Dix ans ont passé depuis le grave accident de ski qui a laissé Michael Schumacher dans un état dont la nature est encore à ce jour tenue secrète. Retour sur la carrière de celui qui fut, et qui demeurera, un des plus grands champions de l’histoire de la Formule 1…

Le 29 décembre 2013, Michael Schumacher faisait du ski dans un secteur hors piste de Méribel, dans les Alpes françaises où il possède un chalet, quand il a chuté lourdement. Il portait un casque, mais sa tête a percuté un rocher. Il a été plongé dans le coma pendant plusieurs mois.

Depuis, l’ex-pilote de Ferrari n’a plus jamais été vu en public, et les nouvelles à son sujet se font rares. Ces derniers jours, son frère cadet Ralf a répondu à quelques questions de la presse allemande, en insistant toujours sur le désir de la famille de ne pas révéler la nature de l’état de santé de son frère.

« Michael a souvent eu de la chance dans sa vie, puis il y a eu cet accident. Heureusement, les moyens médicaux modernes ont permis de faire beaucoup de choses. Mais malgré cela, rien n’est plus comme avant », a confié Ralf Schumacher au quotidien Bild.

« L’accident de Michael représente un moment très difficile et dramatique pour moi aussi, a-t-il également déclaré. Bien sûr, ça l’a encore plus été pour ses enfants. Je pense aussi au pauvre Mick [le fils de Michael Schumacher], qui n’était qu’un garçon à l’époque. »

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Les frères Ralf et Michael Schumacher au Grand Prix du Canada de 2001

Dans un documentaire diffusé sur Netflix en 2021, la femme de Schumacher, Corinna, affirmait que « Michael manque à tout le monde, mais il est toujours là – différent, mais toujours là. Et à mon avis, ça nous rend tous plus forts ».

« Nous essayons de préserver la cellule familiale que Michael aimait tant et qu’il aime toujours. Et nous continuons de vivre nos vies. La vie privée reste privée, comme il aimait dire, ajoutait-elle. […] Michael a toujours veillé sur nous, c’est désormais à nous de veiller sur lui. »

« Absolument exceptionnel »

Ce triste anniversaire est l’occasion de revenir sur la carrière de celui qui a marqué le sport comme peu l’ont fait. Pour en parler, La Presse a contacté Pierre Houde, descripteur de la Formule 1 au Réseau des sports (RDS) depuis de nombreuses années.

D’entrée de jeu, M. Houde revient sur un de ses plus lointains souvenirs de l’Allemand : ses débuts en F1, en 1991. Alors que le pilote belge Bertrand Gachot s’était retrouvé en prison après un incident avec un chauffeur de taxi, Schumacher avait été appelé en remplacement au sein de l’écurie Jordan. Il conduisait une voiture verte, aux couleurs de 7Up.

Je vais toujours m’en souvenir ; Michael a fait son entrée au Grand Prix de Belgique en remplacement à la dernière minute. Et il a été absolument exceptionnel.

Pierre Houde, descripteur de la Formule 1 à RDS

Résultat : une huitième place en qualifications, derrière les Ayrton Senna, Alain Prost, Nigel Mansell, Gerhard Berger, Jean Alesi et Nelson Piquet de ce monde.

« D’un trait, on a vu le génie de ce jeune homme-là qui ne connaissait pas la voiture, qui n’avait jamais piloté une Formule 1. »

Tout de suite, l’écurie Benetton s’est entendue avec le jeune prodige, qui faisait officiellement le saut en F1 lors de la course suivante. Quelques années plus tard, en 1994 plus précisément, ledit prodige remportait le premier de deux championnats avec Benetton. Et le premier de sept en carrière, dont cinq avec Ferrari.

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Michael Schumacher au Grand Prix du Canada de 1993

Un dominant

Pierre Houde a fait quelques entrevues avec Michael Schumacher au fil des années. Il n’en garde à ce jour « que de bons souvenirs ».

« Quand il te voyait arriver préparé et que tes questions allaient dans le sens sportif, quand tu avais fait tes devoirs et que tu ne lui faisais pas perdre son temps en lui demandant quelles céréales il mange le matin, quel café il boit le soir, il était excellent en entrevue. Pas chaleureux parce qu’il ne l’a jamais vraiment été. »

Il demeure que Schumacher, sur la piste, avait un côté « absolument détestable », se souvient le descripteur.

« Il y a eu beaucoup de sanctions contre lui dans sa première année parce qu’il faisait des choses à la limite. Son attitude aussi était plus que froide quand il fallait qu’elle soit froide. Il a appris au fil des années à devenir un petit peu plus lousse devant le public, on l’a vu sourire un peu plus. »

D’un autre côté, Schumacher était un pilote très « engagé sur le plan professionnel » hors des circuits. À l’époque, il n’y avait pas de restrictions sur les essais libres ; Ferrari, par exemple, faisait des essais privés entre les courses.

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Michael Schumacher au volant de sa Ferrari au Grand Prix du Canada en 2005

« Michael tenait à être de tous les essais, dit M. Houde. Il était maladif. Il n’était pas question qu’il y ait un troisième pilote qui touche à l’auto. »

Les années ont passé, Schumacher a été victime d’un tragique accident, mais il demeure à ce jour un des plus grands pilotes à avoir roulé sur les circuits de F1.

« Est-ce que Michael Schumacher était meilleur que Senna ? Est-ce que Senna lui-même était meilleur que Jackie Stewart ? Est-ce que Jackie Stewart était meilleur que [Juan Manuel] Fangio ? Est-ce que Michael Schumacher était meilleur que Lewis Hamilton ? Puis là, on s’en va vers [Max] Verstappen.

« Ce qu’on commence à remarquer, c’est qu’il y a eu de grandes époques qui ont consacré de grands champions. Moi, personnellement, jamais je ne me lancerai à départager ça parce que, malheureusement, il y en a qui sont morts trop jeunes. »

Ce que l’on peut se permettre d’affirmer, toutefois, c’est que Michael Schumacher « a été un dominant digne des quatre ou cinq plus grands de toute l’histoire de la F1 », conclut Pierre Houde.