Avec l’automne qui pointe à nos portes, le moment tombe à pic pour évaluer le travail estival de nos trois équipes professionnelles

La belle surprise

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

La saison s’annonçait encore une fois difficile pour les Alouettes, mais l’équipe montréalaise a surpris les amateurs de football.

Les Alouettes
Note : A

Le rebond des Alouettes est la belle surprise de l’été dans le sport montréalais. Qui aurait imaginé pareil scénario au printemps dernier ? L’interminable feuilleton entourant la propriété de l’équipe alimentait plutôt cette impression d’organisation à la dérive.

Mais voilà que les départs imprévus de l’entraîneur Mike Sherman et du directeur général Kavis Reed ont assaini l’air. Le premier n’avait pas l’écoute de ses joueurs et le deuxième montrait depuis trop longtemps ses limites. Du coup, un vent de fraîcheur a soufflé sur l’équipe.

Pour la première fois depuis l’époque où le duo Marc Trestman-Anthony Calvillo faisait autorité dans la Ligue canadienne, les Alouettes se retrouvent avec – à la fois – un entraîneur efficace et un véritable quart-arrière numéro un. Méchant changement avec les récentes saisons !

J’ignore si c’est le cas pour vous. Mais j’ai personnellement écouté plus de matchs des Alouettes cette saison que dans les quatre dernières… combinées ! Pourquoi ? Parce que le spectacle est captivant : attaques soutenues, jeux truqués, imagination et efficacité.

Alors bravo aux Alouettes qui réconcilient bon nombre d’amateurs avec la Ligue canadienne de football. En revanche, pas de félicitations à offrir au commissaire Randy Ambrosie dans le dossier de la vente de l’équipe. Malgré toutes les informations et rumeurs ayant marqué ce dossier, il n’a jamais fait le point de manière claire avec les amateurs. Ce manque de transparence est désolant.

Dans la moyenne

Le Canadien
Note : C

Une note moyenne pour un club moyen, voilà qui n’étonne guère. Les partisans qui s’attendaient à un feu d’artifice du Canadien au cours de l’été, période déterminante où les organisations tentent de s’améliorer en vue de la saison suivante, ont été déçus.

Bien sûr, l’épisode Sebastian Aho a fait illusion durant quelques heures. Mais en ne soumettant pas une offre financière plus agressive afin d’obtenir ce joueur doué, l’initiative était condamnée à l’échec. À l’évidence, le Canadien ne souhaitait pas verser une plus riche compensation (choix au repêchage) en cas d’embauche de joueur autonome avec restriction.

On peut tous avoir notre idée sur l’à-propos de cette prudence. Mais un élément est indéniable : avec Aho en uniforme, le Canadien aurait participé aux prochaines séries éliminatoires. Résultat, son rang de sélection aurait chuté. Les éventuels choix cédés aux Hurricanes de la Caroline ne leur auraient donc pas permis de choisir au début de chaque ronde. Et comme on le sait tous, après la sélection des meilleurs espoirs, le repêchage se transforme peu à peu en loterie, avec ses bonnes et mauvaises surprises. Bref, tant qu’à à se lancer dans l’opération Aho, le Canadien aurait dû foncer à fond.

Pour le reste, le Canadien s’est très légèrement amélioré à la ligne bleue (Ben Chiarot à la place de Jordie Benn). En attaque, Andrew Shaw devra être remplacé. Il suffit de lire les commentaires flatteurs de Max Domi à son propos dans notre édition de dimanche pour comprendre à quel point il était apprécié de ses coéquipiers.

Quant à Keith Kinkaid, le nouvel adjoint de Carey Price, il représente un point d’interrogation.

La bonne nouvelle pour le CH, c’est que des occasions d’obtenir du renfort peuvent encore surgir. Lorsque les jeunes vedettes toujours à la recherche d’un contrat toucheront le gros lot (les Patrik Laine et compagnie), des équipes risquent d’être confrontées à un problème de gestion du plafond salarial. Peut-être mettront-elles alors sur le marché des joueurs intéressants afin de réduire leur liste de paie. Si oui, Marc Bergevin pourrait saisir l’occasion pour renforcer son effectif.

Les derniers de classe

L’Impact
Note : D

L’hiver dernier, lors d’un entretien à son bureau du stade Saputo, Kevin Gilmore m’a dit à quel point la « stabilité » était un atout important pour une organisation sportive. Six mois plus tard, le nouveau président de l’équipe a été bouffé tout rond par la culture de l’Impact où le premier réflexe est de faire rouler les têtes lorsque les choses vont mal.

Le club connaissait beaucoup d’ennuis lorsque Rémi Garde a été congédié. Mais quel autre entraîneur aurait fait mieux ? Peu importe le sport, je connais peu d’équipes capables de réussir en l’absence de leur meilleur joueur. L’Impact sans Ignacio Piatti, c’est comme le Canadien sans Carey Price. Il ne faut pas s’attendre à des miracles lorsqu’ils ratent de nombreux matchs en raison d’une blessure.

Durant la conférence de presse annonçant le renvoi de Garde, Gilmore a répété plusieurs fois qu’il s’agissait de « sa » décision, manière peu subtile de montrer sa liberté d’action face à Joey Saputo. D’accord, message compris. Mais un gestionnaire de son expérience, qui a travaillé au sein de grandes organisations comme les Kings de Los Angeles et le Canadien, sait flairer le vent. L’impatience du tout-puissant propriétaire était manifeste et Gilmore l’a saisie. Comprendre l’humeur du patron dans les moments décisifs est la clé de la survie pour un cadre supérieur.

Saputo demeure le véritable maître à bord. Et sa visite dans le vestiaire après la défaite gênante de samedi dernier contre le FC Cincinnati en a fait la démonstration éclatante.

Pour remplacer Garde, l’Impact a choisi Wilmer Cabrera, fraîchement congédié par le Dynamo de Houston. Cette embauche a senti l’improvisation à plein nez, d’autant que sa feuille de route n’est pas un monument d’excellence. Et en misant sur un entraîneur incapable de s’exprimer en français, l’Impact n’a pas respecté un élément fondamental de son ADN, c’est-à-dire d’être le seul club francophone de Major League Soccer. Si le futur directeur sportif ne parle pas davantage le français, il faudra conclure que cette dimension ne compte plus pour l’Impact.

Gilmore a aussi évoqué l’absence d’une « identité » au sein de l’Impact. « On n’a jamais pris le temps de définir ce qu’on est comme club », a-t-il tranché.

Je crois plutôt que l’Impact a une identité très nette : elle est fondée sur les décisions impulsives, où les congédiements tiennent lieu de stratégie et où la hiérarchie n’est jamais claire, comme en fait foi l’étonnant parcours de Nick De Santis au cours des dernières années : perte d’influence en 2014, retour en force l’année suivante et départ définitif cet été. Le défi de l’Impact n’est donc pas de se doter d’une identité, mais plutôt de la réinventer.

Sur le plan commercial, l’Impact ne connaît pas une saison impressionnante. Les sièges vides sont nombreux au stade Saputo. La très modeste foule de mercredi, lors du premier volet du championnat canadien, en fournit un exemple concret. L’Impact devra redresser la barre dans l’ensemble de ses opérations. Car pour l’instant, l’organisation ne s’en va pas dans la bonne direction.