(Téhéran) L’Iran a accusé Israël et les États-Unis d’être derrière l’attentat qui a fait au moins 95 morts mercredi près de la tombe de Qassem Soleimani, architecte des opérations militaires iraniennes au Moyen-Orient dont l’Iran commémorait la mort il y a quatre ans, ont rapporté des médias d’État.

L’agence de presse officielle IRNA avait évoqué dans un premier temps un bilan de 103 morts, la télévision d’État rapportant 211 blessés, dont certains dans un état critique.

Le ministre de la Santé, Bahram Eynollahi, a ensuite révisé à 95 « le nombre exact de personnes tuées dans l’incident terroriste », expliquant que certains noms « avaient été enregistrés deux fois par erreur ».

  • Des personnes se dispersent après que deux explosions ont retenti à l’endroit où une foule commémorait la mort de Qassem Soleimani, à Kerman.

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    Des personnes se dispersent après que deux explosions ont retenti à l’endroit où une foule commémorait la mort de Qassem Soleimani, à Kerman.

  • Des secouristes iraniens arrivent sur le site où des explosions ont fait près d’une centaine de morts.

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    Des secouristes iraniens arrivent sur le site où des explosions ont fait près d’une centaine de morts.

  • Un homme pleure une proche tuée dans l’une des explosions.

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    Un homme pleure une proche tuée dans l’une des explosions.

  • Un homme tient des portraits du guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, et de Qassem Soleimani lors d’une cérémonie à la mémoire de ce dernier, à Téhéran.

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    Un homme tient des portraits du guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, et de Qassem Soleimani lors d’une cérémonie à la mémoire de ce dernier, à Téhéran.

  • Le président de l’Iran, Ebrahim Raïssi, a prononcé un discours lors d’une cérémonie de commémoration, quatre ans jour pour jour après la mort de Qassem Soleimani.

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    Le président de l’Iran, Ebrahim Raïssi, a prononcé un discours lors d’une cérémonie de commémoration, quatre ans jour pour jour après la mort de Qassem Soleimani.

  • À Téhéran, une foule célébrant la commémoration de la mort de Qassem Soleimani

    PHOTO ATTA KENARE, AGENCE FRANCE-PRESSE

    À Téhéran, une foule célébrant la commémoration de la mort de Qassem Soleimani

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Une double explosion a eu lieu près de la mosquée Saheb al-Zaman, où se trouve la tombe du général Soleimani, à Kerman, dans le sud de l’Iran. Une foule compacte composée de représentants du régime et d’anonymes y était rassemblée pour une cérémonie.

Un conseiller politique du président iranien a accusé Israël et les États-Unis d’être derrière cet attentat.

« Washington affirme que les États-Unis et Israël n’ont joué aucun rôle dans l’attentat terroriste de Kerman, en Iran. Vraiment ? Un renard ne sent pas sa propre odeur », a écrit mercredi Mohammad Jamshidi sur X.

La responsabilité de ce crime incombe aux régimes américain et sioniste, et le terrorisme n’est qu’un outil.

Mohammad Jamshidi, sur le réseau social X

« Absurde », dit Washington

Le département d’État à Washington a jugé de son côté « absurde » toute suggestion que les États-Unis ou Israël seraient impliqués dans l’attentat.

« Les États-Unis n’ont été impliqués en aucune façon. Toute affirmation contraire est absurde », a déclaré le porte-parole du département d’État Matthew Miller, ajoutant : « Nous n’avons aucune raison de croire qu’Israël est impliqué. »

L’attentat « ressemble à une attaque terroriste, le genre de chose que l’EI [groupe armé État islamique] a fait dans le passé », a affirmé un haut responsable américain sous le couvert de l’anonymat.

Ennemi juré de l’Iran, Israël n’a pas commenté l’attentat. « Nous sommes concentrés sur les combats avec le Hamas », a déclaré le porte-parole de l’armée, Daniel Hagari, en réponse à une question.

L’attaque, qui n’a pas été revendiquée dans l’immédiat, survient dans un contexte régional très tendu depuis le début du conflit il y a près de trois mois entre Israël et le Hamas à Gaza, et au lendemain de l’élimination d’un haut responsable du mouvement islamiste palestinien dans une frappe aérienne près de Beyrouth.

