Le flash m'est venu tard un soir, en sortant du Nid d'oiseau. La séance d'athlétisme était terminée depuis déjà un bon moment. Sur l'esplanade qui sépare le stade du Cube d'eau, la foule était clairsemée: quelques silhouettes fugitives, petites taches noires perdue dans l'immensité des lieux.

J'ai levé la tête pour regarder le stade et son enchevêtrement de poutrelles d'acier, puis mon regard s'est porté vers le Cube. Le jour, le Centre national de natation - c'est son nom officiel - est original, mais sans plus. Les bulles de membrane souple qui forment son enveloppe extérieure ont une teinte plutôt terne, surtout quand la grisaille s'installe sur Pékin.

Mais la nuit, c'est autre chose. Le Cube s'illumine de l'intérieur et passe du bleu au mauve au vert, structure improbable et éternellement changeante, à la fois monolithique et aérienne. Le regard peine à s'en détacher.

Le stade, l'esplanade dans laquelle sont enchâssés des néons colorés qui clignotent, le Cube qui brille, le gigantesque édifice voisin aux airs de bateau-dragon, dont les façades sont ornées d'écrans de télévision hauts de plusieurs étages - on se croirait dans un univers virtuel.

D'où le flash dont je parlais plus tôt: ce soir-là, en sortant du stade, j'ai eu l'impression de me promener dans un de ces dessins conçus par ordinateur que produisent les architectes pour donner un avant-goût d'un projet. Le genre de dessin auquel on ajoute des arbres, une ou deux voitures et quelques passants pour donner l'échelle et humaniser l'ensemble. Silhouettes fugitives dans la nuit, figurants d'une mise en scène à grand déploiement qui se terminera ce soir et qui, au fond, a peu à voir avec la Chine réelle. Comme une bulle (olympique) qui s'apprête à éclater.