Le séquençage du génome d'une petite grenouille africaine annoncé jeudi devrait permettre à la science de mieux protéger les amphibiens en déclin rapide dans le monde et faire avancer la compréhension des maladies humaines.

Le Xenopus tropicalis rejoint ainsi le rang des plus de 175 organismes dont le génome a été séquencé depuis 2001, dont celui de l'homme, de l'abeille, de la vache, du poulet ou encore de la souris.

Les chercheurs de l'équipe internationale à l'origine de ce séquençage ont découvert que le génome de cette grenouille compte de 20 000 à 21 000 gènes, dont plus de 1700 sont très similaires à ceux impliqués chez l'homme dans le cancer, l'asthme et les maladies cardiaques.

En comparaison, le génome de l'homme contient environ 23 000 gènes, précisent ces chercheurs dont les travaux paraissent dans le revue américaine Science du 30 avril.

«Ce séquençage constitue un point de départ important (...) pour comprendre le fonctionnement des gènes et comment ils interagissent durant le développement des maladies», souligne Jacques Robert, un immunologiste de la faculté de Médecine de l'Université de Rochester (New York), un des co-auteurs de cette recherche.

Le «Xenopus est très prometteur et devrait devenir un modèle de recherche très puissant pour nous aider à comprendre davantage comment fonctionnent nos propres gènes», poursuit ce chercheur dans un communiqué.

Le séquençage de cette petite grenouille africaine ouvre aussi la possibilité d'étudier au niveau moléculaire et génomique les effets des produits chimiques provenant de la pollution qui perturbent le fonctionnement des glandes endocrines des amphibiens, souligne Uffe Hellsten, un bio-informaticien du «Joint Genome Institute», qui fait partie du ministère américain de l'Energie, qui a coordonné les travaux.

«Ces substances chimiques imitent les hormones des grenouilles et leur présence dans les lacs et cours d'eau pourraient être en partie responsables du déclin des populations de grenouilles partout dans le monde», ajoute ce chercheur.

«Il faut espérer que la compréhension des effets de ces perturbateurs hormonaux va aider à préserver la diversité des espèces de grenouilles et aura aussi un impact positif pour la santé de l'homme car ces substances affectent aussi notre organisme», observe-t-il.

Les premiers résultats de l'ébauche du séquençage du génome du Xenopus sont accessibles aux chercheurs depuis plusieurs années - le projet a commencé en 2002 -, mais l'étude dévoilée jeudi représente la première analyse du génome complet du Xenopus, poursuit ce bio-informaticien.

Une comparaison des zones autour de gènes spécifiques chez la grenouille, le poulet et l'homme révèle des similarités étonnantes indiquant que des structures génétiques sur les chromosomes sont restées inchangées dans ces différentes espèces au cours de l'évolution.

«Quand on regarde des segments du génome du Xenopus, on peut voir littéralement des structures génétiques vieilles de 300 millions d'années qui appartiennent au génome du dernier ancêtre commun de tous les oiseaux, grenouilles, dinosaures et mammifères ayant foulés la Terre», relève Uffe Hellsten.

«Il semblerait ainsi que la fragmentation et le réarrangement des chromosomes soient extrêmement rares dans l'évolution», ajoute-t-il.

Le Xenopus est un genre de grenouille regroupant plus de vingt espèces en Afrique subsaharienne.

Les biologistes ont découvert au début du 20e siècle qu'elles étaient sensibles à la gonadotrophine, des hormones liée à la fécondation, et ont ainsi servi de test de grossesse bon marché.

Près de 50 chercheurs de 24 institutions de recherche dans le monde ont participé à ce projet financé par les Etats-Unis.