« Réponse sévère »

Selon l’IRNA, la première explosion est survenue à 700 mètres de la tombe de Soleimani et la seconde un kilomètre plus loin.

Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux ont montré des participants tentant désespérément de quitter les lieux alors que le personnel de sécurité bouclait la zone. Dans d’autres vidéos, on peut voir des personnes courant, paniquées et désorientées.

Le gouvernement iranien a décrété ce jeudi « journée de deuil national dans tout le pays » après l’attaque, la plus meurtrière en Iran depuis 1978, quand un incendie criminel avait fait au moins 377 morts dans un cinéma d’Abadan selon les archives de l’AFP.

À la tombée de la nuit, de nombreuses personnes sont revenues au cimetière de Kerman en scandant « Mort à Israël ! » et « Mort à l’Amérique ! ». À Téhéran, des milliers de personnes se sont rassemblées pour rendre hommage à Soleimani.

PHOTO WANA NEWS AGENCY, FOURNIE PAR REUTERS

Zeinab Soleimani, fille de Qassem Soleimani

« Nous condamnons le terrible attentat terroriste d’aujourd’hui […] J’espère que les auteurs de ce crime seront identifiés et punis pour leurs actes », a déclaré Zeinab, la fille du général.

Le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, a quant à lui promis une « réponse sévère » à l’attentat, condamné comme un acte « odieux et lâche » par le président Ebrahim Raïssi qui a annulé un déplacement prévu ce jeudi en Turquie après l’attaque, selon un média d’État.

Le mouvement islamiste palestinien Hamas, soutenu par l’Iran, a de son côté fustigé un « acte terroriste […] qui cherche à déstabiliser la sécurité de la République islamique au service du programme de l’entité sioniste [Israël] ».

De son côté, le président russe Vladimir Poutine a dénoncé un attentat « choquant par sa cruauté et son cynisme », et le secrétaire général de l’ONU, l’Union européenne, la France, l’Allemagne, la Jordanie et l’Arabie saoudite ont eux aussi condamné l’attaque.

« Martyr vivant »

Qassem Soleimani a été tué en janvier 2020, à 62 ans, dans une attaque de drone américaine en Irak. Homme clé du régime iranien, il était également l’une des personnalités publiques les plus populaires du pays.

PHOTO MEHDI GHASEMI, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Qassem Soleimani est mort assassiné le 3 janvier 2020.

Selon l’agence iranienne Tasnim, qui cite des sources bien informées, les explosions ont été provoquées par des « bombes dissimulées dans deux sacs ». « Les auteurs des faits ont apparemment activé les bombes au moyen d’une télécommande », selon la même source.

« Nous marchions vers le cimetière lorsqu’une voiture s’est soudainement arrêtée derrière nous et qu’une poubelle contenant une bombe a explosé », a indiqué un témoin cité par l’agence de presse ISNA.

Selon la même agence, qui cite le maire de Kerman, Said Tabrizi, les explosions se sont produites à 10 minutes d’intervalle.

Longtemps considéré comme un ennemi juré des États-Unis et de leurs alliés, Qassem Soleimani dirigeait la Force Qods, la branche des opérations extérieures du corps des Gardiens de la révolution islamique d’Iran, supervisant les opérations militaires dans l’ensemble du Moyen-Orient.

Déclaré « martyr vivant » par l’ayatollah Ali Khamenei alors qu’il était encore en vie, Soleimani était considéré comme un héros pour son rôle dans la défaite du groupe djihadiste État islamique en Irak et en Syrie.

L’Iran a déjà été le théâtre d’attaques et d’attentats à la bombe qui ont fait des dizaines de morts, dont plusieurs ont été revendiqués par des groupes qualifiés de « terroristes » par Téhéran.

En 2019, un attentat suicide à la voiture piégée contre un bus des Gardiens de la Révolution, ensuite revendiqué par Jaish al-Adl, groupe djihadiste formé en 2012, avait tué 27 soldats dans le sud-est du pays.