(Istanbul) Le président turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré samedi rompre tout contact avec le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou et Ankara rappelle son ambassadeur en réaction à l’opération d’Israël dans la bande de Gaza, à la veille d’une visite du secrétaire d’État américain Antony Blinken en Turquie.

« Nétanyahou n’est plus quelqu’un avec qui nous pouvons parler. Nous avons fait une croix sur lui », a déclaré M. Erdogan, selon des propos rapportés par les médias turcs.

Peu après, la Turquie annonçait le rappel de son ambassadeur en Israël pour consultations, en raison du refus d’Israël d’accepter un cessez-le-feu à Gaza.

Ce n’est que l’an dernier que les deux pays avaient à nouveau nommé des ambassadeurs, après une décennie de relations quasiment gelées. Et ils avaient repris les discussions sur la construction d’un oléoduc, projet soutenu par les États-Unis et qui aurait pu lancer la base d’une coopération plus durable entre les deux pays.  

Mais samedi, le ministère turc des Affaires étrangères a annoncé que l’ambassadeur Sakir Ozkan Torunlar avait été rappelé compte tenu « de la tragédie humanitaire en cours à Gaza causée par les attaques incessantes d’Israël contre des civils et le refus d’Israël (d’accepter) un cessez-le-feu ».

Le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Lior Haiat, a dénoncé « une nouvelle mesure du président turc qui se place au côté de l’organisation terroriste Hamas ».

Le 25 octobre, M. Erdogan, qui avait rencontré Benyamin Nétanyahou pour la première fois en septembre à New York, avait annoncé renoncer à tous ses projets de déplacement en Israël, affirmant avoir été « abusé » par le premier ministre israélien.

Blinken attendu en Turquie

« Vous ne trouverez aucun autre État dont l’armée se conduise avec une telle inhumanité », avait-il lancé à propos des représailles menées par Israël à Gaza, après l’attaque sanglante lancée par le Hamas contre Israël le 7 octobre et qui a fait 1400 morts côté israélien, en majorité des civils.

Il avait également durci le ton vis-à-vis des soutiens occidentaux d’Israël, notamment les États-Unis.

Ces annonces d’Ankara interviennent à la veille d’une visite du secrétaire d’État américain Antony Blinken en Turquie. M. Blinken, qui s’est rendu vendredi en Israël et samedi en Jordanie, est attendu dimanche à Ankara pour deux jours, dernière étape de sa tournée dans la région.

Mais la visite s’annonce difficile, et des manifestations sont attendues dimanche en protestation contre le soutien américain à Israël, notamment autour de la base aérienne américaine d’Incirlik, dans le sud-est de la Turquie.

Nétanyahou « principal responsable »

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Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou

Le ministère de la Santé du Hamas palestinien a déclaré samedi que 9488 personnes, dont 3900 enfants, avaient été tuées dans la bande de Gaza depuis le début de la guerre avec Israël, qui y mène des raids aériens incessants.

Après la diatribe de M. Erdogan, Israël avait annoncé le 29 octobre retirer tous ses diplomates de Turquie. Mais il avait déjà demandé le 19 octobre à ses diplomates de quitter temporairement le pays par « mesure de sécurité ».

M. Erdogan a précisé samedi que la Turquie ne rompait pas ses relations diplomatiques avec Israël.

« Rompre complètement les liens n’est pas possible, surtout dans la diplomatie internationale », a déclaré M. Erdogan.

Il a expliqué que le chef de l’agence turque de renseignement (MIT), Ibrahim Kalin, était le fer de lance des efforts de la Turquie pour tenter de mettre fin à la guerre, via une médiation.

« Ibrahim Kalin parle avec la partie israélienne. Bien sûr, il négocie également avec la Palestine et le Hamas », a déclaré M. Erdogan.

Mais selon lui, M. Nétanyahou est le principal responsable des violences et a « perdu le soutien de ses propres citoyens […] Ce qu’il doit faire, c’est prendre du recul et mettre fin à cette situation ».