Depuis l'an dernier, beaucoup de choses ont changé au sein de la Scuderia Ferrari. Sauf la compétitivité des monoplaces.

L'époque du trio de choc Schumacher-Brawn-Todt est bien révolue. Les deux premiers ont quitté la Scuderia fin 2006, remplacés respectivement par le pilote Kimi Räikkönen et le nouveau directeur technique Aldo Costa, tandis que le dernier s'est retiré de la gestion de l'écurie à la fin de la saison dernière, remplacé par l'Italien Stefano Domenicali.

De tels changements auraient pu coûter cher à la Scuderia. Sans le talent de metteur au point de Michael Schumacher, qui donc allait orienter aussi efficacement le développement des monoplaces? Sans l'habileté stratégique et la poigne de Ross Brawn, qui allait mettre de l'ordre dans les réunions à Maranello? Sans le flair et le sens de l'organisation de Jean Todt, qui allait défendre les intérêts de la Scuderia face au monde impitoyable de la Formule 1?

Pourtant, chez Ferrari, la révolution s'est faite en douceur. Coutumière par le passé de luttes intestines destructrices, la Scuderia a cette fois réussi sa mue en douceur. Désormais, elle est entièrement dirigée par des Italiens, mais sans la douce désorganisation que cela impliquait jadis.

Stefano Domenicali en est l'une des clés. À 43 ans, ce natif d'Imola est entré chez Ferrari à la fin de ses études, il y a 17 ans, pour occuper divers postes administratifs avant de devenir chef d'équipe de l'écurie de F1, il y a 10 ans. Directeur sportif depuis 2003, il est devenu cette saison le directeur général de la gestion sportive de Ferrari, à la place du Français Jean Todt. «Je pense que le cheminement que j'ai suivi au sein de Ferrari m'a permis d'acquérir une connaissance générale assez étendue des problèmes que l'on peut rencontrer dans la gestion d'une écurie de Formule 1, avance l'Italien. Et naturellement, j'ai eu la chance de voir comment des personnes extraordinaires, telles Luca di Montezemolo ou Jean Todt, dirigeaient la société. Ils m'ont énormément appris.»

Travailleur et extraordinairement efficace, Stefano Domenicali a adopté une approche beaucoup plus pragmatique de la direction de Ferrari. Jean Todt dirigeait ses hommes avec une autorité de fer, et donnait l'impression d'une grande sévérité.

Lorsqu'il s'adressait à la presse (généralement après avoir fait attendre les journalistes plus d'une heure), il s'exprimait avec un ton cassant et semblait mépriser ses interlocuteurs.

Avec Stefano Domenicali, le visage de Ferrari a changé. Avec lui, les points presse de la Scuderia débutent toujours à l'heure et se déroulent dans une ambiance nettement moins hostile. À l'interne, les ingénieurs ne cachent pas que l'ambiance est plus détendue, ce qui, affirment-ils, ne les incite pas pour autant à travailler moins.

Pour preuve, la domination des Ferrari au terme de ce premier tiers de saison 2008. Si l'on exclut les circonstances particulières qui ont prévalu à Melbourne (problèmes de moteurs) et à Monaco (la pluie), les monoplaces rouges ont monopolisé toutes les victoires. «Chez Ferrari, la transition s'est jouée en douceur, assure Stefano Domenicali. Il est hors de question de parler d'ancien et de nouveau régime. Le président Montezemolo ainsi que Jean Todt m'ont confié un rôle qui fait partie d'un processus de renouvellement entrepris depuis longtemps déjà et qui se base sur des principes de stabilité et de croissance interne. La philosophie de l'écurie est totalement inchangée.»

Avec une direction composée de Stefano Domenicali, Luca Baldisseri et Also Costa, succédant aux Jean Todt, Ross Brawn et Rory Byrne, le contrôle de la Scuderia revient désormais entièrement en mains italiennes, tout en conservant le bon sens, l'efficacité et le pragmatisme du triumvirat précédent.

Ferrari a réussi à négocier parfaitement le virage de sa transition. Désormais, il ne reste plus à la nouvelle équipe qu'à faire aussi bien que l'ancienne.