse. Mais on m'a dit à la radio de couper le contact de ma voiture, que j'étais en pole.»

Carpentier était à ce point excité qu'il a raté l'entrée des garages et s'est retrouvé immobilisé au beau milieu de la ligne des puits, devant les gradins principaux. Cela lui a permis de saluer les dizaines d'amateurs québécois massés près de la clôture, bien assez près pour communiquer leurs encouragements au pilote.

«Y a pas un meilleur timing que ça, a dit Carpentier quand on lui a demandé s'il avait voulu profiter de la course la plus près du Québec pour signer sa première pole position en carrière en série Sprint. Le but est d'augmenter le bassin d'amateurs du NASCAR au Canada. Il va y avoir beaucoup de gens de chez nous qui vont faire le voyage en autobus, demain, et c'est l'objectif. J'espère que je vais rester en tête mais ça va être difficile. Mais je me permets de célébrer aujourd'hui.»

Pour Carpentier, sa performance de Loudon équivaut à celle de Montréal, l'an dernier. «La pole de Montréal était aussi excitante que celle-là, a-t-il soutenu. À Montréal, c'était le début. Si on s'était qualifiés sixièmes, je ne pense pas que je serais ici aujourd'hui. On avait besoin de rouler parmi les deux ou trois premiers pour faire bonne impression.

«Honnêtement, j'aurais aimé obtenir la position de tête la semaine dernière à Sonoma, sur un circuit routier. Mais je ne serais pas aussi heureux, a-t-il enchaîné. Pour moi, le NASCAR, c'est des ovales. Quand on m'a dit qu'il serait bon d'aller faire bonne impression à Montréal, sur un circuit routier, je me suis qu'il ne fallait pas que je sois étiqueté comme un spécialiste de circuits routiers. Obtenir une pole ici est donc incroyable.»

Bénéfique averse

Quarantième à s'élancer en piste, Carpentier a cru un instant qu'il allait ne pas disputer la qualification, qui a été retardée pendant deux heures à la suite d'un orage isolé. Ce qui lui aurait assuré une place au départ, en 38e position. «J'aime me qualifier sur des ovales, mais les pilotes qui doivent se qualifier ont tellement à perdre que j'aurais été content si la séance avait été annulée, car ma participation aurait été assurée», a confié Carpentier.

Pendant que l'on asséchait la piste et que les nuages menaçaient toujours, La Presse lui a demandé s'il préférait profiter de la pluie pour assurer sa place sur la grille ou s'il espérait toujours pouvoir qualifier la voiture. «L'important, c'est de participer à la course», a-t-il répondu en substance. Il avait changé de discours en sortant de sa voiture, une heure plus tard: «J'aime mieux me qualifier!»

Carpentier a reconnu avoir bénéficié de l'averse pour signer son temps canon. «Ça n'a rien à voir avec la piste. Prochaine question, a-t-il d'abord dit avant de pouffer de rire. Plus sérieusement, ça n'avait pas vraiment d'importance pour nous car tous les pilotes qui devaient se qualifier ont bénéficié des mêmes conditions. Mais la pluie a permis de rafraîchir la piste, ce qui nous a permis d'avoir plus d'adhérence. Mais n'en parlez pas, s'il vous plaît, ça reste entre vous et moi!»

Le pilote québécois espère maintenant profiter de sa position enviable sur la grille, demain, mais il reste réaliste quant à ses chances de rester longtemps en position de commande. «C'est sûr que je vais tout donner lorsque le drapeau vert va être agité, a dit Carpentier. Mais c'est certain que le but pour nous est de terminer parmi les 15 premiers car on doit surtout continuer à travailler pour percer le top 35. Mais, au bout du compte, je veux être en NASCAR longtemps; j'espère donc que cette pole position va m'aider à atteindre mon but.»

L'émotion à son comble

Il fallait être à Loudon pour voir à quel point la pole position de Carpentier a fait plaisir.

Foster Gillett, copropriétaire de l'écurie Gillett-Evernham, avait du mal à contenir ses émotions. Le fils de George Gillett était encore tout sourire quand on lui a demandé s'il s'attendait à ce que Patrick Carpentier réalise une pole position à sa première saison en série Sprint. « Je ne veux pas répondre à ça, a-t-il dit. Mais on ne l'aurait pas engagé si on n'avait pas confiance en lui. Et c'est une personne merveilleuse. On est tellement heureux.»

Il faisait aussi plaisir de voir la réaction de la petite famille de Carpentier, venue le rejoindre à sa sortie de la salle de presse. Pour Carpentier, cette pole à Loudon revêt de plus un caractère bien particulier. «On est venus ici il y a deux ans, alors que j'essayais sans succès depuis un certain temps d'obtenir un volant en NASCAR, a dit Carpentier. On est arrivés ici avec absolument rien mais on a organisé une conférence de presse. J'ai alors dit à mon agent «pourquoi on fait ça, je n'ai rien à dire!» Mais ça s'est bien déroulé, c'est un peu ça qui a lancé notre recherche de commandites pour la course de Montréal.

«Après la conférence, j'étais debout derrière la clôture pour une course de récents modèles à laquelle participait Tony Stewart, a poursuivi le pilote de Joliette. Je me suis dit «ces gars-là conduisent n'importe quoi, dans n'importe quelle série. C'est décidé, c'est ici que veux être.» Mais si on m'avait dit que je réussirais à faire la pole en série Sprint deux ans plus tard, je ne l'aurais pas cru.»