Tout a commencé en 1984 avec le désir de Monique Lefebvre de mettre en lumière les capacités et le talent des personnes ayant une limitation fonctionnelle. Quarante ans plus tard, le Défi sportif AlterGo a changé la vie de dizaines de milliers d’athlètes.

La prochaine édition s’amorcera le 21 avril. Comme ce fut le cas au cours des 21 dernières années, Jean-Marie Lapointe est l’un des porte-parole du Défi. Le comédien, animateur et auteur est toujours aussi fébrile, à quelques jours du lancement officiel des activités.

En fait, sur la route quelque part entre Montréal et Québec au moment de l’appel de La Presse, Lapointe plaide pour que cet enthousiasme et cette attention à l’égard des personnes vivant avec des limitations physiques ou mentales existent également à longueur d’année.

Le Défi sportif AlterGo a eu un impact certain sur la société québécoise, reconnaît-il : « Quarante ans plus tard, il y a eu des pas de géant. »

En fait, dès son inauguration, l’évènement venait combler un besoin : « Du jour au lendemain, on mettait des visages sur des humains qu’on considérait presque comme des sous-humains. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Jean-Marie Lapointe, porte-parole du Défi sportif AlterGo

Le prochain Défi réunira plus de 7000 athlètes, de 110 établissements scolaires, dans 9 disciplines. Même si l’évènement a pris une ampleur considérable depuis les 20 dernières années, « je sais qu’encore aujourd’hui, il y a des gens qui ne le connaissent pas », précise Lapointe.

C’est pourquoi sa mission consiste à « sensibiliser des gens qui sont au pouvoir ou qui ont un certain pouvoir, parce qu’ils ont les moyens de faire bouger les choses ».

Changement de mentalité

Le Défi sportif AlterGo s’étend dorénavant sur une dizaine de jours. Lorsque Jean-Marie Lapointe a commencé à s’impliquer, sa durée était de quatre jours. « Ça veut dire qu’il y a de plus en plus de participants, de sports et d’écoles. Et toutes ces personnes deviennent des ambassadeurs du défi. Ce ne sont plus juste les porte-parole qui peuvent en parler. Ça fait des petits, année après année, parce que le Défi est de plus en plus populaire », dit-il.

Lui-même impliqué dans différents domaines d’activité à caractère social, avec les personnes handicapées, dépendantes et itinérantes notamment, l’artiste de 56 ans comprend avec du recul à quel point son lien avec le Défi l’a transformé.

« J’ai appris moi-même à me débarrasser de préjugés, de jugements, de malaises et de peurs, parce que je ne côtoyais pas la différence. »

Cette différence, désormais, est son pain quotidien. Avec le temps, il se reconnaît de plus en plus dans la mission et l’objectif du Défi.

Le monde devrait être comme le Défi : tout le monde a des chances et des opportunités égales. Tu as des limitations ? Bienvenue, welcome. Tu n’as pas de limitations ? Bienvenue, welcome. Pour moi, le Défi est devenu la norme en ce qui concerne le traitement de l’humain.

Jean-Marie Lapointe

S’il est motivé par l’idée d’inclure tout le monde dans la poursuite du bien commun et de l’acceptation, il aimerait bien pouvoir passer ses yeux à tous ses contemporains, pour qu’ils puissent s’émerveiller de la même façon que lui. Jean-Marie Lapointe a décidé de voir la vie, et le Défi, avec les yeux du cœur.

« Ils [les athlètes] trippent à prendre le plancher. Pourquoi ? Parce qu’avec la façon dont on les regarde, on les applaudit et on leur donne de l’amour, on les fait sentir humains, utiles... ils le sentent. Alors, imagine quand c’est tout le contraire qu’on leur fait vivre avec du rejet, en les pointant du doigt à cause de leur différence. Au défi, on les applaudit grâce à leur différence. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Le prochain Défi sportif AlterGo réunira plus de 7000 athlètes, de 110 établissements scolaires, dans 9 disciplines.

Continuer d’avancer

Le succès du Défi sportif AlterGo est cependant insuffisant pour changer l’ensemble des mœurs. Selon Lapointe, il faut faire en sorte de soutenir ces athlètes avant et après le Défi. Tout passe par la représentation et l’accessibilité, à petite et à grande échelle.

« Comment se fait-il que lorsque les Jeux olympiques arrivent, il y a des milliers et des milliers de journalistes de partout dans le monde et que trois semaines plus tard, les Jeux paralympiques arrivent et il y a un millième des journalistes qui restent ? », se demande-t-il.

À son avis, « la couverture médiatique n’est pas encore à la hauteur du grandiose, non seulement du spectacle qui est offert, mais aussi des participants, qui comme les athlètes paralympiques, s’entraînent comme des forcenés ».

Le travail a été bien entamé depuis les 40 dernières années, plaide-t-il. Il trouve même « fascinants » tout l’intérêt, l’attention et les investissements liés au Défi. La prochaine étape sera de marcher, tout le monde, main dans la main, au lieu de courir chacun de son côté en se passant le témoin : « Il y a eu des pas de géant, mais on n’a pas encore traversé la ligne d’arrivée tout le monde en même temps. »