Après avoir patienté huit longues années avant de concrétiser son rêve de se qualifier pour les Jeux olympiques, la taekwondoïste Karine Sergerie s'en va à Pékin avec la ferme intention de monter sur le podium, et sur la plus haute marche de préférence.

Couronnée championne du monde l'an dernier, l'athlète de 23 ans fait partie des principaux espoirs de médaille du Canada aux Jeux qui s'ouvriront vendredi prochain à Pékin. Ces attentes n'intimident nullement la principale intéressée même si elle en sera à sa première expérience aux Olympiques.

«Je trouve ça plaisant que les gens croient en moi et me voient sur le podium, confie la résidante de Sainte-Catherine. Je sais que le niveau de compétition sera très relevé aux jeux. Mais j'ai bien l'intention d'offrir le meilleur de moi-même et de relever le défi visant à remporter l'or. C'est un défi très motivant.»

La tâche s'annonce plus ardu qu'il y paraît même si elle n'a perdu qu'un seul tournoi international au cours des deux dernières années. En effet, la formule de compétition olympique comprend seulement quatre catégories de poids, contrairement à huit aux championnats du monde.

Habituée à évoluer chez les moins de 63 kg, Sergerie se retrouvera dans une catégorie qui regroupera des athlètes dont le poids varie entre 57 et 67 kg. Elle devra donc se battre contre des adversaires plus grandes qu'elle, une perspective qui ne l'inquiète nullement.

«A cinq pieds quatre pouces, je suis habituée à affronter des adversaires plus grandes que moi. Nous avons préparé notre stratégie en conséquence et nous avons étudié les vidéos.»

Sergerie entend miser sur sa vitesse et ses déplacements pour compenser la différence de taille.

«Il suffit de bien gérer ma distance et d'effectuer les bons déplacements pour rendre l'adversaire hésitante.»

Sur le plan psychologique, elle doit aussi apprendre à contrôler son tempérament impétueux dans l'aire de combat.

«J'ai tendance à devenir impatiente et à attaquer trop rapidement, ce qui me rend vulnérable. Je dois mieux préparer mes attaques et ne pas me laisser emporter par les émotions. Le but de l'exercice est de marquer le plus de points possible en évitant d'en concéder.»

Pénible souvenir

Écartée de la délégation canadienne lors des Jeux d'Athènes en 2004 à la suite d'un imbroglio comme seul le sport amateur canadien en a le secret, Sergerie n'a pas emprunté la voie la plus facile pour assurer sa sélection cette année. Il lui suffisait de terminer parmi les quatre premières à la qualification mondiale à Manchester, en Angleterre, en septembre dernier pour obtenir son laissez-passer pour Pékin. Elle a raté l'objectif.

«Je traînais encore le pénible souvenir de 2004 et je n'ai pas abordé cette compétition dans la bonne disposition d'esprit. J'étais concentrée sur la nécessité de ne pas perdre au lieu de faire mon travail comme j'ai l'habitude de le faire. Je n'ai pas bien contrôlé mes émotions.»

Heureusement, elle a saisi son autre chance de remplir le standard en remportant la sélection canadienne en février.

Revenant sur sa mésaventure de 2004, Sergerie en garde encore un goût amer.

«C'est une cicatrice qui va rester. C'est le premier grand choc de ma vie.»

Car Sergerie nourrit le rêve d'aller aux Jeux olympiques depuis qu'elle a six ans.

«Je me souviens qu'en regardant les Jeux avec mon père, j'avais beaucoup de questions à lui poser. J'étais fascinée par l'énergie dégagée par les athlètes. Mon père m'avait expliqué que c'était des personnes spéciales, qu'elles avaient travaillé fort pour en arriver là.»

Initiée au karaté à l'âge de cinq ans par son père, elle s'est mise peu après au taekwondo pour suivre les traces de son frère. Elle a pris le sport au sérieux quand les rumeurs de l'ajouter au programme olympique ont commencé à circuler dans les années 1990, ce qui est devenu réalité aux Jeux de Sydney en 2000.

C'est son père Réjean, un maître de taekwondo, qui lui sert d'entraîneur depuis ses débuts. Mais il ne sera malheureusement pas à ses côtés à Pékin.

«Ce n'est pas un problème, jure Sergerie. Depuis que je participe aux compétitions internationales, nous ne sommes pas toujours ensemble. Il ne souhaite pas que je sois dépendante de lui. C'aurait été plaisant qu'il puisse venir. Mais selon le plan initial, c'était ma place qu'il fallait assurer.»

Sergerie sera toutefois bien encadrée à Pékin puisqu'elle misera sur les bons conseils d'Alain Bernier, qui est aussi l'entraîneur de Sébastien Michaud. Celui-ci tenait également ce rôle l'an dernier quand elle a remporté son titre mondial.

Sergerie et Michaud compétitionneront tous les deux le même jour, soit le 22 août.